Intervention de Marie-Caroline Missir

Réunion du jeudi 19 novembre 2020 à 15h00
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Marie-Caroline Missir, directrice générale du réseau Canopé :

Effectivement, n'y a-t-il pas un risque de déperdition de la relation humaine ? Cela est très compliqué. Les enseignants et les parents se sont rendu compte que le « tout distanciel » n'est absolument pas souhaitable sur le long terme. En revanche, il faut s'y confronter, s'y préparer et l'intégrer dans le quotidien pédagogique. Le cœur du métier est bien de pouvoir croiser son regard, de recueillir les sentiments d'un enfant, de repérer les élèves en difficulté. Bien sûr, le risque existe. Mais l'outil reste un outil et il n'est pas en mesure de concurrencer l'enseignant sur le terrain si vaste et si riche de l'humain. En revanche, il me semble que cette irruption du distanciel a, pour les enseignants qui étaient déjà acculturés à l'outil numérique, enrichi les pratiques pédagogiques. Le distanciel les a obligés à se déplacer sur de nouvelles pratiques : par exemple, il n'est aucunement besoin d'avoir recours aux outils numériques pour organiser la classe inversée. Mais le contexte a amené les enseignants à repenser leur pédagogie et à investir de nouvelles façons d'enseigner pour garder le lien avec les élèves. Cela a permis de confier au distanciel ce qui relève de la communication avec les parents et avec les élèves, en amont et en aval de la classe. Le face-à-face pédagogique, en revanche, a pu être reconstitué de la façon la plus complète possible par « Ma classe à la maison » ou les ENT. Nous avons encore beaucoup de progrès à faire, certainement ; mais cela constituait déjà une chance pour nous, Français, de disposer de ces outils nationaux immédiatement à disposition.

Les enseignants ont également noté que le distanciel a permis à des élèves souvent timides ou en retrait de trouver un nouvel espace d'interaction avec l'enseignant. Souvent, ces élèves ont paradoxalement davantage participé via ces modalités d'enseignement à distance qu'en présentiel.

Enfin, le danger réside dans le fait de tirer des conclusions pérennes d'une période de crise. Aucun de nous ne souhaite que la crise se reproduise dans les mêmes conditions. Les chercheurs et les acteurs du système éducatif – c'est pourquoi les États généraux du numérique ont eu lieu – s'interrogent sur ce que nous pouvons retenir, consolider, pérenniser de cette période. Nous disposons d'enseignants – ils constituent une richesse extraordinaire de notre pays – qu'il faut accompagner et sécuriser au regard des enjeux qui pèsent sur eux et de l'importance de l'éducation numérique et de l'éducation tout court. Je mets ces éléments en perspective avec le Grenelle portant sur la revalorisation des enseignants qui débute actuellement. Tout cela est très lié. Nous parlons de la même chose : il s'agit de remettre l'enseignant en condition d'exercer ses missions le mieux possible.

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