Absolument.
Vous m'avez enfin interrogé, Monsieur Bridey, sur l'équation charges-capacités de la maison DGA. Je ne vous cache pas que la situation est tendue. Nous l'avons dit tout à l'heure, la dotation du programme 146 est passée de 10 milliards d'euros en 2017 à 14,5 milliards dans le PLF pour 2022, soit une hausse de 45 % en cinq ans. Cette augmentation budgétaire ne s'est pas accompagnée d'un accroissement de 45 % de mes effectifs, qui correspondrait à 4 500 personnes. En revanche, nous avons créé, de mémoire, 500 postes depuis 2017 et nous en créerons 950 à l'horizon 2023. L'un des leviers qui nous permet de résoudre cette équation charges-capacités est donc l'augmentation des ressources.
Nous avons aussi revu nos processus – j'ai cité tout à l'heure quelques exemples de gains d'efficacité qui se répercutent sur nos équipes. Nous nous appuyons également sur des établissements publics lorsque ceux-ci peuvent travailler pour nous en délégation de maîtrise d'ouvrage : nous fonctionnons de la sorte avec le Centre national d'études spatiales (CNES) dans le domaine spatial et avec le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans le domaine du nucléaire et de la propulsion navale. Nous pouvons également sous-traiter des activités à tel ou tel industriel si ce dernier est indépendant du maître d'œuvre avec qui nous contractualisons.
À chaque fois que je participe à une réunion interne, on me réclame des effectifs supplémentaires. Je réponds alors qu'il faut partager les effectifs accordés au titre de l'évolution de la trajectoire de la LPM. La DGA a pris de l'avance sur la trajectoire initiale en termes d'effectifs accordés, parce que les armées ont, de leur côté, pris du retard par rapport à la trajectoire globale, du fait de difficultés de recrutement. Nous devons conserver cette avance – nous y sommes parvenus en 2021 et 2022 – et actionner tous les leviers possibles pour faire face à l'augmentation de la charge de maîtrise d'ouvrage consécutive à la hausse des crédits des programmes 146 et 144.
Monsieur Vojetta, vous m'avez interrogé sur l'aviation de transport. Le dernier standard d'A400M, le SOC3, atteindra sa pleine capacité tactique en 2022. L'essentiel a déjà été fourni : ainsi, nous avons récemment qualifié le parachutage par les deux portes latérales et par la soute. Je ne sais plus ce qui nous manque, mais cela ne doit pas être significatif puisque l'armée de l'air et de l'espace, qui ne manque jamais de me signaler le moindre problème capacitaire, ne m'en a pas parlé. Je suppose que le général Mille, que vous avez auditionné, vous a dit qu'il était satisfait de l'A400M, tant en termes de performance que de disponibilité. Nous espérons rencontrer le même succès à l'exportation.
S'agissant des trois derniers MRTT attendus par les armées, ils seront livrés en 2023, mais au format A330. La conversion de ces avions en MRTT est prévue en 2026, c'est-à-dire après la période couverte par la LPM actuelle. Nous verrons s'il est possible d'accélérer cette opération lors du prochain ajustement de la programmation militaire.
Je sais que certaines études sont en cours sur un A200M mais, pour le moment, je ne connais rien de cet appareil. Là encore, il s'agit d'un bon sujet à traiter lors du prochain ajustement de la programmation militaire.
En matière de coopération avec les Espagnols, les avancées peinent à aboutir concrètement dans le domaine de la radio logicielle. Il s'agit de la nouvelle technologie de radio destinée à être embarquée dans les véhicules terrestres et les avions – en d'autres termes, c'est le système radio du futur. Cela fait référence, pour la DGA, au programme CONTACT, et pour Thales, à un produit que le groupe fabrique et veut exporter sous le nom de SYNAPS. Le programme ESSOR, que j'ai évoqué tout à l'heure, est la base technologique commune à toutes ces radios logicielles du futur. L'Espagne y participe, et j'ai signé avec mes homologues espagnols une lettre d'intention à ce sujet en 2020. Le président de la République française et le premier ministre espagnol ont eux-mêmes évoqué une coopération dans ce domaine dans le compte rendu du sommet franco-espagnol de Montauban en 2021. Malgré ce climat particulièrement propice à la coopération, les Espagnols, pour équiper certains de leurs véhicules terrestres, se sont récemment tournés vers Elbit et Telefónica, face aux propositions de Thales et Indra. En outre, il nous reste à conclure la coopération envisagée en matière de SYNAPS modulaire, c'est-à-dire porté sur le dos d'un fantassin ou, après adaptation, embarqué dans un véhicule. Mes homologues espagnols m'ont indiqué déjà posséder des radios Elbit, auxquelles leurs armées sont habituées, et que jusqu'à présent, les propositions de Thales-Indra ne leur avaient pas apporté entière satisfaction. Je leur ai donc proposé d'organiser une réunion, le 4 novembre à Madrid, afin que nous puissions recréer un climat favorable à cette coopération. La radio logicielle peut constituer un champ de coopération structurant pour nos armées et nos industriels, et qui a été béni au plus haut niveau des deux États.
Dans le cadre du FED, nous travaillons très bien avec les Espagnols. Un grand nombre de projets et d'actions préparatoires que j'ai cités tout à l'heure sont réalisés avec l'Espagne.
Une coopération franco-espagnole pourrait aussi être envisagée dans le domaine de l'espace, car nos partenaires s'intéressent à l'imagerie satellitaire CSO. Nous avons préparé un accord de coopération sur ce sujet, Mon objectif étant de confirmer l'engagement de la France et de l'Espagne sur le Tigre et la radiologicielle d'ici la fin de l'année, avant de signer un accord sur CSO. Tout cela doit faire l'objet d'un accord global, car c'est une véritable coopération stratégique qui se met en place entre nos deux pays. L'Espagne souhaite également travailler en étroite coopération avec nous et investir dans le domaine de la défense, mais nous attendons toujours son feu vert au sujet de l'Eurodrone.