Il est possible que je me sois mal exprimé car je n'ai pas proposé que nous restions une armée échantillonnaire. J'ai justement dit que face aux défis de la haute intensité nous devions sortir du modèle échantillonnaire, d'où les marches budgétaires supplémentaires que j'évoquais. Mais je devine que vous faites référence à l' Integrated Review de nos amis britanniques : est-ce que nous avons des capacités auxquelles nous devons renoncer ? Moi je pense, et c'est aussi la conclusion de notre rapport, que dans tous les cas, nous ne devons pas renoncer à des capacités. L'armée britannique a fait le choix de réduire largement le périmètre de son armée de Terre. Très bien, mais le respect que la France inspire dans le monde repose à la fois sur notre capacité de dissuasion – et donc, conjointement, sur notre statut de membre permanent au conseil de sécurité des Nations-Unies – mais aussi dans l'excellence de nos armées capables d'agir dans tous les secteurs. Il faut être très prudent sur l'idée de renoncer à une capacité sachant que la reconquérir et la retrouver est très difficile. Je prends l'exemple du minage-bréchage : un domaine que nous avons totalement abandonné mais qui fait aujourd'hui l'objet d'une remontée en puissance, lente, car il s'agit d'un élément nécessaire dans le cadre de la sécurisation d'un théâtre d'opération. Vous l'avez vu au travers de notre présentation, nous ne pouvons pas savoir le visage que prendrait le conflit de haute intensité dans la durée. Eu égard aux stocks qui sont limités, chez nous mais aussi chez nos adversaires, nous pourrions très bien connaître un épisode de haute intensité, puis une période trouble peu intense qui précèderait une remontée en puissance. Dans ce contexte, disposer d'une capacité technique même échantillonnaire est important et je suis d'avis qu'il ne faut renoncer à rien.
En réponse à votre question sur l'OTAN, évidemment que la coopération et l'interopérabilité sont indispensables. Cela suppose que nos partenaires de l'OTAN fassent aussi l'effort de défense nécessaire. La France le fait dans cette LPM et le fera davantage mais elle ne peut pas faire seule cet effort. Il est possible d'envisager confier certaines capacités à nos alliés de l'OTAN mais je suis très réservé sur cette idée. Le souvenir des Malouines est bien présent à l'esprit de la plupart de nos interlocuteurs. Le Royaume-Uni s'est trouvé seul pour reconquérir les Malouines. Je ne sais pas nous serons dans la même situation si les îles Éparses sont prises – le combat ne serait peut-être pas symétrique – mais nous pouvons nous retrouver seuls. Même si, chacun en est conscient, un conflit de haute intensité dans la durée sera nécessairement un conflit dans le cadre d'une coalition. C'est pourquoi l'initiative européenne d'intervention (IEI) est un outil intéressant pour mesurer les apports des uns et des autres au travers de différentes situations.