Je comprends bien votre question, qui est polyforme et met en lien des thématiques de façon intéressante, mais qui appelle un commentaire.
Pourquoi vient-on en CRS ? D'abord, pour appartenir à une maison de tradition, qui possède des repères dans le temps, qui obéit à de nombreux codes, qui ne sont pas sans rappeler le monde militaire.
Ensuite, pour appartenir à une unité constituée, un mode de vie un peu particulier, par rapport aux autres directions de la police nationale – un policier CRS est en déplacement entre 180 et 200 jours par an.
Enfin, parce que les missions varient en permanence. Sur une année, une compagnie aura circulé sur toute la France, aura fait du maintien de l'ordre, de la sécurisation, de la lutte contre l'immigration clandestine, du service d'ordre sympathique, comme pour les quatre compagnies qui sont actuellement au festival de Cannes, de la garde statique, aura suivi des formations, certains seront allés en renfort saisonnier sur les lieux de villégiature, aura participé à des grands événements internationaux – une majorité des compagnies va contribuer, au mois d'août prochain, à la sécurisation du G7 à Biarritz. Des missions auxquelles je peux ajouter des événements inattendus, comme les attentats ou les accidents environnementaux ou industriels.
Nous menons une réflexion sur l'évolution sociologique des jeunes gardiens de la paix, et notamment des élèves qui choisissent le métier de policier. Les motivations du jeune policier ne sont plus les mêmes que celles de leurs anciens. Faire partie d'une CRS est un choix de vie que nous devons accompagner.
C'est la raison pour laquelle, avec le directeur général de la police nationale (DGPN), dans la perspective d'une remontée en effectifs de la DCCRS, nous avons réfléchi à un dispositif qui ne serait pas un abondement brut des forces, une ouverture de postes sans réflexion et sans innovation, mais un dispositif aboutissant à la fidélisation des fonctionnaires dans notre maison.
La moyenne d'âge des fonctionnaires de la maison CRS est aujourd'hui élevée, quarante-trois ans – ce qui n'est pas sans lien avec l'absence de recrutement depuis des longues années. Or, il est évident qu'il existe un problème entre l'âge des fonctionnaires et les missions qui leur sont demandées. Au mois de novembre et décembre, par exemple, certaines unités ont effectué, durant plus de 22 heures d'affilée, du maintien de l'ordre, un combat, avec beaucoup de violence et d'engagement.
Vous avez raison, madame la députée, si nous voulons renforcer les effectifs de 1 000 policiers, nous devons l'envisager sur un plan triennal : un peu plus de 300 chaque année, auxquels il faut ajouter 400 fonctionnaires, pour compenser les départs en retraite.
Pour parvenir à cet objectif, nous nous devons d'innover. Notre réflexion nous a amenés à la solution suivante – rien n'est encore arrêté : orienter l'effectif nécessaire de jeunes gardiens vers les CRS, ce qui leur permettra de se former, d'apprendre le maintien de l'ordre, d'apprendre à travailler en unités constituées et à s'adapter aux nombreuses missions de police, d'être habilités à la plupart des équipements, de recevoir des formations les plus complètes possibles.
Ensuite, au bout de deux ou trois ans – le temps reste à définir –, nous donnerions à ces jeunes gardiens le choix de rester ou de partir, à la préfecture de police, à la sécurité publique, à la police aux frontières, etc.
Durant ces deux ou trois années, nous aurions, quoi qu'il arrive, bénéficié de la jeunesse et du nombre. S'ils restent, c'est qu'ils sont motivés pour rester. S'ils partent, la pompe étant amorcée, nous récupérerons de jeunes gardiens, à nouveau pour deux ou trois ans, et redonnerons aux services de la police nationale des fonctionnaires détenant une expérience très variée, des habilitations fortes et une capacité à pouvoir affronter des événements d'ordre public avec une expérience éprouvée.