Vous devez être identifié pour donner une opinion sur cet élement

Intervention de Paul-André Colombani

Réunion du mercredi 31 mars 2021 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul-André Colombani :

Une langue qui ne s'apprend pas à l'école, ne se voit pas et ne s'entend pas dans la vie quotidienne ne peut être totalement appropriée par ses locuteurs. L'invisibilisation des langues régionales leur fait perdre une part de légitimité, les reléguant souvent au statut de langues de second rang. Or toutes les langues se valent et méritent d'être sauvées, car elles portent en elles une part inestimable de la richesse de l'humanité.

La proposition de loi de mon collègue Paul Molac, discutée en deuxième lecture à l'initiative du groupe Libertés et territoires, entend fournir des outils permettant de répondre à ces deux nécessités que sont la transmission et la promotion des langues régionales, en proposant de nouveaux moyens d'action et en sécurisant le droit existant. Trop souvent, l'administration remet en cause des décisions de justice, la volonté des élus locaux, ou méprise les demandes des citoyens qui, dans leur très grande majorité, veulent que les langues régionales soient préservées et enseignées.

La proposition de loi vise donc à rehausser la protection, l'accessibilité et la visibilité des langues régionales dans trois domaines.

Le titre Ier vise à assurer la protection patrimoniale des langues régionales en reconnaissant leur appartenance au patrimoine immatériel de la France. Quant au titre III, consacré à la vie publique, il vise à sécuriser l'affichage des traductions en langue régionale sur les inscriptions et signalétiques publiques, ainsi que l'utilisation des signes diacritiques des langues régionales dans les actes d'état civil. Nous nous rappelons tous l'histoire de ce bébé breton prénommé Fañch, dont les parents ont dû aller jusqu'à la Cour de cassation pour avoir le droit de garder un tilde au-dessus de la lettre « n », ce qui est ubuesque. Nous nous félicitons que les articles de ces deux titres adoptés par l'Assemblée nationale aient été votés conformes par le Sénat, qui a su faire preuve d'une grande ouverture.

C'est au tour de notre assemblée et des députés de la majorité, désormais, de faire preuve d'une telle ouverture en votant conformes les articles relatifs à l'enseignement des langues régionales introduits par le Sénat. Il serait en effet incompréhensible qu'une proposition de loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion ne comporte aucune disposition relative à l'enseignement de ces langues.

Il est primordial de reconnaître dans la loi la possibilité de suivre un enseignement immersif en langue régionale au sein de l'école publique. Des expérimentations sont déjà menées depuis de longues années – c'est le cas en Corse, dans six écoles. La méthode immersive est la seule qui permette de former des locuteurs complets en langue régionale et en français. Le but est bien d'arriver à une égale maîtrise des deux langues, sachant que les élèves ayant bénéficié d'un enseignement immersif ont, selon toutes les études, de meilleurs résultats en français que les élèves issus de filières monolingues.

Par ailleurs, nous nous félicitons de l'annonce, la semaine dernière, de deux projets d'écoles associatives immersives en Corse ; ce serait une première, car l'enseignement de la langue corse ne passe pas, aujourd'hui, que par le public. Nous analysons ces projets comme une réponse aux manquements de l'État, en particulier de l'éducation nationale, en matière d'enseignement des langues régionales.

L'article 3 répond, au même titre que la reconnaissance de l'enseignement immersif, à la nécessité d'élargir l'offre d'enseignement. Il prévoit une extension de cette offre dans les établissements publics, selon un modèle proche de celui de la Corse qui serait appliqué au collège et au lycée.

Nous sentons un élan phénoménal autour de ce texte. Les treize présidents de région ont exprimé publiquement leur souhait d'un vote conforme. Le tissu associatif est mobilisé comme jamais, et les réseaux d'enseignement public, associatif et confessionnel attendent une reconnaissance digne de leur investissement dans l'éducation de nos enfants. Ils ont compris qu'une occasion historique se présentait à nous. Tâchons de nous montrer à la hauteur !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.