Intervention de François Cormier-Bouligeon

Réunion du mercredi 7 juillet 2021 à 17h35
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Cormier-Bouligeon :

Mon général, vous nous avez livré un témoignage d'une haute tenue et sans langue de bois, ce qui est appréciable. J'ai notamment apprécié votre rappel très clair à l'obéissance stricte de l'armée républicaine au pouvoir politique légitime incarné par le Président de la République. Mais j'ai été interpellé par deux éléments. Le premier, c'est votre référence à Georges Dumézil et à la tripartition « Oratores, Laboratores, Bellatores ». Georges Dumézil ajoutait ceci : « le schéma tripartite est mort en Occident avec les États généraux de 1789, quand la noblesse et le clergé ont baissé pavillon le Tiers État. »

Deuxième élément, en emboîtant le pas à l'analyse de Georges Dumézil, vous vous référez, pour expliquer l'affaiblissement de la singularité militaire, au clivage entre Républicains et Monarchistes, en mettant l'accent sur la méfiance du Parlement vis-à-vis d'un exécutif trop fort, disposant d'une administration trop efficace et d'une armée trop puissante. Vous nous avez également exposé le poids des dividendes, encaissés, de la paix après la Guerre froide. Vos propos m'interpellent à deux égards. Premièrement, il me semble que nous pourrions nous demander si l'armée française n'a pas été la plus efficace lors du premier conflit mondial – vous y avez fait référence – à un moment où la Chambre des députés était plus puissante, et où une glorieuse figure de notre Assemblée, Georges Clémenceau, dirigeait non seulement l'exécutif mais aussi le ministère de la Guerre. Il s'agit là d'un premier paradoxe. Deuxièmement, je m'interroge sur la validité de votre analyse sous la Cinquième République, où précisément l'exécutif semble avoir pris le pas, peut-être de façon excessive, sur le Parlement, et peut décider librement du sort de nos armées. En conséquence, ne faut-il rechercher les causes de l'affaiblissement de la singularité militaire ailleurs que dans la construction républicaine de l'État, à laquelle par ailleurs nous sommes un certain nombre, et vous aussi je crois, très attachés ? Je vous remercie.

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