Intervention de Sébastien Lyon

Réunion du jeudi 5 novembre 2020 à 15h15
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Sébastien Lyon, directeur d'Unicef France :

Notre part de fardeau s'accroît clairement. Ces enjeux sont encore plus importants que par le passé. Je pense notamment à celui de la vaccination. Nous n'avons pas pu mener dans des dizaines de pays des campagnes de routine de vaccination, pour des maladies qui sont faciles à éviter, ou à tout le moins que nous savons bien traiter ou pour lesquelles les vaccins sont efficaces. Je pense à la rougeole, par exemple. Des dizaines de pays d'Afrique subsaharienne, d'Afrique de l'Est et d'Asie nous indiquent n'avoir pu mener ces campagnes de routine parce que le confinement les a privés des moyens et du personnel nécessaires.

Nous travaillons à relancer ces campagnes. De même, nous faisons en sorte d'être prêts, si un vaccin fiable contre le Covid-19 était découvert. Nous devons être préparés à aider tous les États, et en particulier les plus pauvres, à administrer ce vaccin.

Des dizaines de milliers de morts d'enfants évitables ont lieu chaque mois. Il s'agit pour nous de la plus grande priorité. Dans beaucoup des bureaux de terrains dans lesquels nous travaillons, nous constatons une réaffectation des investissements consacrés à des projets de long terme vers des projets urgents. Il s'agit d'une tendance de fond. La part des projets de développement par rapport aux programmes de gestion de l'urgence est en train de s'amenuiser. Je mentionnais tout à l'heure que cette crise a un impact financier très significatif. Elle nous oblige ainsi à redimensionner des programmes orientés sur du long terme vers des enjeux de court terme.

Tous les acteurs d'urgence ont été pris par surprise. Nous n'étions pas tous bien préparés à répondre à une urgence de cette ampleur sur le sol français. Un peu de temps a été nécessaire pour que nous nous mettions en place. Pour l'Unicef en particulier se pose une problématique de mandat en France. Nous sommes les représentants d'une organisation des Nations unies, et nous ne sommes donc pas une organisation non gouvernementale (ONG). À ce titre, nous ne pouvons pas intervenir sans un mandat clair.

Grâce à des échanges avec différents services, tels que la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL) par exemple, nous avons cependant pu intervenir. Je mentionnais le programme que nous avons mis en place avec Action contre la faim. Il s'agissait d'une première pour nous sur le sol français. Nous n'avions jamais mené un tel programme, qui visait à distribuer des kits d'hygiène, comme nous le faisons quotidiennement en Afrique subsaharienne. Nous avons procédé à ces distributions en banlieue parisienne, ou encore à Marseille.

Ce programme nous a permis de toucher à peu près cinq mille cinq cents bénéficiaires, dont mille deux cents enfants. Soixante-seize actions de distribution et de sensibilisation aux gestes barrières ont été mises en place, pour des publics très éloignés de l'information. Nous avons réalisé quinze diagnostics des conditions d'accès à l'eau, à l'hygiène et à l'assainissement sur différents squats et bidonville. Ils ont donné lieu à des alertes auprès des autorités compétentes.

Je pense donc que nous avons mené des actions intéressantes pendant cette crise, mais pas de manière suffisamment rapide et massive. Il s'agit d'un point sur lequel nous aurons à cœur de travailler dans les prochains mois. Nous devons mieux nous préparer à des urgences futures, pour être prêts à nous déployer très rapidement. Je pense que c'est cela qui nous a manqué pendant cette crise.

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