Intervention de Bertrand Sorre

Réunion du mardi 29 septembre 2020 à 17h25
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Sorre :

Monsieur le rapporteur, encore toutes mes félicitations pour cette très belle initiative parlementaire, ainsi que pour le travail de fond effectué sur un sujet important pour la garantie des droits des enfants. Nous savons tous que le développement du numérique peut apporter de nouvelles possibilités mais aussi son lot de risques. La « toile » ne doit pas être un espace de non-droit pour nos enfants. En tant que législateurs, nous avons la responsabilité de combler les vides juridiques. Tel est l'objet de cette proposition de loi « visant à encadrer l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne ». Elle offre un cadre juridique, jusque-là inexistant dans le droit français, aux enfants influenceurs. Ce texte pragmatique et de bon sens vise d'abord à protéger les intérêts de ces enfants. Je tiens également à souligner son caractère pionnier en matière de protection des droits de l'enfant sur internet, puisqu'aucun État au monde n'a encore légiféré sur ce phénomène d'ampleur mondiale. Je voudrais rappeler, enfin, qu'il n'a surtout pas vocation à autoriser le travail des mineurs, lequel demeurera strictement interdit.

Cette proposition de loi répond à des situations nouvelles. Nous constatons tous les jours, lorsque nous surfons sur les plateformes publiques ou sur les réseaux sociaux, la multiplication de vidéos mettant en scène de jeunes enfants. Face à la forte augmentation de ces contenus, qui peuvent procurer des revenus substantiels aux parents et aux plateformes, il était nécessaire d'apporter un cadre protecteur aux enfants des « youtubeurs ». En effet, un certain nombre de vidéos et de chaînes recueillent une audience considérable, pouvant atteindre plusieurs millions d'abonnés et totaliser des milliards de vues. Si les plateformes de partage de vidéos permettent souvent à nos jeunes de s'exprimer – elles sont des espaces de liberté dans lesquels ils peuvent donner libre cours à leur créativité – elles sont également devenues des sources de revenus pour les créateurs qui, pour certains, en ont fait leur revenu principal.

Un nombre croissant de parents exposent leurs enfants en train de jouer, de manger ou de cuisiner. Bien souvent, les vidéos montrent un moment de la vie quotidienne passé en famille, mais parfois, hélas, dans le but de divertir un large public au moyen de défis tels que le « cheese challenge », qui consiste à lancer des tranches de fromage au visage d'un jeune enfant, elles sont très dégradantes. Aux États-Unis, des situations ubuesques filmées et diffusées ont d'ailleurs permis d'identifier des cas de maltraitance infantile. Ces abus sont très inquiétants. La diffusion sur internet de ces actes soulève de nombreuses questions au regard de l'intérêt de l'enfant.

Les améliorations apportées par les sénateurs renforcent et précisent le cadre de cette future loi pionnière. Ce travail de coconstruction entre les parlementaires, d'une part, et avec les plateformes, d'autre part, permettra de protéger dorénavant les enfants dits « youtubeurs ». Je souhaite que cette proposition de loi, que nous avions adoptée, je le rappelle, à l'unanimité en commission et en séance en première lecture, recueille à nouveau un large consensus auprès des groupes de notre assemblée. Le groupe La République en marche la votera en l'état, avec beaucoup de conviction.

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