Par ailleurs, du 1er au 12 novembre prochain, le Royaume-Uni accueillera à Glasgow la 26e conférence des parties (COP 26) de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
Londres entend ainsi inclure les aspects de sécurité et de défense aux discussions, alors que ceux-ci avaient été traités de manière séparée lors de la COP 21, organisée au Bourget fin 2015. Pour appuyer cette volonté, le Premier ministre britannique a invité le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, à participer à la COP 26. Cette initiative est soutenue par Paris qui y voit une opportunité de présenter ses capacités d'innovation et la créativité au sein de ses forces armées pour améliorer la compréhension globale des changements climatiques.
L'objectif britannique est de former une coalition de pays prêts à signer une déclaration appelant à la transition écologique des armées et à la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre à travers le monde. Le secrétaire général de l'Otan s'est dit prêt à appuyer l'initiative, à condition que celle-ci soit soutenue par un nombre significatif de pays. Outre la France, le Royaume-Uni s'est donc tourné vers d'autres pays partenaires au sein de l'Alliance, notamment les États-Unis l'Allemagne, la Pologne, ainsi que des pays européens de plus petite taille comme la Slovénie, le Luxembourg, l'Autriche ou la Suisse, tous prêts à s'engager sur cette question.
Par ailleurs, d'autres États plus éloignés géographiquement ont été contactés, par exemple le Chili, le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande ou plus spécifiquement des pays menacés par l'élévation du niveau des eaux, comme les îles Fidji ou le Bangladesh.
Pour le moment, peu de pays ont amorcé une transition énergétique avec un volet spécifique dédié à la défense. On compte par exemple les États-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, le Canada, le Danemark ou l'Australie. Assez naturellement, les échanges se font donc prioritairement avec ces partenaires. De nombreux travaux sont à l'étude avec l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie et les États-Unis sur la certification des biocarburants pour le secteur aéronautique qui doivent se conformer à la politique de carburant unique de l'Otan. Des échanges se font également avec l'Australie qui souhaite développer ses mines de terres rares pour faire concurrence à la Chine, et s'est à cet effet associée à des entreprises françaises.
L'ensemble de ces sujets pourraient être repris à l'occasion de la COP 26, au sein de coalitions dont les Français pourraient prendre la tête aux côtés des Britanniques. En effet, lors de son audition, le général Richard Nugee, responsable de la stratégie de transition écologique du ministère britannique de la Défense, nous a assuré qu'un soutien de la France au plus haut niveau permettrait de renforcer l'initiative car nous sommes en mesure d'atteindre des pays avec lesquels le Royaume-Uni est moins lié. Londres insiste de plus sur le fait que cette initiative n'est pas un projet purement britannique mais bien une ambition globale, partagée par d'autres pays moteurs, aux rangs desquels la France peut occuper une place stratégique en Europe.
La COP 26 représente par conséquent une occasion unique pour mettre en avant les réussites du binôme franco-britannique, en particulier sur le sujet climat-défense, dans le cadre des traités de Lancaster House de 2010. Nos deux pays ont tout avantage à avancer ensemble sur ces questions : nous partageons les mêmes enjeux, avons des moyens similaires, n'entrons pas en compétition, et sommes en mesure d'emporter avec nous la quasi-totalité des Européens et Occidentaux.
En conclusion, j'aimerais citer une des personnes que nous avons auditionnées, qui a prononcé la phrase suivante quand nous l'avions interrogée sur le degré de prise de conscience par le ministère des Armées du caractère impérieux de la transition écologique pour les armées : (je cite) « Nous avons conscience que le ministère des Armées ne pourra pas passer à côté de la dynamique de transition écologique » (fin de citation). En dépit de la critique que pourrait susciter cette phrase – car elle pourrait en effet laisser entendre que s'il était possible de passer à côté la dynamique de transition écologique, alors les armées le feraient – est révélatrice de la prise de conscience au sein du ministère des Armées de l'importance de sa transition écologique. Au fil des auditions, nous avons acquis la certitude que la dynamique enclenchée par le ministère des Armées depuis 2007 est réelle et solide.
Cependant, parce que nous avons conscience du caractère parfois fluctuant des engagements pris en la matière, soumis à des aléas de nature politique et/ou budgétaires, nous estimons qu'il est nécessaire d'aller plus loin en matière d'engagement. Nous estimons également que le Parlement devra jouer un rôle plus important à l'avenir dans l'élaboration, le suivi et l'évaluation de la politique environnementale du ministère des Armées.
Ainsi, et ce sera là nos deux dernières recommandations, afin de garantir une bonne information du Parlement, nous souhaitons conclure ce propos liminaire en plaidant pour :
– d'une part, la fixation dans les futures lois de programmation militaire d'objectifs précis à atteindre chaque année en matière de transition énergétique, qui déclinent les objectifs fixés dans la stratégie énergétique de défense. À titre d'exemple, la trajectoire d'incorporation de biocarburant sur la période 2020-2050 pourrait y être inscrite, afin de marquer symboliquement l'engagement du ministère dans le processus de transition énergétique ;
– et d'autre part, afin d'éclairer régulièrement la représentation nationale, la remise d'un rapport biannuel au Parlement rendant compte, de manière précise, claire et exhaustive, de l'ensemble des actions entreprises par le ministère des Armées pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixés en matière de politique environnementale, en justifiant chaque échec éventuel.
De notre point de vue, les aléas dus aux alternances politiques ne doivent, en aucun cas, avoir pour effet d'entraver la dynamique enclenchée depuis 2007 au sein de ce ministère, et en particulier l'accélération récente consécutive à l'annonce de la stratégie énergétique de défense. La représentation nationale devra veiller au respect du suivi de cette trajectoire et se devra d'être une observatrice attentive des progrès accomplis en la matière.
Nous vous remercions pour votre attention et sommes désormais disposés à répondre à toutes vos questions.