Intervention de Agnès Thill

Réunion du lundi 17 janvier 2022 à 21h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Thill :

L'histoire étudie les constructions sociales, les politiques ou les interactions humaines, afin de permettre à tout un chacun de mieux s'inspirer du passé, des réussites comme des erreurs, pour construire l'avenir. Mais l'étude historique ne juge pas les faits. C'est aux descendants, héritiers successifs de ce passé, de tirer les leçons des événements qui composent notre récit commun. C'est aux hommes et aux femmes politiques qui les représentent de savoir prendre leurs responsabilités pour assumer cette histoire, même ses parts les plus sombres. Et lorsqu'on est un vieux pays d'un vieux continent qui a connu une histoire riche et diverse depuis tant de siècles, il faut savoir regarder son passé en face. C'est exactement ce qu'a fait avec courage le Président Jacques Chirac, le 16 juillet 1995, en reconnaissant la responsabilité de l'État français dans les atrocités qui avaient été commises au cours de la Seconde Guerre mondiale. Et c'est l'honneur de ce Président, l'honneur de la France, que d'avoir su reconnaître sans détours l'implication de certaines autorités françaises dans ces heures sombres.

À l'heure où certains voudraient refaire l'histoire et lancer dans le débat public des discussions qui n'ont plus lieu d'être, on ne peut que se féliciter que ce projet de loi, qui reprend des recommandations de la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations, nous soit soumis. Dans la mesure où, selon le rapport Mattéoli, une centaine de milliers d'œuvres ont été pillées en France durant la Seconde Guerre mondiale, les autorités françaises doivent faire preuve de la plus grande vigilance lorsque des achats sont effectués pour les collections publiques. Et, puisqu'on estime que seules 45 000 œuvres ont été rendues à leurs ayants droit, je voudrais savoir si un contrôle s'exerce aussi sur les ventes privées. L'art est de plus en plus perçu comme un investissement et son marché devient parfois opaque, tant et si bien que certaines œuvres ne quittent presque plus les coffres-forts ou les hangars portuaires surprotégés.

Dans ce contexte plein d'incertitudes, il faut saluer l'initiative commune de l'Institut national d'histoire de l'art et d'une université berlinoise de mettre en ligne des archives jusqu'ici protégées, afin de mieux connaître les réseaux des 150 principaux acteurs du marché de l'art parisien durant l'Occupation. Cette action permettra probablement de retrouver de très nombreuses œuvres et de nombreux ayants droit, qui ignorent encore toute une partie de leur histoire familiale. Comme il a pu le faire durant la dernière décennie avec les œuvres relevant du statut MNR, l'État adoptera-t-il une politique pour aller vers les ayants droit que ces archives permettront de retrouver ? La CIVS entend-elle travailler en collaboration avec ces historiens ?

Quoi qu'il en soit, je tiens à vous remercier, madame la ministre, madame la rapporteure, pour votre travail et votre engagement. Cet engagement continue, puisque je crois savoir que le Gouvernement a déposé un amendement prévoyant la restitution d'une œuvre supplémentaire. Le groupe UDI et Indépendants soutient votre initiative et se félicite que nous puissions avancer sur ce sujet avant la fin du quinquennat.

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