Je considère que de nombreuses actions ont été engagées, notamment en comparaison de la décennie précédente, jusqu'en 2010. Je crois que le Président de la République Nicolas Sarkozy a vraiment pris conscience de la situation en 2010, à l'issue de la crise. J'aurais dû évoquer cette crise que nous avons gérée assez remarquablement à court terme. Cependant, contrairement aux Allemands, nous n'avons pas mis le chômage partiel en place. Dès lors, les industries ont réduit leurs emplois et ont perdu des compétences.
À partir de 2010, des actions ont été initiées. Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) n'a pas eu d'effet sur l'emploi massif, mais il a amélioré la capacité d'investissement des entreprises. Dans les années qui ont suivi, nous avons constaté que l'investissement des entreprises se redressait parce que leurs marges avaient augmenté. Les entrepreneurs ne souhaitent pas s'engager s'ils ne sont pas capables de dégager une rentabilité suffisante pour justifier leurs investissements.
Le CICE s'est depuis transformé en allégement de charges. Les entreprises y ont toutefois perdu six milliards d'euros.
La diminution des impôts de production était nécessaire et cette démarche engagée était courageuse.
Le pacte de responsabilité a également représenté plusieurs milliards d'euros. Il a été utile puisque nous constatons que l'industrie n'a plus perdu d'emplois en 2017, 2018 et 2019, que de nouveaux sites industriels ont été créés et que l'investissement s'est maintenu.
Malgré ces initiatives positives, nous ne rattraperons pas notre retard avant dix ou vingt ans. Nos concurrents progressent rapidement. En Allemagne, des usines neuves sortent de terre sur tout le territoire. C'est impressionnant et légèrement déprimant pour un Français. Quant à la Chine, elle peut construire des usines en trois mois, expropriation comprise. Les autres avancent et il nous appartient de faire en sorte d'avancer plus rapidement qu'eux.
L'effort de recherche représente un point clé. Il s'élève actuellement à 2,2 % du PIB : il se répartit pour 1,4% à l'industrie et pour 0,8 % au public, où il était de 1,3 % en 1995, soit une diminution de dix milliards d'euros chaque année qui s'accumulent). Il convient de revenir à un effort d'environ 3 % du PIB, soit vingt milliards d'euros par an, à l'instar de l'Allemagne et des États-Unis. En Corée du Sud et en Israël (où la recherche est très liée à la défense), l'effort de recherche atteint 4,5 % du PIB.
Il convient également de poursuivre l'effort de diminution des charges et de mettre en place des systèmes qui évitent aux propriétaires de perdre le contrôle de leur entreprise, tout en augmentant leurs fonds propres. De nombreux industriels ne souhaitent pas augmenter leurs fonds propres, parce qu'ils craignent de perdre le contrôle de leur entreprise. Je souhaiterais que l'assurance-vie soit orientée vers le financement des investissements, mais les compagnies d'assurances sont réticentes et les épargnants préfèrent que leur argent soit placé en bons d'État français ou allemands. Il faut dans le même temps que les entreprises acceptent d'ouvrir leur capital.
Je ne crois pas que la transformation de l'ISF en IFI ait drastiquement modifié la donne. Il est possible que cela ait évité à certains de se délocaliser ou de délocaliser leur fortune, mais je ne suis pas sûr que cette démarche ait produit un impact direct sur l'investissement. J'avais suggéré de maintenir l'ISF et de le supprimer uniquement pour les placements à risque qui reposent sur des actions, comme les plans d'épargne en actions (PEA). En revanche, je ne m'oppose pas à la taxation de la rente assurance-vie en euros et de la rente immobilière. Par ailleurs, l'IFI taxe la rente immobilière, mais j'aurais souhaité que la rente financière soit également taxée afin de favoriser la prise de risque financière.