Le programme SCAF ne peut être mené qu'au niveau européen. Plutôt que de dépenser de l'énergie à élaborer un plan B, je préfère donc que l'équipe France se concentre sur le plan A. Nous avons franchi une étape importante lors du vote du Bundestag, qui nous permet de mettre les industriels au travail. Nous avons deux ans devant nous que nous devons mettre à profit pour tester des méthodes de coordination et de gouvernance.
En ce qui concerne la Grèce, le partenariat stratégique que nous avons signé le 28 septembre résulte d'une très longue réflexion et de la conduite commune d'opérations. Nous avons des intérêts mutuels et nous nous sommes effectivement prouvé notre solidarité ; c'est ce qui fait la force de nos liens. Nous avons décidé de traduire ces derniers en une coopération stratégique dans le domaine de la politique étrangère, ainsi qu'en matière militaire et de défense. Concrètement, la Grèce a décidé en début d'année de se doter d'avions de combat Rafale – douze d'abord, puis six exemplaires supplémentaires, annoncés par le Premier ministre grec il y a quelques jours. La Grèce a ensuite fait connaître son intention d'acquérir trois FDI. Voilà qui concrétise notre objectif d'exporter davantage vers des pays européens.
Le symposium naval de l'océan Indien, dont la France a pris la présidence, est une instance de dialogue et de collaboration entre marines qui regroupe vingt-cinq États membres permanents de la zone, dont l'Inde, Singapour, les Émirats arabes unis, l'Arabie saoudite et l'Iran. Dans ce cadre, nous voulons bien sûr renforcer l'image de la France comme pays riverain de l'océan Indien – plus de 1 million de nos ressortissants vivent dans la zone et notre ZEE s'étend sur 3,1 millions de kilomètres carrés –, mais aussi nos partenariats stratégiques et notre influence régionale dans le contexte que vous connaissez. Nous visons également l'objectif spécifique d'introduire la notion de sécurité environnementale de façon permanente : la lutte contre la pêche illégale, la préservation des ressources halieutiques, la lutte contre les pollutions sont un enjeu majeur pour la région.
Mon ministère a développé deux stratégies importantes qui ont respectivement pour objet la préservation de la biodiversité et la performance énergétique. S'agissant de la biodiversité, nos investissements sont en hausse. Nous avons établi en 2021 une stratégie qui vise l'amélioration de la connaissance du patrimoine naturel, une gestion écologique efficace et adaptée des emprises et le renforcement de nos partenariats avec les acteurs de la biodiversité, par exemple avec le Muséum d'histoire naturelle – c'est très utile à la bonne compréhension de phénomènes naturels et nous apportons une contribution tout à fait concrète à nos partenaires en emmenant les chercheurs dans des zones très difficiles d'accès. L'enveloppe allouée à cette stratégie sera supérieure à 3 millions d'euros par an dès 2022, ce qui est tout à fait significatif.
Concernant le succès du Rafale à l'export et ses conséquences sur les moyens de l'armée de l'air et de l'espace, nous avons d'emblée fixé dans la LPM une cible en matière d'équipement ainsi que l'objectif d'améliorer fortement la disponibilité de nos matériels. C'est la conjugaison de ces deux éléments – les acquisitions de matériels neufs et l'amélioration du taux de disponibilité des matériels que nous avons déjà – qui fera la force de frappe de l'armée de l'air et de l'espace. Il est exact que la vente à la Grèce de douze Rafale d'occasion va avoir un effet temporaire, que nous allons compenser non seulement en commandant des appareils de substitution – c'est fait –, mais aussi et surtout en rééquipant des appareils plus anciens et en augmentant le taux de disponibilité.
S'agissant des conséquences budgétaires, je vous confirme, Monsieur le député Ferrara, que le ministère des armées récupérera bien la totalité des produits de cession, qui s'élèvent à 611 millions d'euros pour la période allant de 2021 à 2023, dont 477 déjà rattachés à l'exercice 2021 – nous en reparlerons à propos de l'exécution budgétaire de l'année 2021. En outre, chaque année, je réétudie précisément l'avancement des différents programmes, ce qui me permet de dégager des marges de manœuvre pour réaffecter des fonds à des programmes qui progressent bien, voire plus vite que prévu, ou bien là où il existe une priorité, ce qui est clairement le cas en l'espèce.
En ce qui concerne la perspective croate, nous y travaillons encore, mais, je l'ai dit, nous recompléterons le prélèvement qui aura lieu au profit de ce pays. Nous devons encore affiner le phasage pour déterminer de quelle façon les prélèvements seront opérés et à quel rythme ils seront compensés. L'objectif est évidemment de tenir la cible ; la question est de savoir si nous pourrons le faire pour 2025 ou si ce sera à l'horizon 2030, comme prévu initialement. Je vous demande un peu de patience ; nous y travaillons très sérieusement.
J'en viens à la maintenance des infrastructures, un sujet majeur. En 2021, nous avons consenti un effort particulier, utilisant les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l'État pour la maintenance de notre immobilier. Par ailleurs, nous avons obtenu la mobilisation de 200 millions d'euros, dans le cadre du plan de relance, pour des projets énergétiques dont l'effet sur la qualité de notre immobilier est très net. Enfin, nous avons voulu, au cours des dernières années, déconcentrer certains crédits au niveau des commandants des bases de défense.
Nous disposons désormais de près de 360 millions d'euros consacrés au maintien en condition et aux travaux d'adaptation mineurs de nos infrastructures. Cette somme sera maintenue en 2022. La nouveauté, c'est que ces crédits seront disponibles pour les commandants de base de défense dès le début de l'année, ce qui leur offrira une visibilité et, surtout, l'assurance que les montants seront dépensés au cours de l'exercice. En effet, outre les enveloppes budgétaires elles-mêmes, il faut prendre en considération la capacité donnée aux gestionnaires de les utiliser en répondant aux besoins du terrain.
S'agissant du cyber, j'ai indiqué tout à l'heure que nous avions fortement rehaussé les créations de postes. Dans le cadre de la LPM, nous avions décidé de porter le nombre de cybercombattants à 1 100. J'ai annoncé que nous relèverions cette cible à 1 900 à l'horizon 2025. Nous avons accéléré la mise en œuvre de cette ambition en prévoyant 376 créations de postes supplémentaires dès 2022, en sus de celles réalisées depuis le début de l'exécution de la LPM. À ces créations de postes sont associés des crédits d'investissement. Nous avons des projets d'infrastructures importants sur la plateforme cyber de Rennes, pour laquelle 200 millions d'euros d'investissement sont prévus.
Par ailleurs, nous affectons des moyens aux opérations cyber menées par les armées. Le budget destiné à l'instruction et à la mise en œuvre de ces opérations est porté à 26 millions d'euros. Les services de renseignement, qui mènent également des opérations cyber, bénéficieront d'une dotation de 30 millions d'euros pour ce faire. Nous prévoyons également des investissements au titre de l'innovation, qui s'élèveront à 34 millions d'euros en 2022, en plus des moyens affectés à l'infrastructure que j'ai mentionnés.
J'en viens aux fonds marins, qui deviennent sinon un nouvel espace de conflictualité, du moins le lieu de rapports de forces : ils abritent en effet des infrastructures vitales comme les câbles et les réseaux de distribution d'hydrocarbures, ainsi que des ressources naturelles très importantes et convoitées. D'ores et déjà, un certain nombre de nations n'hésitent pas à enfreindre les règles établies par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.
Nous sommes présents dans ce domaine, mais il nous faut faire plus. C'est la raison pour laquelle nous allons acquérir en 2022 des capacités exploratoires, ce qui représentera un investissement de 3 millions d'euros, afin d'opérer plus profondément dans les grands fonds marins. Cette démarche s'appuiera sur une stratégie ministérielle des fonds marins que j'ai demandé au ministère des armées d'élaborer et dont nous serons en mesure de faire part au cours de l'année 2022.
S'agissant du programme MAWS, nous sommes en train d'analyser les conséquences du choix allemand – que je regrette – sur nos propres capacités.
Si la lutte informationnelle a en effet toujours existé, l'actualité récente a montré que nos compétiteurs l'utilisent de plus en plus fréquemment. Nous avons donc formalisé il y a quelques années une doctrine de lutte informatique offensive (LIO) que nous allons compléter par une doctrine de lutte informatique d'influence que je présenterai très prochainement avec le chef d'état-major des armées ; elle vise notamment à soutenir la communication sur les opérations militaires et à lutter contre la propagande ou contre la manipulation de l'information. Nous nous appuierons pour ce faire sur les moyens dont nous disposons ou sur ceux qui sont d'ores et déjà affectés au cyber, notamment.
Le programme des missiles navals en coopération franco-britannique, indéniablement essentiel pour nos armées, est tout aussi indéniablement en difficulté compte tenu de l'état de nos relations avec le Royaume-Uni. Nous réfléchissons donc à ce qu'il est possible de faire ou non avec les Britanniques ; nous en tirerons évidemment toutes les conséquences.
Enfin, nous construisons des logements neufs au-delà de la cible initialement fixée dans le plan « famille ». Nous avons un programme permettant une gestion dynamique de nos logements domaniaux et la construction de 3 000 logements supplémentaires. Il s'agit d'un accord qui nous lie pour plusieurs décennies, mais, je l'ai dit, nous lancerons les opérations de construction dès l'année 2022 : il y a des urgences et nos militaires ne comprendraient pas que nous restions, si j'ose dire, l'arme au pied.