Intervention de Agnès Buzyn

Séance en hémicycle du mercredi 29 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 — Article 12

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Je vais évidemment donner un avis défavorable.

La France connaît une triste spécificité en matière de tabagisme qui nous amène à considérer que la hausse du prix du tabac est probablement le meilleur levier dont nous disposions aujourd'hui. À l'évidence, les différentes lois qui se sont succédé et les mesures d'accompagnement des fumeurs désireux d'arrêter n'ont pas suffi. La prévention n'a pas suffi.

Notre spécificité tient à un taux de tabagisme des femmes au-dessus de 30 %, et avoisine même les 40 % pour les femmes entre vingt et cinquante ans. Nous sommes probablement l'un des pires pays au monde en matière de tabagisme des femmes. Nous occupons l'avant-dernière place en Europe pour le tabagisme des jeunes de dix-sept ans. Aujourd'hui, un jeune de dix-sept ans sur trois fume quotidiennement.

Nous n'avons visiblement pas réussi, malgré les différents plans, à lutter contre l'aggravation de la prévalence du tabagisme dans notre pays. Pourtant, dans les pays européens, qui connaissaient une situation comparable il y a dix ans, le taux de fumeurs est maintenant passé sous la barre des 20 %. Au Royaume-Uni, la proportion de fumeurs, qui était identique à la nôtre – 32 % – en 2005, est de 17 % alors qu'elle reste en France de 32 %.

Oui, toute la littérature internationale montre qu'une augmentation de 10 % du prix du tabac se traduit par une baisse de 4 % du nombre de fumeurs. C'est la raison pour laquelle nous avons choisi d'utiliser la hausse du prix du tabac comme levier pour sensibiliser les Français à la nécessité d'arrêter de fumer et prévenir l'entrée des jeunes dans le tabagisme – je rappelle qu'un quart de million d'enfants entre dans le tabagisme chaque année ; 250 000 jeunes commencent à fumer chaque année. Ces derniers sont la cible prioritaire des lobbies du tabac. L'augmentation du prix est un excellent instrument à leur égard.

Il ne faut pas opposer cette augmentation et ce que nous devons aux buralistes. L'idée n'est évidemment pas de punir ces derniers qui sont indispensables à la cohésion sociale des territoires. Gérald Darmanin a présenté un plan d'accompagnement devant le Congrès des buralistes. Nous mettons également en oeuvre un plan de lutte très ferme contre la fraude et la contrebande, notamment en créant 200 postes de douaniers supplémentaires. Des mesures sur la traçabilité sont actuellement discutées au niveau européen. Enfin, des mesures seront prises contre la vente sauvage que nous constatons aujourd'hui dans les centres-villes. Toutes ces mesures forment un plan complet qui accompagne les dispositions fiscales.

S'agissant du fonds de lutte contre le tabac, alimenté par une taxe sur les fournisseurs et les distributeurs, je rappelle qu'il n'est pas possible aujourd'hui de taxer les fabricants car ils se situent à l'étranger. Mais il est indispensable de taxer l'économie du tabac qui aujourd'hui échappe complètement à l'impôt car les bénéfices sur les ventes de tabac réalisées en France de fait échappent à l'impôt.

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