Intervention de Omar Didi

Réunion du jeudi 5 novembre 2020 à 10h15
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Omar Didi :

Pour répondre aux questions de Madame la rapporteure, nous n'avons pas eu accès au plan d'urgence gouvernemental. La plupart des structures LGBT ne disposent en effet pas de permanents, ce qui doit être mis en lien avec le manque de financement général de ces associations – qui conduit à une moindre professionnalisation de ces dernières. De ce fait, l'impact quantitatif et qualitatif de ces dernières est réduit. Une commission parlementaire pourrait ainsi être mise sur pied, afin d'étudier les différents moyens matériels, humains et financiers dont disposent les associations et effectuer des recommandations.

De notre côté, nous allons recruter des salariés avant le premier semestre 2021, grâce notamment à une augmentation de notre budget, du fait d'une augmentation de nos subventions publiques et privées. Comme le Refuge, nous ne sommes pas dépendants des dons, mais des financements publics et privés, ainsi que du grand bal des fiertés, événement caritatif organisé par l'association dans les salons de l'Hôtel de Ville.

Nous avons en outre demandé la création d'un plan d'urgence spécifique aux personnes LGBT, ce qui a nécessité beaucoup de temps. En effet, ce plan d'urgence, avec par exemple la mise à disposition de nuitées d'hôtel pour les jeunes LGBT, a été mis en place presque à la fin du confinement, malgré des propositions parlementaires qui demandaient le financement de cette disposition dès le projet de loi de finances. Quoi qu'il en soit, nous avons demandé un plan spécifique, pour prendre en charge les particularités des personnes LGBT et des jeunes LGBT. Nous avons estimé que le premier plan était relativement fermé, car il ne permettait qu'aux structures LGBT d'avoir accès à ces nuitées. Le conventionnement demeurait en effet impossible avec des associations généralistes, notamment des associations mettant en plan un travail d'exfiltration et d'hébergement d'urgence à l'échelle départementale. Les signalements restaient de plus difficiles à réaliser et nous avons besoin d'une ligne d'urgence nationale, permettant dans un second temps d'essaimer vers le niveau local. Or une telle ligne n'existe toujours pas. Le dernier plan national lancé par la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH) l'a cependant recommandé pour la période 2020-2023 et une ligne d'écoute reste nécessaire, non seulement pour les jeunes LGBT, mais aussi pour toute personne LGBT qui en aurait besoin.

Il faudrait aussi intégrer les jeunes LGBT dans le dispositif Arrêtons les violences. Nous sommes revenus sur ce sujet lundi dernier auprès d'Elisabeth Moreno, pour que cette plateforme soit élargie et qu'elle prenne en compte les jeunes LGBT, ainsi que les personnes LGBT victimes de violences conjugales.

Le premier plan d'urgence avait évoqué la possibilité pour les jeunes LGBT de se rendre dans les pharmacies et d'être exfiltrés par ce biais. Nous demandions si une communication spécifique avait été prévue pour les pharmaciens dans ce cadre, mais n'avons pas obtenu de réponse sur ce point. Cette possibilité de gagner les pharmacies est-elle maintenue dans le cadre du présent confinement ?

Les associations LGBT devaient par ailleurs avancer la trésorerie relative aux nuitées, ce qui se révèle très délicat pour nombre d'entre elles. En effet, peu d'associations disposent d'une trésorerie suffisante permettant d'avancer les fonds. De plus, un jeune qui a vécu des violences intrafamiliales a besoin d'être suivi, accompagné et de bénéficier d'un accompagnement social sur la durée, qui va au-delà de la simple question de l'hébergement d'urgence.

J'insisterai encore sur l'enjeu du maillage territorial, afin de faire en sorte que les associations spécialisées perdurent, mais aussi que des dispositifs départementaux soient mis en place avec les services déconcentrés de l'État, ce qui permettrait un maillage territorial et de disposer du nombre de jeunes LGBT qui seraient victimes de violences intrafamiliales.

S'agissant du nouveau plan piloté par le ministère délégué et la DILCRAH, nous sommes plutôt satisfaits de la première réunion qui s'est tenue en présence d'Elisabeth Moreno. Nous constatons une réelle consultation des associations LGBT et un réel travail, en lien avec les associations, ce qui n'était pas le cas lors du premier confinement. La consultation est réelle à présent. Nous sommes plutôt satisfaits du dispositif actuel, malgré son caractère d'urgence. Nous disposons de l'oreille attentive du ministère et pouvons à présent débloquer plus rapidement des situations très complexes de jeunes LGBT, ce dont nous sommes très satisfaits.

En ce qui concerne l'ASE, les dispositifs relatifs aux jeunes mineurs pourraient prendre en compte les jeunes LGBT. Pendant très longtemps, dans notre société, le fait d'être LGBTphobe a été considéré comme un comportement normal, comme une opinion, et non comme un délit. La loi a évolué, de même que notre société. Dès lors qu'un jeune est confronté à une forme de LGBTphobie dans la cellule familiale, à 15 ans, 16 ans, voire plus jeune, et à des violences, un travail très important peut être mené au sein de l'école et de l'ASE. La société civile manque cependant de connaissances concernant la possibilité de signalements auprès des CRIP. Ces dernières manquent d'ailleurs eux-mêmes de connaissances concernant les LGBTphobies. Si les agents étaient davantage formés, les signalements pourraient sans doute augmenter. Ce travail ne doit pas être restreint à l'ASE, mais doit également être effectué au sein de l'Éducation nationale et des différents établissements scolaires, pour faire en sorte que les violences s'arrêtent au sein des familles pour les mineurs. À l'âge de 18 ans, un jeune entre dans un cadre où il n'aura plus accès à des aides de l'État pour pouvoir être hébergé d'urgence. Or lorsque le jeune est mineur, l'hébergement et le soutien sont plus simples à proposer.

Pour revenir sur l'exemple du jeune Lyonnais que j'évoquais, il était suivi par l'ASE, qui a rencontré beaucoup de difficultés sur ce dossier, notamment du fait d'un manque de formation.

En ce qui concerne la prostitution des jeunes mineurs, nous ne disposons pas de remontées au sein des usagers de notre association. Ces données peuvent être confirmées en lien avec l'association Acceptess-T, qui vient en aide aux travailleurs du sexe.

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