Indiscutablement, s'agissant du financement de la recherche, l'année 2020 sera à marquer d'une pierre blanche : en premier lieu, bien sûr, du fait de la loi de programmation pluriannuelle, qui sera adoptée avant la fin de l'année. Ce texte définit enfin une ambition forte pour notre pays, en déclinant des orientations stratégiques fondamentales pour l'avenir de la recherche et de l'innovation et, surtout, dessine une trajectoire financière qui se traduira, chacun le sait, par un accroissement des moyens consacrés à la recherche de 25 milliards d'euros en 2030. Cet effort est unique : jamais aucun gouvernement ne s'était si fortement engagé en faveur de la recherche scientifique dans notre pays depuis 1945.
Cet élan amplifie considérablement les revalorisations récentes des crédits inscrits en loi de finances. Vous me permettrez de rappeler que, dès 2017, la majorité a tout d'abord arrêté les réductions successives des années antérieures des financements consacrés à la recherche et relancé une courbe ascendante, parce qu'il y avait urgence à réagir face à une situation qui mettait notre pays en situation de décrochage par rapport aux autres grandes nations scientifiques, certaines d'entre elles ayant depuis longtemps largement dépassé l'objectif de 3 % du PIB. Chacun a entendu les cris d'alarme de l'ensemble de la communauté scientifique.
Le premier point à saluer est le respect par le projet de loi de finances pour 2021 de la trajectoire annoncée par la loi de programmation. Qui plus est, le plan de relance sera également mis à contribution de manière très importante, avec des effets immédiatement perceptibles. Il en est de même, à plus longue échéance, du quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4).
Le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » est central pour la mission. Les crédits qui y sont budgétés sont notamment destinés aux établissements publics de recherche ainsi qu'à l'Agence nationale de la recherche. Toutes les actions de ce programme bénéficient d'augmentations de crédits, que ce soit en AE ou en crédits de paiement (CP). C'est le cas des actions thématiques, qui réunissent les crédits coordonnés par les cinq grandes alliances – ANCRE pour l'énergie, ALLISTENE pour le numérique, ALLENVI pour l'environnement, AVIESAN pour les sciences de la vie et la santé et ATHENA pour les sciences sociales.
Les sciences humaines et sociales sont créditées de 412 millions d'euros dans l'action 19 ; l'action 17, qui regroupe les financements destinés à l'énergie, est dotée de 815 millions d'euros ; l'action 16 concernant les sciences et techniques de l'information reçoit un peu plus de 1 milliard d'euros ; les recherches dans le domaine de l'environnement sont regroupées au sein de l'action 18, dotée de 1,1 milliard d'euros ; enfin, les thématiques sciences de la vie et santé, au sein de l'action 15, reçoivent plus de 1,2 milliard d'euros.
Ce programme finance également les moyens généraux et d'appui à la recherche sous forme de subventions pour charges de service public aux grands établissements de recherche, et au CNRS en premier lieu, qui reçoit plus de 45 % de cette enveloppe de plus de 1 milliard d'euros. Les dépenses de pilotage et d'animation de la recherche par le MESRI sont également budgétées dans ce programme, tout comme les contrats État-régions, ou encore les dépenses de valorisation et de diffusion de la recherche. Les crédits des actions destinées à financer les grandes infrastructures de recherche sont également en progression et c'est aussi, et même surtout, le cas de l'action 2 qui rassemble les moyens de l'ANR.
Comme vous le savez, la loi de programmation entend donner une impulsion nouvelle au financement de la recherche par appels à projets, volonté qui doit nécessairement passer par des moyens renforcés pour l'ANR. Il a été largement indiqué, lors des débats de la loi de programmation, que l'ANR était loin de pouvoir supporter la comparaison avec les principales agences internationales, qui ont des ressources incomparablement supérieures et, consécutivement, des taux de succès bien meilleurs, tout en ayant la possibilité d'attribuer des préciputs – qui permettent le financement des structures d'hébergement – également bien plus élevés. Cette faiblesse a mis les équipes françaises de chercheurs dans une situation difficile, de très bons projets ayant été rejetés faute de financement.
C'est la raison pour laquelle la trajectoire de la loi de programmation prévoit que le budget d'intervention de l'ANR sera plus que doublé d'ici à 2027. S'agissant de la première année, l'augmentation des autorisations d'engagement figurant dans le PLF est de 20,7 %, ce qui est d'ores et déjà considérable. Comme je l'ai évoqué, s'y ajoutent les crédits de l'action 5 du programme 364 du plan de relance, qui prévoit 428 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 286 millions d'euros de crédits de paiement pour l'ANR.
En cumulant loi de finances et plan de relance, nous sommes par conséquent bien au‑delà de ce que la loi de programmation avait fixé comme première étape à la trajectoire – une augmentation de 149 millions d'euros en 2021. Avec l'apport du plan de relance, dès l'an prochain, c'est un budget d'intervention total de plus de 950 millions d'euros qui sera à disposition de l'ANR, ce qui permettra d'anticiper de deux ans la montée en puissance qui était planifiée. Grâce à cet effort supplémentaire, dès l'année prochaine, le taux de succès des appels à projets pourrait être porté à 23 % et celui des préciputs à 25 %, la cible initiale, à échéance de 2030, étant de 40 %. Je crois que tout le monde ne peut que s'en féliciter. J'ai voulu tirer profit du fait que l'ANR achevait l'exécution de son contrat d'objectifs et de performance cette année pour présenter quelques développements à ce sujet dans mon rapport, sur le bilan et sur les perspectives, que je vous invite à consulter, sans avoir le temps de m'y étendre ici.
S'agissant du programme 150, je laisserai la présentation des autres actions à Philippe Berta, pour me limiter à celle des seuls crédits destinés à la recherche universitaire et figurant à l'action 17. Le premier point qu'il me paraît intéressant de souligner est que cette action est la plus importante du programme : elle représente 29 % du total, soit près de 3,9 milliards d'euros. L'augmentation qui est proposée dans le PLF est conforme à la trajectoire décidée dans la loi de programmation.
Enfin, je m'arrêterai sur le programme 193, destiné au financement de la recherche spatiale. Comme pour l'ANR, le contrat d'objectifs et de performance du Centre national d'études spatiales (CNES) arrive à échéance en fin d'année. C'était pour moi l'occasion de faire un bilan de ses réalisations et de présenter les perspectives qui s'ouvrent avec le prochain contrat qui entrera en vigueur en janvier, dans un environnement devenu très concurrentiel sur le marché des lanceurs et dans une conjoncture difficile. La diminution des crédits s'explique de plusieurs manières. Tout d'abord, la France aura soldé à la fin de l'année 2020 la dette qu'elle avait à l'égard de l'ESA, l'Agence spatiale européenne, qui avait, ces dernières années, artificiellement gonflé les dépenses budgétées sur le programme. Des évolutions de périmètre sont par ailleurs introduites, à effet nul pour l'opérateur, mais se traduisant par une diminution faciale sur le programme 193. Même s'ils apparaissent en diminution, les crédits budgétés cette année respectent donc les besoins du CNES et ceux de l'ESA. Le périmètre de la mission évolue, dans la mesure où le programme 193 est passé, depuis le changement de gouvernement, sous l'autorité du ministre de l'économie, alors même que la direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI) continue d'en être l'opérateur.
Pour conclure, les crédits inscrits dans ce PLF, augmentés des montants que prévoient le plan de relance et le PIA 4, confirment la dynamique enclenchée en faveur de la recherche scientifique de notre pays. L'an I de la loi de programmation de la recherche est bien traduit dans les crédits alloués à la recherche et la trajectoire budgétaire est tenue.