Intervention de Stéphanie Kerbarh

Réunion du lundi 17 janvier 2022 à 21h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphanie Kerbarh :

Notre groupe partage la volonté de restituer leurs biens culturels aux ayants droit de propriétaires victimes de persécutions antisémites. Il est impératif de poursuivre et d'amplifier notre politique publique de réparation des spoliations antisémites. Nous le savons, la spoliation a fait partie intégrante du régime nazi et de son projet génocidaire. Il s'agit donc d'apporter une forme de réparation à ses victimes et à leurs héritiers, alors même que ces œuvres d'art spoliées sont les vestiges d'un crime immense, les traces de l'une des plus grandes tragédies de l'humanité.

Il s'agit aussi de reconnaître la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs de France, dans la droite ligne du discours du Président Jacques Chirac de 1995 car, pour reprendre ses mots, « nous conservons à leur égard une dette imprescriptible ». Il est indéniable qu'une partie des spoliations est due à l'action du gouvernement de Vichy, qui a confisqué et vendu les biens des Juifs dans le cadre de la législation antisémite. Il est donc de la responsabilité de l'État d'assurer les travaux de recherche, de restituer les œuvres aux ayants droit et de les indemniser.

J'aimerais vous interroger, madame la ministre, à propos de la collection d'Armand Dorville. Ses héritiers ont assigné l'État devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de constater la nullité de la vente de 1942. Le Conseil d'État s'interroge sur le caractère prématuré de la remise de ces œuvres. Pouvez-vous nous éclairer sur cette question ?

Notre groupe insiste par ailleurs sur la nécessité d'accentuer l'effort de recherche de provenance : celle-ci, intervenue tardivement dans notre histoire, est encore trop lente. Les recherches doivent porter non seulement sur les œuvres « Musées nationaux récupération » mais également sur nos collections publiques. Le caractère inaliénable de ces dernières ne nous affranchit pas de toute réflexion éthique et nous oblige même à faire preuve d'exemplarité.

Cela implique de mieux former les jeunes diplômés et les professionnels à l'activité de chercheurs en provenance. La lutte contre la circulation illégitime des œuvres est en effet un enjeu culturel, éthique et diplomatique. Nous l'avons rappelé à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal. Qu'il s'agisse de captations patrimoniales ayant participé au système colonial, de biens spoliés durant les persécutions nazies ou encore d'objets déplacés lors de conflits, il est essentiel de répondre scientifiquement et juridiquement aux quêtes des propriétaires légitimes ou de leurs héritiers.

Pour la première fois, des œuvres seront restituées à des particuliers et non à un État. La recherche des ayants droit, parfois ardue, soulève la question des moyens que l'État peut lui consacrer et de la procédure retenue pour définir, de manière sécurisée, les successions. Pouvez-vous nous éclairer sur ces aspects, madame la ministre ? Nous devons tout faire pour faciliter cette quête et trouver des solutions justes pour chacun. Pour toutes ces raisons, le groupe Libertés et Territoires votera en faveur de ce texte inédit.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.