LDE est le premier libraire scolaire avec 3 300 établissements auxquels nous fournissons des manuels imprimés et 1 300 établissements que nous approvisionnons en manuels et ressources numériques. Nous sommes également éditeurs de la plateforme innovante POPLAB qui permet aux enseignants de préparer, d'organiser et de partager leurs cours en les rendant appétents pour leurs élèves.
Nous intervenons parfois au travers de marchés publics comme dans les régions pionnières que sont le Grand Est, l'Île-de-France, l'Occitanie, la Nouvelle Aquitaine et le Centre-Val de Loire auxquelles nous fournissons parfois des manuels papier et, dans tous les cas, des ressources et des manuels numériques à destination de l'ensemble de leurs lycées.
Notre position à la fois sur le papier et le numérique nous permet d'être confrontés à pratiquement toutes les situations et pratiques existantes, et de nous éloigner de tout dogme, auquel nous avons développé une allergie tant il est de nature à se fourvoyer et à ralentir les projets.
Sur le numérique, notre analyse et la connaissance des écosystèmes, en particulier celui des manuels scolaires qui représentent entre 80 et 90 % des ressources numériques actuellement utilisées en établissement, se sont forgées depuis 2013. À ce jour, nous avons déployé près de 6,5 millions de licences, dont 2,5 millions dans les 1 300 établissements pour cette seule rentrée.
Contrairement aux deux collègues qui m'entourent, nous ne représentons personne, notamment pas les éditeurs de manuels scolaires avec lesquels nous travaillons néanmoins très étroitement au quotidien et partageons un certain nombre de positions, mais avec lesquels nous avons parfois des divergences de vues, ce qui est bien normal.
La raison d'être de LDE consiste à être aux côtés des acteurs de l'éducation pour faire avancer l'école en rendant les choses aussi simples que possible. Nous proposons l'exhaustivité des manuels scolaires et plus de trente autres éditeurs. De manière plus discrète, nous sommes engagés aux côtés d'associations d'étudiants dans le cadre de projets d'aide au développement à travers notre collaboration avec l'Unicef et la Banque mondiale ou dans des actions citoyennes comme la fourniture gratuite d'ordinateurs à des élèves non équipés en période de confinement.
À titre personnel, bien que n'étant pas enseignant, l'éducation est toute ma vie et mon travail au quotidien. Elle l'est également au sein de mon foyer puisque ma compagne était professeur des écoles et est désormais chercheuse en sciences de l'éducation. Il s'agit aussi d'une vraie passion. Je pense que les personnes n'ayant pas de lien avec l'éducation à titre privé sont très rares dans la filière.
S'agissant des contraintes, je ne reviendrai pas sur la question matérielle. Rien n'est possible si les élèves ne sont pas équipés. L'aspect budgétaire est le nerf de la guerre. Je citerai également la difficulté pour les industriels à accéder directement aux enseignants sans passer par des filtres ou des systèmes de catalogue, lesquels ne peuvent être que des usines à gaz constituant un frein dans la plupart des cas en masquant les actions réellement efficaces.
J'insisterai sur deux points. Tout d'abord, le manque de personnel dans les délégations académiques au numérique (DAN) est criant. Alors qu'il est constaté une volonté de co-gouvernance avec les collectivités, même lorsque celles-ci mettent des sommes considérables sur la table et équipent les élèves en numérique, les équipes des DAN sont nettement insuffisantes pour accompagner et former les enseignants même lorsque les questions budgétaires, d'infrastructures et de connexion Internet sont levées. Je constate quotidiennement que les personnels des DAN effectuent un nombre hallucinant d'heures non payées, ce qui fut particulièrement le cas durant la période de confinement, sans disposer des moyens d'effectuer réellement leur travail. Comment peut-on travailler à trois ou quatre à l'échelle d'une région sur le numérique éducatif ?
Deuxièmement, alors que le ministère et la DNE ont apporté beaucoup ces dernières années en matière de favorisation du bon usage du numérique dans l'éducation, je crois que certains partis pris freinent le développement du numérique et de la filière. Il est constaté une tentation pour les académies ou Canopé, qui sont tous deux exclusivement constitués d'enseignants, de produire des outils ou des ressources. Si je voulais transposer au milieu de l'artisanat, je dirais que l'on ne demande pas à un menuisier de construire son rabot, mais de savoir l'utiliser correctement. L'industriel sait bien mieux construire un rabot qu'un menuisier. En outre, travailler avec un rabot dont la planéité n'a pas été industriellement rectifiée est très pénible au quotidien. Il faut faire confiance aux industriels pour créer de bonnes ressources et de bons outils, et concentrer les efforts au niveau du ministère pour former les enseignants à les utiliser et leur ouvrir les pratiques innovantes, notamment numériques.
S'agissant du GAR, qui présente une forte valeur ajoutée dans la protection des données et fonctionne bien techniquement, l'orientation prise consiste à transformer le principe de précaution en un principe de restriction. Aujourd'hui, il est interdit à un industriel et, théoriquement, à un enseignant, d'intégrer à un outil des liens externes vers des sites qui présenteraient la possibilité d'ouvrir un compte ou de se connecter aux réseaux sociaux. En conséquence, il est impossible de fournir un lien vers les sites du journal Le Monde et de la BNF. Comment éduquer aux médias sans pouvoir y accéder ?
De plus, la collaboration entre enseignants n'est pas possible dans le cadre du GAR. Conformément au code de l'éducation, un enseignant ne peut collaborer avec des collègues d'autres établissements sans obtenir l'aval formel du chef d'établissement.
L'enseignant peut mettre en œuvre les deux pratiques précitées pourvu qu'il ne s'inscrive pas dans l'écosystème officiel, ce qui donne la faveur aux GAFAM et à tout autre système susceptible de ne pas être totalement compatible avec le RGPD, ce qui est regrettable.
Imposer trop de contraintes aux industriels français est la meilleure manière de les désavantager par rapport à leurs concurrents étrangers et d'hypothéquer une réelle souveraineté numérique nationale à terme. Nombre d'élèves estiment qu'en entrant dans l'école, ils entrent dans le XXème siècle, c'est-à-dire l'ère des dinosaures, et quittent l'ère numérique dans laquelle ils évoluent au quotidien, ce qui est de nature à désagréger la relation à l'école. Ce problème tend cependant à se régler. Il convient donc de ne pas transformer cette tendance et de ne pas produire le même effet sur les enseignants en les empêchant de mettre en œuvre à l'école toutes les bonnes pratiques qu'ils appliquent en dehors.