Intervention de Anne-Lucie Wack

Réunion du jeudi 22 octobre 2020 à 11h45
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Anne-Lucie Wack, présidente de la Conférence des grandes écoles :

La crise a accéléré trois tendances de fond observées depuis un certain temps dans les grandes écoles. La première est la question de l'engagement des étudiants, qui a déjà été évoquée par mes deux collègues. Depuis 2016, un sondage Ipsos-BCG-BCE est diffusé dans les grandes écoles, et met en exergue l'appétence des jeunes pour l'entrepreneuriat social et solidaire, les valeurs environnementales et la prise de conscience sociétale.

Pendant la crise sanitaire, alors que les étudiants se trouvaient parfois dans une situation difficile et étaient isolés, ils ont cherché à s'investir et à se mobiliser auprès d'entreprises et d'hôpitaux, mais également des personnes âgées. Ainsi, de nombreuses initiatives citoyennes ont prospéré pendant le confinement, mais elles répondaient à une tendance de fond préexistante.

Un bilan de l'ensemble des initiatives des étudiants a été réalisé lors d'un colloque organisé à l'École polytechnique en 2019. Il montre que ces initiatives sont très nombreuses, et qu'elles portent non seulement sur l'environnement, mais également sur la solidarité citoyenne et l'entrepreneuriat social.

La deuxième tendance de fond qui a été accélérée par la crise sanitaire, aussi bien chez les étudiants que chez les enseignants et le personnel des établissements, est la prise en compte des transitions dans le cœur de mission des écoles, dans les enseignements et la recherche, mais également l'environnement de ceux-ci – la vie étudiante, les incubateurs, etc., sachant que 50 % des écoles d'ingénieurs et 80 % des écoles de management disposent aujourd'hui d'un incubateur. Le corps enseignant avait conscience de ces évolutions, mais de plus en plus de grandes écoles revendiquent maintenant d'être actrices des transitions.

Dans les établissements, des initiatives étaient autrefois engagées, mais elles étaient le plus souvent ponctuelles et n'étaient pas réellement structurées et intégrées dans l'acquisition des compétences. Le fait que les transitions soient placées au cœur de la formation et de la recherche est à mettre en regard des transformations des métiers et des nouvelles compétences dont les entreprises ont besoin aujourd'hui pour se réinventer dans un contexte de relance. Nous constatons que les grandes écoles prennent un virage, et que leur dynamique évolue. Il s'agit là d'un des effets positifs de la crise sanitaire.

La troisième tendance de fond est que les étudiants s'impliquent non seulement dans le cadre d'initiatives de la vie étudiante, mais également dans l'évolution de leur établissement. S'ils sont déjà présents dans les instances de gouvernance (le BNEI et le BNEM ont déjà été cités), il s'agit d'un tournant plus profond, et l'année scolaire 2018-2019 a été charnière en la matière. Les étudiants écrivent maintenant des lettres ouvertes à leurs directions, s'expriment dans la presse, et remettent en question leurs établissements et leurs employeurs. Ils annoncent qu'ils ne travailleront pas pour des entreprises qui ne correspondent pas à leurs valeurs. Nous discutons régulièrement du sujet avec des entreprises qui ne parviennent plus à conserver leurs employés pour des questions de valeurs.

Ce phénomène est apparu il y a quelques années, mais prend de l'ampleur aujourd'hui. Nous nous interrogeons collectivement sur la manière dont nous devons le prendre en compte. Le rapport de forces a évolué, et les étudiants sont plus à même d'interroger leur établissement, et plus largement la société et les entreprises. En ce sens, le sondage Ipsos-BCG-BCE évoqué ci-dessus ne mesure pas simplement l'appétence des étudiants par rapport à certaines valeurs, mais également leur perception des entreprises. Ils se sont beaucoup exprimés sur le management et la responsabilité socialité.

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