La surprise passée, la poussière retombée, il apparaît que la voix de la France continue de compter, plus que jamais, dans la zone indo‑pacifique et au-delà, car elle dessine au fond une option alternative au récit par trop binaire d'une inévitable escalade sino-américaine. Elle trace une voie en matière de sécurité régionale, mais aussi de souveraineté des États riverains, avec une approche plus multilatérale de la recherche de la liberté de navigation.
Si elle doit être réexaminée à la lumière du revirement australien, cette stratégie demeure d'actualité, et pleine d'intérêt pour les pays de la zone. Le récent échange téléphonique entre le Président de la République, Emmanuel Macron, et le Premier ministre indien, Narendra Modi, en témoigne.
En outre, une vision stratégique européenne pour la zone est maintenant sur la table. À l'occasion de la présidence française l'an prochain, il nous faudra convaincre nos camarades européens de l'intérêt de s'impliquer dans cette zone, mais aussi les rallier encore davantage au concept d'autonomie stratégique, qui ne doit pas être vu comme une finalité en soi mais bien comme un moyen de dépasser la nouvelle bipolarité qui se dessine. Je relève d'ailleurs que le communiqué conjoint des présidents Macron et Biden souligne l'importance d'une défense européenne plus forte et plus capable, complémentaire de l'OTAN.
S'agissant précisément de l'Alliance atlantique, le revirement australien confirme le diagnostic du Président de la République sur l'insuffisance de la coordination politique. À l'initiative de la France, une importante réflexion est en cours, et doit aboutir au sommet de Madrid, en 2022.
Dans son discours sur l'état de l'Union, Ursula von der Leyen a annoncé une déclaration conjointe de l'UE et de l'OTAN d'ici à la fin de l'année. Pourriez-vous nous en dire davantage sur les propositions concrètes que vous formulerez concernant le rôle de la défense européenne dans le cadre de la PFUE et en prévision du sommet de Madrid ?
Enfin, je voudrais revenir sur la relation franco-britannique. Les traités de Lancaster House qui nous lient au Royaume-Uni permettent des projets structurants pour notre autonomie stratégique dans le nucléaire, les missiles ou encore la guerre des mines, auxquels nous sommes très attachés. Après le report du sommet franco-britannique prévu initialement les 22 et 23 septembre derniers, vers quoi se dirige, au fond, la relation avec nos amis britanniques, dans un contexte très difficile qui inclut les questions migratoires, de la pêche et de l'Irlande du Nord ?