Intervention de Jean-Benoît Dujol

Réunion du jeudi 5 novembre 2020 à 14h00
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Jean-Benoît Dujol, directeur de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative et délégué interministériel à la jeunesse :

Les chiffres que vous citez sont provisoires, mais ce sont bien ces ordres de grandeur. Environ 70 000 enfants ont été concernés. S'agit-il d'un succès, ou d'un demi-succès par rapport à l'objectif qui nous était assigné initialement ? Pour répondre à cette question, je dispose d'un autre indicateur. Les 50 millions d'euros votés dans le cadre du programme 163 pour les « colos apprenantes » et les accueils de loisirs ont été intégralement dépensés, même si cela s'est avéré plus délicat pour d'autres programmes.

Il est certain que moins d'enfants issus des QPV que nous n'espérions y ont participé. Il s'agit d'un point d'amélioration. Le budget était conçu de la manière suivante. Il comprenait 100 millions d'euros pour les « colos apprenantes », dont 80 millions d'euros sur le programme 147, et 20 millions d'euros sur le programme 163. L'idée était en effet que 80 % des jeunes bénéficiant de ce dispositif soient issus des QPV. De fait, tel n'a pas été le cas, mais les 70 000 jeunes étaient quand même issus de publics prioritaires, avec un quotient familial relativement faible, ou des familles nombreuses.

C'est la raison pour laquelle le programme 163 a largement financé ces colos apprenantes. Je vous laisse juge de la qualité de ce travail. Plusieurs points expliquent néanmoins pourquoi il n'a pas aussi bien fonctionné que nous le souhaitions. Tout d'abord, nous avons commencé tard. Les crédits ont été votés à la fin du mois de juillet. Nous avons donc dû anticiper le vote de ces crédits pour lancer le dispositif. Cela signifie que son temps de conception et de préparation pendant le confinement était très proche des vacances. Le temps nous a donc manqué.

Par ailleurs, de nombreuses collectivités locales étaient encore engagées dans le renouvellement de leur conseil municipal. Or le guichet pour bénéficier des vacances apprenantes était la collectivité locale. Il s'agissait du reste peut-être d'une erreur de conception. L'idée était que nous allouions des fonds à ces collectivités, pour qu'elles financent le départ en vacances des enfants. Tout reposait sur elles, et beaucoup n'étaient pas prêtes au mois de juin.

Enfin, et c'est un point important, nous nous intéressons aux familles les plus en difficulté, les plus éloignées des vacances. Si vous interrogez des associations telles que le Secours populaire ou le Secours catholique, que nous avons du reste réunis pendant le confinement pour préparer le dispositif, elles vous diront que les départs en vacances ne s'improvisent pas dans les semaines qui précèdent l'été. L'accompagnement des personnes vivant dans la précarité, notamment par des travailleurs sociaux, peut nécessiter plusieurs mois pour les convaincre de l'utilité d'un départ en vacances.

Nous nous sommes ainsi retrouvés à devoir monter ce dispositif, qui nous paraissait nécessaire, dans des délais très contraints pour les familles et pour les collectivités, y compris d'un point de vue administratif pour bénéficier des financements. L'un des indices qui viennent confirmer cette analyse est le grand succès de ce dispositif pour les vacances de la Toussaint.

Celles-ci ne sont pas censées être particulièrement propices aux colonies de vacances, il s'agit plutôt d'une saison creuse par rapport au printemps et à l'été. Néanmoins, le dispositif a alors bien fonctionné, parce que chacun était prêt. Beaucoup de projets n'avaient pas pu se monter cet été, parce que les partenariats n'avaient pas pu se nouer dans des conditions satisfaisantes. Néanmoins, chacun était prêt à la Toussaint pour les mettre en place.

Cela prouve que nous avons surtout manqué de temps, et non d'énergie ou de compétence. Le projet est bon. J'expliquais tout à l'heure pourquoi je pensais qu'il était une solution utile en termes de prise en charge et d'éducation des enfants. Si nous avons suffisamment de visibilité pour monter les partenariats et construire le dispositif, il fonctionnera de manière satisfaisante.

Nous devons également le simplifier, en particulier au regard de ses financements multiples. Il est en effet financé en partie par le programme 163 et le programme 147, mais aussi par le programme 304, qui concerne les enfants bénéficiaires de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Tout cela a suscité beaucoup de complexité. Le dispositif a du reste très bien fonctionné pour ce dernier public. Les conseils départementaux ont vite compris l'intérêt qu'ils pouvaient en tirer, et beaucoup se sont appuyés sur les vacances apprenantes pour faire partir des enfants de l'ASE. Aussi, avec plus de temps, et si nous parvenons à simplifier le dispositif, je pense que ce programme rencontrera un grand succès en 2021.

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