Intervention de Jean-Michel Blanquer

Réunion du mardi 8 septembre 2020 à 18h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports :

Merci beaucoup à toutes et tous pour ces questions qui couvrent un large spectre.

Madame Charrière, il existe, en effet, des problèmes liés à la crise sanitaire, à commencer par le retour des élèves en classe. Encore une fois, la situation globale est très positive, tant au regard de ce que nous pouvions craindre que de la situation chez nos voisins. J'invite chacun à étudier les comparaisons de près. Il ne m'appartient pas de lancer des appréciations sur chaque pays, mais je vous invite à vous forger une opinion, non en vous référant aux articles de presse, mais à ce qui se passe sur le terrain dans chaque pays européen. Je pense que vous serez contents de voir les résultats dans notre pays ! Il ne s'agit pas d'une question d'appréciation du ministre, mais de sa satisfaction à l'égard d'un service public.

S'agissant de la Seine-Saint-Denis, le chiffre que vous avez cité a circulé, en effet, et il est très loin d'être fiable. Il a été livré le soir de la rentrée au cours d'une réunion à laquelle assistaient des parlementaires et visait à donner un ordre d'idée du comptage du premier jour. Toute personne qui, comme moi, s'est livrée à cet exercice au cours de ses fonctions antérieures, sait que de tels chiffres, établis le premier jour, revêtent peu de sens dans la mesure où les retours ne prennent pas en compte l'ensemble des données. On sait que des élèves font leur rentrée en décalé les jours suivants.

Les médias se sont accrochés à ce chiffre mais il n'a, en réalité, que très peu de sens. Il a d'ailleurs déjà diminué. Nous disposerons d'une appréciation fiable de la réalité vers le mois d'octobre. Les premiers comptages en Seine‑Saint‑Denis donnent un sentiment de retour à l'école un peu moins bon qu'à l'habitude, mais ils ne présentent pas non plus un grand écart. Je communiquerai les chiffres lorsqu'ils se seront stabilisés et, surtout, je tiens à dire que nous serons très attentifs à tout ce qui est fait pour ramener les enfants à l'école, ce que nous avons déjà fait au mois de juin. Un travail est réalisé par l'éducation nationale, mais aussi par les élus et les administrations sociales pour déterminer ce qu'il en est. Je rappelle que l'école est une obligation, c'est un devoir de la part des familles que d'envoyer les enfants à l'école ; nous ferons valoir cette obligation chaque fois que nécessaire. Nous agissons donc pour le retour à l'école et le premier bilan est positif, y compris en Seine‑Saint‑Denis, même s'il reste imparfait.

En matière de lutte contre le décrochage, vous connaissez bien l'ensemble des dispositifs, que vous avez vous-mêmes élaborés. Il s'agit tout d'abord de dispositifs de repérage. Dès le mois de septembre, nous portons un regard sur les élèves de plus de seize ans et de moins de dix-huit ans qui ont, en quelque sorte, disparu des radars, pour contacter et faire des propositions variées à ces élèves qui ont décroché. J'ai cité les lycées professionnels, mais il existe un panel d'institutions sur lesquelles nous pouvons compter.

En ce début d'année, s'ajoutent des mesures spécifiques. Je rappelle la création de 100 000 postes de service civique pour l'année 2000-2021, portant de 140 000 à 240 000 le nombre de services civiques. Je souligne également la création de formations pré‑bac et post‑bac. Notons, par exemple, en lycée professionnel, le développement, comme je l'ai vu ce matin à Clermont‑Ferrand, de mentions complémentaires, autrement dit le niveau bac +1, souvent très pertinent pour amener un élève du bac pro à une certification insérante. Cette question de la lutte contre le décrochage sera centrale tout au long de l'année et fidèle au texte de la loi pour une école de la confiance et à ce que vous avez vous‑mêmes préconisé dans votre rapport.

Madame Le Grip, merci de vos remerciements aux personnels de l'éducation nationale sur l'école inclusive. Grâce à vous, ils sont transmis en direct en vidéo par l'Assemblée nationale. Vous avez mentionné des retards dans l'embauche des AESH, ce qui peut arriver. Comparée aux autres rentrées, la situation est plutôt bonne. Comme vous l'avez souligné, c'est en Île‑de‑France que l'on peut noter ce genre de difficultés. L'année dernière, le phénomène était lié aux tensions sur le marché de l'emploi ; la difficulté était grande alors de recruter sur des postes d'AESH. C'est moins vrai en cette rentrée pour de bonnes et de mauvaises raisons, la mauvaise étant évidemment la situation de l'emploi, la bonne étant que nous sommes en mesure de proposer de véritables carrières aux AESH, et donc d'être plus attractifs. Je ne dis pas que tout est parfait en ce domaine, mais nous assistons à des progrès importants, y compris en matière de recrutements.

S'agissant des évolutions liées à la prise en compte des conséquences du protocole sanitaire, vous avez relevé, à juste titre, les files d'attente devant les installations sanitaires et les écoles. Ces deux sujets sont évidemment différents. S'agissant du premier, la France, comme d'ailleurs de très nombreux pays, connaît un retard en matière de locaux sanitaires dans les établissements scolaires. Le phénomène est quasi mondial ; en tout cas, en France, ce sujet fait partie des points que je soulignais avant la crise sanitaire, rappelant la nécessité de remédier à cette carence, dont la responsabilité ressortit à la compétence des collectivités locales.

Que ce soit au titre des installations ou des réflexes à acquérir par chacun, des retards étaient à compenser. La crise permet de les rattraper. De premières mesures ont été prises par les collectivités locales dont certaines ont réalisé des travaux pendant l'été pour multiplier les points d'eau. Cela dit, vous avez malheureusement raison, cela n'a pas été le cas partout, d'où des attentes/encombrements devant les lavabos. Parfois, les équipes éducatives s'organisent pour que les cohortes soient espacées, mais se laver les mains avant de passer à la cantine, par exemple, induit des embouteillages.

Nous pouvons ajouter que, dans le plan de relance – je réponds par anticipation à l'une des questions de Mme Faucillon –, plus de 4 milliards d'euros sont inscrits en faveur du bâti public ; une partie de ces moyens sera consacrée aux rénovations scolaires. Sont inclus les enjeux sanitaires. Le bâti scolaire du ministère de l'éducation nationale va suivre cette évolution. Tous les progrès ne sont pas réalisables en quelques mois, mais la direction est prise et elle est positive. Je crois que tout le monde a pris conscience, notamment les collectivités locales, de l'importance de progresser en ce domaine.

La situation des queues devant les écoles diffère d'une école à l'autre. Elles sont, pour une part, liées aux emplois du temps. C'est la raison pour laquelle, dans bien des cas, les horaires ont été étalés et les chefs d'établissement ou les directeurs d'école ont pris en compte le problème afin de remédier aux premières difficultés constatées à la rentrée. Le phénomène reste minoritaire ; il n'en demeure pas moins que l'objectif est d'y remédier au cas par cas, en fonction des circonstances locales, très variables selon la taille du trottoir et, comme indiqué à l'instant, selon les emplois du temps.

C'est l'occasion pour moi de souligner que nous avons accentué l'idée, conformément à des remarques, propositions et critiques émises aux mois de mai et juin, d'appliquer au plan national des principes assez simples en laissant la liberté aux acteurs locaux d'agir. Sur le premier point, on nous enjoint souvent de laisser plus de liberté aux acteurs et quand on insiste trop sur le second, on nous demande de fixer des principes nationaux, ce que j'ai entendu aussi bien hier qu'aujourd'hui. Nous sommes à un point d'équilibre qui permet une adaptation aux réalités locales, à la fois par des références claires – je pense aux recommandations qui figurent sur le site internet – mais aussi tout simplement en faisant confiance au bon sens des acteurs.

Madame Maud Petit, je me souviens du cartable et de son poids ! Cela renvoie non seulement à l'utilisation du numérique, mais aussi à l'utilisation des casiers à l'école. En tout cas, vous avez raison, cela suppose une réflexion sur les supports réclamés aux enfants. Je livrerai plusieurs éléments de réponse à cette question très importante. J'en profite pour rappeler que nous organisons des états généraux du numérique éducatif, là aussi largement ouverts à la participation parlementaire, début novembre à Poitiers que j'ai parfois qualifié de capitale de l'éducation puisqu'elle abrite le CNED, le réseau Canopé et notre école des cadres, l'Institut des hautes études de l'éducation et de la formation, ainsi que d'autres institutions dynamiques sur ce territoire.

Les états généraux du numérique éducatif, qui font suite à des états généraux académiques, feront un retour d'expérience sur ce qui s'est passé sur le plan du numérique pendant le confinement et le déconfinement et les conséquences que nous en tirons. Plus globalement, ce sera l'occasion d'une nouvelle étape de notre stratégie numérique, chère au président de votre commission qui, avec d'autres parlementaires, a proposé des évolutions en la matière.

Nous assisterons probablement dans les temps qui viennent à une accentuation des tendances déjà prises. L'on est parfois sévère sur la situation numérique de la France, voire trop dans la mesure où des éléments ont progressé ces dernières années, y compris sous les quinquennats précédents.

Je pense également aux initiatives des collectivités locales, à l'instar de ce qui se passe dans la collectivité Grand Est qui donne accès aux manuels numériques. Dans le même temps, j'ai toujours mis en garde contre une vision magique du numérique car nous devons être attentifs aux difficultés qu'il peut susciter et qui, d'ailleurs, se sont révélées pendant le confinement. Je pense au problème des données personnelles en fonction des types d'outils utilisés et des grands opérateurs concernés ainsi qu'à celui de l'addiction aux écrans. De nombreuses familles témoignent du fait que le confinement s'est traduit par une addiction supplémentaire ; nous-mêmes, pour de bonnes raisons, y avons incité. Il convient donc de rester très attentif à cette question. Pour ma part, dans le cadre des grandes évolutions du système éducatif, je suis assez favorable à des solutions mixtes qui, bien entendu, retiennent la puissance offerte par les modernisations numériques mais qui ne remplacent pas la dimension papier. Le cartable s'en trouvera allégé, mais pas aboli. Pèsera‑t‑il six kilos dans le futur ? Les phrases étant sécables à loisir, je signale qu'il s'agit d'une plaisanterie ! Je précise donc que je ne suis pas pour le cartable à six kilos, je ne faisais que référence à la demi‑charge des douze kilos évoqués par Mme Petit.

Cette précision étant faite, oui, nous devons évidemment tendre à alléger le poids du cartable, mais c'est plus facile à dire qu'à faire car cela ne passe pas uniquement par le numérique, mais aussi par l'évolution des pratiques, y compris celle des enfants qui, parfois, mettent dans leur cartable plus que le nécessaire. Une éducation de tous à des pratiques raisonnables est utile et des mesures s'imposent, y compris pour que l'essentiel des supports dont l'enfant a besoin reste à l'école, évitant ainsi le transport entre l'école et la maison. Le dispositif Devoirs faits y contribue, car si l'élève fait ses devoirs à l'école, nul besoin de tout rapporter à la maison !

Le moratoire des fermetures de classes a eu lieu ; j'en rappelle les grands principes, assez inédits. L'an dernier, le Président de la République a pris un engagement de non‑fermeture d'écoles, sauf accord du maire car, parfois, la fermeture est indispensable. La non‑fermeture nécessite donc un accord local. Pendant le confinement, le Président de la République s'est également engagé à ne pas fermer de classes, ce qui a été une décision difficile à prendre.

Je tiens à redire à quel point la fermeture d'écoles et la fermeture de classes sont deux sujets différents. Si l'on décidait de ne jamais plus fermer de classes, on prendrait une décision totalement inégalitaire puisque, par définition, les fermetures sont fonction du mouvement démographique ; l'on arriverait à des disparités de taux d'encadrement étonnantes. En revanche, à titre conjoncturel, cette mesure a été prise pour les écoles de village. C'est ainsi qu'il a été garanti qu'aucune classe ne serait fermée dans les communes de moins 5 000 habitants sans l'accord du maire. J'invite quiconque informé d'une exception à ce principe à me la signaler. Par ailleurs, pour les communes de plus de 5 000 habitants, nous avons pris l'engagement d'une amélioration du taux d'encadrement, commune par commune, et non pas seulement département par département, comme je l'avais fait à toutes les rentrées précédentes du quinquennat. Là aussi, chacun peut faire des constats de rentrée ; éventuellement il est encore temps de m'opposer tel ou tel exemple. C'est vous dire la profondeur de l'engagement et son caractère inédit.

Donc, oui, ce moratoire a eu lieu et oui il permet – pas toujours, mais dans la très grande majorité des cas – d'accueillir moins d'élèves par classe. Je m'en entretenais encore hier avec le recteur de l'académie de Paris. Il citait des classes de dix-huit à vingt élèves à l'école primaire à Paris, qui permettent de mener cette politique d'amélioration continue du taux d'encadrement à l'école primaire, politique appelée à perdurer, parce qu'elle permet aussi une forme de rattrapage. Nous avons insuffisamment investi dans l'école primaire en France au cours des décennies précédentes. Pour les classes des enfants les plus jeunes, il y a des vertus à tendre vers des taux d'encadrement très favorables. Je rappelle que nous sommes aussi sur la voie d'accomplir l'engagement de ne pas dépasser vingt‑quatre élèves par classe sur toute de France en grande section, en CP et en CE1. C'est vrai désormais pour la grande majorité des classes de ces niveaux, même si nous devons encore progresser.

Pour le contrôle continu, Maud Petit a cité le cas de la Martinique l'an dernier. Les grèves ajoutées à l'épidémie ont fortement nui à la scolarité des élèves. J'en ai été le premier marri, mais cela n'invalide pas la question du contrôle continu, puisque, en l'occurrence, il n'aurait pas été possible d'organiser le contrôle terminal au mois de juin. Cela dit, le problème que vous soulevez n'est pas le contrôle continu, ce sont les événements qui ont conduit « au manque d'école » au cours de l'année dernière à la Martinique. Bien sûr, nous ferons tout en 2020-2021 pour qu'une telle situation ne se reproduise pas.

Madame Tolmont, vous avez noté de nombreux cas de fermetures. J'ai rappelé que vingt-huit établissements sur plus de 60 000 en France représentent une faible proportion et que nous en connaîtrons certainement davantage dans les temps à venir. Il faudra donc l'assumer, mais je ne pense pas qu'il faille en faire un argument polémique, même si quelques centaines de fermetures devaient intervenir car c'est là le corollaire normal de la politique menée. La vraie question serait de savoir ce qu'il faudrait faire d'autre. Que proposez‑vous pour qu'il n'en soit pas ainsi ? Je rappelle que chaque fermeture est suscitée par une mesure de prudence. Nous ne fermons pas des foyers d'infection, nous fermons des établissements afin d'éviter qu'ils ne soient contaminés davantage par un tout petit nombre.

Vous préconisez la gratuité du masque pour tous les enfants. Rappelons quelques données sur le sujet. Les masques sont fournis aux personnels de l'éducation nationale et renouvelés tout au long de l'année, ainsi que nous nous étions engagés.

La politique sociale du masque pour les élèves soulève plusieurs aspects, notamment les envois de masse aux familles les plus défavorisées. C'est ainsi que sept millions de familles ont reçu des masques par la Poste, ces familles étant identifiées comme les plus défavorisées. Il s'agit là d'une vraie politique sociale, elle donne à ceux qui n'ont pas les moyens. Si vous avez des enfants, il est normal que vous leur fournissiez un masque et que le collectif assume le prix du masque des enfants les plus défavorisés. C'est un sujet de philosophie politique appliquée à l'action sociale. En effet, doit-on donner tout à tout le monde ou doit‑on se concentrer sur ceux qui ont le plus besoin ? Tout le monde c'est nous, l'État c'est nous aussi. Pour finir, cela revient parfois à faire payer les masques des plus favorisés par les plus défavorisés.

À mon propos s'ajoute le fait que des jeux de masques sont distribués dans toutes les écoles et établissements. J'ai affirmé à l'ensemble des acteurs du système scolaire qu'aucun élève ne serait empêché d'entrer à l'école ou serait obligé d'en sortir parce qu'il n'aurait pas de masque. Aussi un masque sera-t-il fourni à tout enfant en cas de besoin.

Vous avez fait référence à des déclarations dans d'autres pays. Sur ce sujet comme sur d'autres, je vous invite à vous reporter, au-delà des déclarations, à la réalité sur le terrain.

Vous dites que l'école serait l'oubliée du plan de relance. C'est tout le contraire ! D'ailleurs, le Président de la République a affirmé de manière très claire cet après-midi que les enfants et les jeunes sont placés au cœur du plan de relance, selon diverses modalités, d'abord et avant tout au travers de l'éducation.

Le plan de relance ne s'exprime pas par département ministériel, et c'est heureux, mais par grandes questions transversales qui touchent tous les ministères. Le bâtiment en est l'exemple type. La relance du bâtiment, notamment la rénovation écologique des bâtiments publics et privés, aura pour conséquence majeure de conforter les collectivités locales dans leur projet de rénovation des bâtiments scolaires. J'y ai fait allusion tout à l'heure au titre des rénovations sanitaires. Je profite de l'occasion que vous me donnez pour dire que c'est l'occasion pour toutes les collectivités locales de France en charge des écoles, des collèges et des lycées d'élaborer des projets de rénovation écologique techniquement prêts au 1er janvier pour être éligibles au plan de relance.

Je pourrais également citer le numérique qui fait l'objet d'un très grand chapitre du plan de relance. La modernisation numérique du ministère de l'éducation nationale pourra bénéficier de crédits non négligeables avec des effets en chaîne, par exemple les enjeux de réindustrialisation. Les commandes numériques du ministère de l'éducation nationale pourraient profiter au développement d'entreprises numériques françaises. Je ferai mon maximum pour converger en ce sens et m'associer à d'autres acteurs.

Suite aux déclarations du Président de la République, ma troisième illustration fait l'actualité de ce jour. Les internats d'excellence font l'objet d'un chapitre spécifique du plan de relance. Ce matin, a été pris l'engagement de la création d'un d'internat d'excellence par département en France, une mesure profondément sociale pour offrir des opportunités à des enfants de tous milieux sociaux, notamment défavorisés.

Vous avez évoqué l'absence de moyens en faveur du rattrapage scolaire. Je rappelle les 1 680 créations de postes dans le premier degré, 1 600 000 heures dans le second degré et les moyens que nous inscrirons au budget de 2021. On ne peut donc en aucun cas dire que des moyens supplémentaires n'ont pas été prévus. Je passe sur l'ensemble des mesures sociales prises pour tenir compte des situations familiales de tous ordres. Ce que nous faisons au titre des cités éducatives ou du service civique a un impact sur le rattrapage scolaire. Rappelons que de nombreux jeunes en service civique suivent des actions de soutien scolaire. La mobilisation des moyens publics et de l'action publique au service du rattrapage scolaire est donc très forte. Nous serons au rendez-vous.

Vous avez déclaré que les effectifs devaient être réduits dans le premier degré. C'est le cas ; c'est moins vrai dans le second degré, je vous l'accorde.

Vous avez utilisé un qualificatif que je ne fais pas mien en disant que l'évaluation est anxiogène. Ce qui est anxiogène, c'est d'affirmer qu'elle le serait, elle ne l'est pas en soi. Grâce aux mesures prises depuis 2017, nous sommes capables de faire ce qu'aucun pays au monde, me semble-t-il, ne peut faire et qui est précieux. Lorsqu'un enfant entre en CE1 cette année, nous disposons de trois photographies extrêmement détaillées de son niveau en français et en mathématiques lors de son entrée au CP, en milieu de CP en février dernier et en septembre 2020. Ces trois photographies sont extrêmement utiles pour l'enseignant ou l'enseignante parce qu'elles entrent dans le détail de ce qui compose les compétences en français et en mathématiques de l'enfant et dont on peut déduire bien des informations.

Dans quelques semaines, je vous dresserai un portrait national. La France sera en mesure de définir l'impact du confinement sur les enfants de six-sept ans en distinguant leur situation entre février et septembre. Au moment où je vous parle, j'en ai une idée imprécise ; elle sera extrêmement fine d'ici à un mois. Je pense qu'aucun autre pays au monde ne pourra proposer un tel portrait. Si sur le plan collectif, il s'agit d'un outil très utile, il le sera plus encore sur le plan individuel. J'ai visité une école de REP avec le Premier ministre le jour de la rentrée, dans les environs de Châteauroux ; les professeurs et la directrice de l'école ont dit à quel point ces évaluations allaient leur être utiles. Elles ne consistent pas à noter les enfants ni non plus, en aucun cas, à sélectionner, elles participent à définir les rattrapages nécessaires et à aider à la communication avec les familles. Les évaluations permettent, en effet, de nouer un dialogue parents-professeurs fructueux et ce sont, par conséquent, les élèves les plus en difficulté qui seront les grands bénéficiaires de cette démarche.

Vous avez souligné l'importance du lycée professionnel ; le lycée professionnel étant ma deuxième priorité après l'école primaire, je suis en accord complet avec vous. Cette priorité est ce qui motive la réforme de l'enseignement professionnel, mais aussi les moyens accordés et les effets d'impulsion, par exemple au travers des campus d'excellence. On ne dira jamais assez que la valorisation du lycée professionnel est fondamentale, elle ne doit pas rester lettre morte. Elle nous renvoie aussi à des enjeux actuels puisque, en raison de la crise économique, les possibilités de stages pour les élèves s'amenuisent, ce qui reste un sujet d'inquiétude. C'est la raison pour laquelle nous menons un travail de mobilisation auquel tout le monde peut s'associer, y compris vous-mêmes sur votre territoire, afin que les élèves accèdent à des stages et puissent ainsi s'ouvrir à un avenir, ce qui n'est pas un sujet facile dans la période actuelle et auquel nous devons être sensibles.

Monsieur Paul Molac, vous avez fait référence aux masques transparents, une innovation très intéressante, tout particulièrement pour certains publics, au premier rang desquels les élèves en situation de handicap. C'est pourquoi nous avons lancé un travail en relation avec Sophie Cluzel, secrétaire d'État, chargée des personnes handicapées, pour les commander. Je rappelle que ces masques, fabriqués en France, ont été homologués très récemment. Ils peuvent être lavés une vingtaine de fois. Quoiqu'un peu coûteux, nous en avons déjà commandé 300 000, qui bénéficieront prioritairement aux élèves scolarisés dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) et, de façon générale, aux élèves et professeurs qui en ont besoin dans le contexte de la scolarisation des élèves en situation de handicap. Les futures commandes pourraient bénéficier aussi aux professeurs des écoles maternelles lorsque la phonologie notamment commande de voir le mouvement de la bouche.

J'en viens aux langues régionales, sujet dont je n'ignore pas à quel point il vous est cher, tout autant qu'à moi. La réforme du baccalauréat peut présenter une chance pour les langues régionales, notamment par la création d'enseignements de spécialités. C'est ce qui s'est produit puisque, à ce jour, un peu plus de 100 000 élèves suivent les enseignements de langues régionales dans le système scolaire. Le chiffre est en légère hausse, on ne peut pas dire que les langues régionales aient souffert des mesures prises. Cela étant, dans le cadre du comité de suivi du baccalauréat, je suis tout à fait ouvert à étudier plus spécifiquement telle ou telle situation parce que la configuration du baccalauréat pourrait favoriser les langues régionales dans un cas et pas dans l'autre ou pour des raisons locales ou particulières à une langue. Mais je le redis ici : notre politique est favorable à un enseignement piloté des langues régionales. Je rappelle que nous avons créé en 2017 l'agrégation des langues de France, qui constitue un pas non négligeable dans leur reconnaissance, à comparer à la création du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (CAPES) d'informatique, l'informatique étant, d'une certaine façon, un langage.

Par ailleurs, la politique d'encouragement à l'apprentissage des langues vivantes est faite également pour encourager les langues régionales dès l'école primaire. C'est un point sur lequel j'insiste.

Madame Descamps, merci de vos propos sur la qualité de la rentrée.

S'agissant du protocole lui-même, vous indiquez que certains parents le jugent insuffisant comparé à celui appliqué en entreprise. Je leur dirai ce que je vois de ma fenêtre. J'ai entendu des critiques dans les deux sens. En mai-juin, le protocole était considéré comme trop strict. Désormais, certains trouvent qu'il l'est insuffisamment. On ne pourra jamais satisfaire tout le monde, mais rappelons ce que nous avons entrepris et ce que nous continuons de faire, en lien évidemment avec le Conseil de la santé publique et le Conseil scientifique, avec précaution.

Je ne crois pas que les mesures sanitaires imposées à l'école ou au lycée soient particulièrement laxistes si on les compare à celles demandées au reste de la société. Les précautions sanitaires imposées à l'école, au collège et au lycée sont bien plus strictes que celles que les élèves connaissent dans leur vie quotidienne. Je suis parfois assez surpris de voir que pendant les vacances, il peut se passer à peu près tout et n'importe quoi dans la vie courante des enfants sans que cela émeuve grand monde alors que, dès qu'il s'agit de l'école où les mesures sont bien plus rigoureuses, on préconise de ne pas les mettre à l'école, jugeant que les mesures sont insuffisamment exigeantes. Certains vont même jusqu'à préconiser la fermeture de l'école. Chacun perçoit bien le double paradoxe de ce type d'argumentaire.

Nous avons atteint un niveau d'équilibre qui permet une vie la plus normale et la vigilance la plus grande possible. Cet équilibre fait l'objet d'une discussion continue, les autorités sanitaires étant évidemment en position de surplomb.

La question de la garde d'enfants a déjà été évoquée par le Premier ministre. Nous affinons actuellement les solutions que nous pourrions proposer dans les temps futurs. À ce sujet, je livrerai plusieurs éléments. Le premier est en référence à votre rapport flash que vous avez réalisé avec votre collègue François Cormier-Bouligeon : nous donnerons une suite au dispositif 2S2C en tenant compte des critiques et des propositions avancées et dont vous vous êtes fait l'écho dans votre rapport, en totale convergence avec ce que demandent les communes et collectivités locales. L'objectif vise à consacrer l'activité sport, santé, culture, civisme chaque fois qu'il y aura nécessité d'organiser de petits groupes en classe et de prendre en charge les enfants qui n'en feront pas partie.

Nous travaillons également aux possibilités de soutenir les collectivités et les établissements pour étendre les formules de garde ou d'étude après le temps scolaire, notamment lorsque des parents ne peuvent pas récupérer les enfants à l'école à 16 heures 30 ou à 17 heures mais vers 18 heures, voire 19 heures ; à cet égard, des annonces seront faites ces jours prochains. Nous présenterons des propositions très prochainement. Le Gouvernement s'exprimera également dans les prochains jours sur les enfants obligés de rester à la maison, sachant qu'à l'heure actuelle, en vertu de la législation qui s'applique aux enfants malades, l'un des deux parents est en charge de sa garde.

Monsieur Larive, vous avez fait référence à des exemples étrangers et au chiffre de 84 000 professeurs supplémentaires. Le terme de professeur est un peu abusif, je parlerai de personnels. Encore une fois, je me garderai de faire de l'ingérence en analysant les politiques de nos voisins. Si on décidait en France de recruter 84 000 professeurs, on ne trouverait pas 84 000 personnes susceptibles, du jour au lendemain, de devenir professeur. De tels chiffres sont tout simplement impossibles à tenir, indépendamment des aspects budgétaires.

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