Intervention de Philippe Vendrix

Réunion du jeudi 22 octobre 2020 à 10h30
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Philippe Vendrix, président de la Commission Vie étudiante de la Conférence des présidents d'université (CPU) :

Je ne suis pas certain de pouvoir répondre de façon détaillée à toutes vos questions. Néanmoins, s'agissant de l'emploi des étudiants, nous évoquons régulièrement avec le ministère la question de l'emploi des étudiants au sein des établissements d'enseignement supérieur. L'implication des étudiants se traduit par la volonté d'apporter leur aide en cas de crise. Pour autant, elle doit également s'inscrire dans la durée à travers un travail dans l'université, afin de modifier le paysage de l'enseignement supérieur. Je pense sincèrement que plus les étudiants seront impliqués dans le système de l'université, tout en étant rémunérés évidemment, plus ils comprendront les ressorts de l'administration universitaire, le fonctionnement des bibliothèques ou les contraintes du service sportif. Ils découvriront l'envers du décor et comprendront que l'université constitue une machine extrêmement complexe, dans laquelle il s'avère nécessaire de coordonner un grand nombre d'éléments pour produire cette connaissance et accompagner les ambitions des étudiants.

Toutes les universités ont décidé de maintenir, pendant le confinement, la rétribution des étudiants qui étaient employés par l'université. Nous n'avons pas, en effet, interrompu les contrats signés entre les étudiants et les universités. Pour autant, nous ne pouvons pas intégrer tous les étudiants dans les universités. Il convient, par conséquent, de travailler sur un équilibre entre le nombre d'heures qu'un étudiant peut consacrer à un travail rémunéré et le nombre d'heures consacrées à ses études. Ce travail est mené, conjointement avec le ministère, depuis quelques semaines.

Nous devons, en outre, trouver des solutions pour que l'étudiant soit davantage acteur de sa formation. Il peut, par exemple, découvrir, dans un service audiovisuel, le montage d'un cours en ligne. Il est certain qu'écouter un professeur, qui parle pendant une heure dans le cadre d'un monologue, doit être suivi d'échanges. Ceux-ci peuvent donc se réaliser dans le cadre d'un emploi étudiant.

Nous ne pouvons pas nous priver de la culture et du sport. Pour autant, il est certain que les universités ne disposent pas toutes des mêmes outils. Certaines villes disposent, en effet, d'infrastructures de qualité et d'autres non. Toutes les villes universitaires ne disposent pas non plus de théâtre national. Pour autant, en travaillant avec des associations sportives ou culturelles des universités, nous constatons bien les dynamiques existantes entre la ville et les étudiants. Néanmoins, la difficulté tient aussi à l'éloignement des lieux culturels et sportifs, par rapport aux implantations des sites universitaires. Lorsqu'un jeune étudie dans une grande ville, il peut facilement satisfaire ses besoins culturels ou sportifs, ce qui n'est pas le cas d'une université qui se situe à cinquante kilomètres d'une métropole, comme les instituts de formation en soins infirmiers, par exemple. Nous devons donc construire une forme de pensée de l'université de demain, en lien avec les métiers. L'enseignement universitaire ne doit pas constituer un monolithe subi après l'obtention de son baccalauréat. L'occasion nous est donnée de réfléchir à la manière de penser la place de l'étudiant et notre exercice d'enseignant au sein de l'université.

À un moment, la question de l'apprentissage a suscité des interrogations. Je ne vous cache pas que son prolongement jusqu'au niveau Bac+5, et non plus Bac+3, a été un soulagement pour les universités. Nous sentons aujourd'hui que la dynamique n'a pas faibli. Je ne dispose pas de toutes les données chiffrées pour l'ensemble des universités, mais je sais qu'au sein de l'université Val de Loire, le nombre d'apprentis est plus élevé que l'an dernier. Il s'agit donc là d'une voie d'avenir, notamment parce que l'université irrigue tout le territoire environnant. Les stages s'inscrivent dans la même dynamique, mais sont néanmoins soumis aux aléas des restrictions sanitaires.

Par ailleurs, il est certain que les pratiques sportives ont diminué dans les universités, car l'offre a été réduite, après avoir consulté les différentes fédérations sportives, en lien avec le ministère des sports, pour savoir ce qu'il était possible de faire. Pour autant, de nouveaux outils sont utilisés pour le sport et la culture. Des opérations culturelles participatives ont ainsi été mises en place, notamment avec la création d'expositions virtuelles. La créativité, de toute façon, ne s'arrête pas avec l'épidémie et elle permet d'être en pleine conscience dans le temps présent – ce qui d'ailleurs contribue à libérer cette créativité.

Comment les services de santé peuvent-ils concrètement venir en aide à des étudiants en détresse psychologique ? Un travail doit évidemment être mené en relation avec des psychologues et des psychiatres. Ceux-ci créent d'ailleurs des réseaux pour qu'un étudiant qui en exprime le besoin consulte un spécialiste disponible. Nous répondons plutôt bien aux urgences psychologiques lorsque nous en avons connaissance. Pour autant, nous devons améliorer la détection de cette détresse. Si un étudiant n'a pas eu le temps de se créer un réseau d'amitiés, comment pouvons-nous savoir qu'il s'est enfermé chez lui ? Toutes les initiatives sont positives. Certains services sportifs diffusent ainsi des techniques de bien-être et des services culturels mettent en place des séances d'improvisation pour libérer la parole. Nous devons mener un travail intense avec tous les acteurs du réseau associatif. L'université peut parfois donner l'impression de se trouver derrière des murailles infranchissables, celles du savoir. Il n'en est rien. Il existe bien un lien entre l'université et les associations qui font vivre le campus. Nous le constatons d'ailleurs bien à travers les épiceries solidaires qui se sont mises en place avant la crise et qui prennent de plus en plus d'ampleur. Les moyens de la CVEC sont également destinés à favoriser le travail de ces associations.

L'aide pour sortir de la précarité ne signifie pas uniquement d'aider les étudiants de première année. Nous devons, en effet, aider également les étudiants de thèse qui ont, eux, une relation singulière avec la connaissance. Ils doivent, en effet, faire la démonstration qu'ils sont innovants et originaux. Quelle que soit leur discipline, certains ont été dans l'impossibilité de se rendre au laboratoire pour réaliser une expérience ou à la bibliothèque pour emprunter un livre. Des enquêtes ont été menées au sein des établissements pour identifier ces étudiants. Nous devons donc les aider à passer ce cap et nous ne devons pas les laisser s'enfermer dans la précarité alors qu'ils terminent leur thèse de doctorat et qu'ils s'apprêtent à se lancer dans l'univers de la connaissance professionnelle académique, ou non.

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