Intervention de Régis Juanico

Réunion du mercredi 2 février 2022 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRégis Juanico :

Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je regrette l'échec des discussions de la commission mixte paritaire. Il emporte une conséquence pratique : la proposition de loi ne pourra être définitivement adoptée par notre assemblée que dans l'ultime semaine de séance de la législature. C'est un peu une session de rattrapage, à seulement deux ans et demi des JOP de Paris 2024. Sacrée performance pour un texte examiné en procédure accélérée ! Adopté à la quasi-unanimité en première lecture par l'Assemblée nationale le 19 mars 2021, il n'a été inscrit à l'ordre du jour du Sénat qu'au début du mois de janvier 2022, à l'issue d'une course de lenteur incompréhensible. Nous avons perdu de précieux mois, sans compter que la publication de décrets sera nécessaire à l'application de plusieurs dispositions utiles du texte – je pense par exemple au blocage des sites illégaux par l'Autorité nationale des jeux, à la reconnaissance législative de la plateforme nationale de lutte contre la manipulation des compétitions sportives et à la possibilité pour les sociétés sportives de prendre la forme d'une société coopérative d'intérêt collectif.

Cet examen tardif, en pleine campagne présidentielle, a eu une autre conséquence fâcheuse : la majorité Les Républicains du Sénat a instrumentalisé, à des fins politiques, l'examen d'un texte visant à développer la pratique sportive ; elle en a fait une tribune sur la seule question du voile dans le sport, en introduisant l'article 1er quinquies C qui tend à interdire le port de signes religieux ostensibles lors des compétitions et événements sportifs. Cet article dénature le texte et en détourne complètement l'objet. Le sport doit rassembler, promouvoir les valeurs d'intégration, d'émancipation, de brassage social, de fraternité laïque et républicaine, non la haine, la division ou la stigmatisation. Cette opération est d'autant plus irresponsable qu'elle a un autre objectif, moins avouable : faire diversion pour occulter les importants reculs de cette même majorité sénatoriale sur les questions de parité et de limitation du cumul des mandats des dirigeants sportifs. Nous soutiendrons la suppression de l'article 1er quinquies C ainsi que celle d'autres articles improvisés comme celui relatif au droit à l'image collectif.

Cette nouvelle lecture doit permettre à notre commission de revenir à l'équilibre originel de la proposition de loi. Le nombre d'articles est passé de 29 à l'Assemblée nationale à 86 au Sénat, au risque d'une dilution et d'un brouillage total des objectifs de départ, noyés dans de nombreuses dispositions qui n'ont pas leur place dans une loi. Nous souhaitons conserver dans le texte définitif certaines avancées du Sénat qui ont enrichi le texte : l'extension des possibilités de prescription des APA ; le développement des activités physiques dans les établissements sociaux et médico-sociaux ; la définition dans la loi des maisons sport-santé, que Marie Tamarelle-Verhaeghe et moi avions préconisée dans le rapport sur l'évaluation des politiques de prévention en santé publique que nous avions remis en juillet 2021. Nous sommes également favorables à la possibilité d'allonger de trois à cinq ans, de façon encadrée, le premier contrat des jeunes sportifs professionnels, comme l'avait recommandé le rapport publié en décembre 2021 par la mission d'information sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives, que j'avais présidée et dont Cédric Roussel était le rapporteur.

Malgré les ambitions limitées de certaines dispositions, notre groupe a joué le jeu, dès le début, de l'enrichissement du texte, considérant que le sport ne devait pas être l'otage de joutes politiciennes. Nous avons fait adopter par exemple un article relatif au recensement des équipements sportifs dans les établissements scolaires, qui n'existait pas jusqu'à ce jour, la parité au sein du bureau du CNOSF et de celui du Comité paralympique et sportif français (CPSF), des amendements encadrant la création d'une société commerciale par les ligues professionnelles ou permettant à des clubs sportifs constitués en société coopérative d'intérêt collectif de bénéficier de subventions de l'Agence nationale du sport.

Au Sénat, à l'initiative de Jean-Jacques Lozach, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a également permis de nombreuses avancées : l'intégration du développement des activités physiques et sportives pour les salariés dans le champ de la négociation annuelle sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail ; l'inclusion, dans la déclaration de performance extrafinancière des grandes sociétés, des actions de promotion des activités physiques et sportives ; l'assouplissement et la simplification pour les personnes majeures du certificat de non-contre-indication à la pratique sportive ; l'extension aux marques d'homophobie du délit réprimant certains comportements lors des manifestations sportives, puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Sous réserve du maintien de ces dispositions et de l'adoption d'un certain nombre des amendements que nous avons déposés en commission ou déposerons en séance, nous voterons la proposition de loi, comme nous l'avons fait en première lecture.

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