Intervention de Nathalie Coutinet

Réunion du jeudi 30 septembre 2021 à 16h00
Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le pib de la france et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament

Nathalie Coutinet, maîtresse de conférences à l'université Sorbonne Paris-Nord :

Les économistes travaillent beaucoup sur la question du bien commun. Dans la définition de la lauréate du Prix Nobel d'économie Elinor Ostrom, un bien commun est une ressource gérée par un ensemble d'ayants droit, aussi bien des producteurs et des consommateurs, qui participent à la gouvernance du commun. Je ne pense pas que le Président de la République Emmanuel Macron voulait dire cela. Il soulevait la question de l'accès aux traitements, qui relève de la règle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et des brevets. Il existe des exceptions aux brevets : les licences volontaires et les licences obligatoires. Ces dernières donnent le droit à un pays de demander l'autorisation de produire un vaccin ou un médicament si c'est une question de santé publique. Or, ni la France ni aucun pays européen n'ont demandé à l'OMC de déclencher ce mécanisme, alors que nous nous trouvions dans ce cadre. En outre, quand l'Afrique du Sud et l'Inde ont demandé à ce que le vaccin soit libre de droits, les pays développés ont voté contre.

Le médicament devrait être considéré comme un bien commun. L'accès aux traitements devrait être garanti, ce qui s'oppose à la question des brevets tels qu'ils sont pratiqués aujourd'hui. Il n'est évidemment pas question de ne pas rémunérer l'innovation et les dépenses de R&D, mais. les entreprises pharmaceutiques font aujourd'hui une utilisation excessive des brevets. L'organisation non gouvernementale (ONG) de droit suisse Drugs for neglected diseases initiative (DNDi), financée notamment via l'Agence française de développement (AFD), a créé des communs de recherche de production pharmaceutique, à l'origine de la découverte d'un médicament contre la malaria. Il est donc possible de produire des médicaments sans droits de propriété ou avec des droits de propriété variables : les pays n'achètent pas ces médicaments au même prix selon leur niveau de développement.

Jusque dans les années 1960, il n'existait pas de brevet sur les médicaments. En France, un brevet spécial du médicament a été instauré à la fin des années 1950. L'État se réservait le droit de le retirer à son détenteur dans le cas d'un usage excessif avec un prix trop élevé par exemple, ou d'un usage tel qu'il n'y avait pas suffisamment de traitements. Le médicament était donc conçu comme devant être traité de manière particulière pour la question des brevets.

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