Intervention de Elsa Faucillon

Réunion du mercredi 12 janvier 2022 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElsa Faucillon :

Le phénomène n'est pas nouveau, mais le temps passé devant les écrans par les enfants de 10 à 14 ans aurait doublé pendant la crise sanitaire. Je fais mienne l'analyse de Mme Ressiguier sur la tension entre les dangers et les opportunités d'internet.

Selon une étude de l'IFOP, 82 % des enfants de 10 à 14 ans utilisent internet sans leurs parents – tous les parents ici présents peuvent en attester – ; les enfants seraient connectés dès l'âge de 7 ans pour jouer en ligne ou regarder des vidéos et seraient inscrits sur leur premier réseau social autour de 8 ans et demi ; à 12 ans, un tiers d'entre eux auraient été exposés à un contenu pornographique. Ces chiffres illustrent la réalité que nous connaissons chez nous ou autour de nous. Les dommages chez les enfants sont désormais identifiés : frein au développement cérébral, particulièrement chez les tout-petits, prise de poids, dégradation de la qualité du sommeil, entrave à la réussite scolaire. Ces maux peuvent être en partie atténués grâce au filtrage des contenus auxquels les enfants sont exposés mais nous devons aussi améliorer l'éducation et la prévention qui jouent un rôle primordial.

Les dispositifs de contrôle parental sont trop peu utilisés. Nous soutenons l'obligation imposée aux fabricants par l'article 1er d'en installer un ainsi que l'idée de ne pas rendre celui‑ci automatique car cela risquerait de porter atteinte à la neutralité d'internet. Comme pour tout autre logiciel de filtrage, l'utilisateur doit conserver la maîtrise totale, donc la possibilité d'activer ou non le contrôle parental.

Nous sommes également vigilants sur l'utilisation de certaines fonctionnalités qui peuvent être intrusives. Dans ses recommandations pour renforcer la protection des mineurs en ligne, publiées le 9 juin 2021, la CNIL rappelle que ces fonctionnalités tendent à transformer le contrôle parental en surveillance, au risque d'altérer la confiance entre les parents et les enfants, d'entraver l'émancipation du mineur ou pire encore de l'habituer à être sous contrôle constant, l'invitant par là même à reproduire certaines pratiques dignes d'un monde orwellien.

Nous regrettons que la proposition de loi soit muette sur les dangers des dispositifs de contrôle parental en matière de protection des données. Selon de nombreux chercheurs, la plupart d'entre eux partagent des informations personnelles avec des tiers et sont vulnérables aux attaques informatiques. Ils transmettent ainsi à des tiers inconnus les données des utilisateurs à des fins de marketing et de monétisation, nourrissant de ce fait le ciblage publicitaire des enfants. Je déplore que nous n'ayons pas réussi pendant la législature à avancer davantage sur ce dernier point. Au cours des dix dernières années, les dépenses de publicité digitale visant les enfants ont été multipliées par dix à l'échelle mondiale. Ce matraquage publicitaire aggrave les dégâts causés par une exposition trop importante aux écrans et par l'hyperconsommation. Une étude de 2019 a démontré que les enfants des milieux populaires, pour lesquels l'offre d'activités extérieures ou culturelles est plus limitée, sont soumis à une pression publicitaire plus forte que la moyenne. Or notre pays louvoie, incapable d'adopter des mesures efficaces pour lutter contre ce phénomène, contrairement à d'autres pays qui ont proscrit les publicités à destination des enfants de moins de 13 ans.

Nous défendrons des amendements sur ces divers points mais nous sommes favorables au texte.

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