Intervention de Général Thierry Burkhard

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 15h10
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Thierry Burkhard, chef d'état-major des armées :

Cette tâche est assurée par le CPCO au niveau stratégique, mais sur les théâtres d'opérations, comme aux EAU, un centre d'opération est activé vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Nos états-majors opérationnels sont capables de réagir en permanence. Sans exclure une plus grande vigilance ou une approche plus stratégique, en termes de réactivité, cette fonction existe déjà. Au CPCO, un officier de quart « opérations » et un officier de quart « renseignement » sont présents dans une salle dédiée vingt-quatre heures sur vingt-quatre, entourés par une demi-douzaine de personnes. Les états-majors opérationnels d'armée sont présents en permanence. L'officier de quart verse un verre d'eau sur le feu, la haute autorité d'astreinte vient avec une bouteille s'il en est besoin, puis on monte au-dessus. Le système est résilient et efficace.

La guerre dans les champs immatériels ne concerne pas seulement le cyberespace. Nous devons d'abord développer nos capacités, car la structuration doit venir d'assez haut. Nous ne sommes pas complètement armés pour être réellement efficaces dans ce domaine. Cette action ne naît pas aux bas échelons. La guerre informationnelle nécessite des messages bien cadrés, bien orientés et délivrés dans les temps. Quand l'arme aérienne est arrivée, les gens ne savaient pas s'en servir. Ceux qui travaillent dans le domaine de la guerre informationnelle doivent présenter et proposer ce qu'ils sont capables de faire. À l'inverse, les officiers dans les états-majors doivent prendre conscience de ce qu'ils peuvent demander à la guerre informationnelle. Dans l'armée française, l'engagement direct est plus naturel que l'engagement indirect. Or la guerre informationnelle, c'est plutôt de l'engagement indirect. Il faut l'intégrer dès la formation initiale. Cela s'est traduit par exemple, à l'Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan, par une sensibilisation à la stratégie indirecte décrite par Sun Tzu, en plus de celle de Clausewitz. Cette formation théorique et intellectuelle est nécessaire pour sensibiliser à la stratégie indirecte.

« Gagner la guerre avant la guerre », c'est ce que nous voulons privilégier, car face à nos grands compétiteurs qui deviendraient nos ennemis, aller à l'affrontement représenterait un coût humain et matériel considérables. Si, contre des groupes armés terroristes, il n'y a guère d'autres moyens d'action que l'engagement direct, en revanche contre nos grands compétiteurs, nous devons privilégier la guerre avant la guerre, être capables de leur taper sur les doigts en cas de guerre « juste avant » la guerre. Si on en arrive à la guerre, on doit être prêts à le faire mais nous n'aurions pas atteint notre objectif.

Je ne peux vous dire ce que vont faire les Américains. Leur situation n'est pas simple. Des annonces ont fait état de leur retrait de l'Irak, comme le demandait le gouvernement irakien. Ils se posent la question, tiraillés entre la priorité absolue portée sur la zone indopacifique où se joue le leadership mondial et le fait de voir qu'en laissant la place, d'autres arrivent. Même pour eux, il y a tout de même un équilibre à conserver.

Quant à la France, le Président de la République a clairement indiqué à Bagdad que nous envisagions de rester, que les Américains restent ou pas, à condition que les Irakiens le demandent. Des élections vont avoir lieu. Il faudra observer le positionnement. Le nouveau gouvernement demandera-t-il le maintien d'une présence étrangère ? L'Irak est considéré comme le pays le plus à même de garantir l'équilibre entre l'Iran et les pays du Golfe. La France, puissance d'équilibre, essaie de promouvoir et d'aider un Irak plus solide et le plus stabilisé possible. C'est le sens de l'engagement du Président de la République en faveur d'un positionnement dans cette zone, l'Irak n'étant pas seule au sein d'un arc Irak-Jordanie-Égypte-Liban, qui sont aussi des puissances plutôt stabilisatrices.

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