Intervention de Mathilde Lignot-Leloup

Réunion du mardi 11 février 2020 à 17h15
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la DSS :

Dans notre estimation, entre le nombre de cartes Vitale fin 2019 – sachant qu'il y a encore un travail en cours pour réduire l'écart entre le nombre de cartes Vitale et le nombre de porteurs potentiels – l'écart est de 2,6 millions.

Nous poursuivons les travaux avec l'ensemble des régimes d'Assurance maladie pour expliquer les raisons de cet écart, lorsqu'il se justifie, et le cas échéant, de le réduire, notamment grâce à une mise à jour plus régulière du parc des cartes Vitale.

Monsieur le rapporteur, sur les 1,2 milliard d'euros de fraude détectée, nous décomptons, en 2018, 261 millions au titre des prestations de la branche maladie, 305 millions au titre des prestations de la branche famille et 22 millions au titre de celles de la branche vieillesse. Au titre de la fraude aux cotisations, liée au travail illégal, le montant des fraudes détectées s'élève à 641 millions d'euros. Ces chiffres correspondent à la fraude repérée par les organismes de sécurité sociale, au travers de leurs actions et de leur plan de contrôle.

C'est évidemment un sujet plus complexe d'évaluer l'ampleur de la fraude, sachant que cela ne veut pas dire que le potentiel de recouvrement des cotisations ni des indus de prestations atteindrait un tel chiffre.

Nous avons eu des échanges et partagé les différentes méthodologies d'évaluation, notamment dans le cadre des travaux qu'a menés la Cour des comptes en matière de prélèvements obligatoires. Elle a aussi regardé avec attention les particularités de la méthodologie en matière de prélèvements sociaux, qui se fonde sur ces contrôles aléatoires et sur un travail avec le CNIS. Savoir quel est le montant réel de la fraude est évidemment un exercice difficile. Nous nous sommes efforcés d'assurer une validation scientifique de la méthodologie. Cela a été le cas sous l'égide du CNIS ; cette méthodologie a fait l'objet de travaux sur la période 2014-2015, a validé le principe de contrôles aléatoires et donne lieu à un programme de contrôles aléatoires par les URSSAF.

La Cour des comptes a fait, par ailleurs, des recommandations pour améliorer l'évaluation de la fraude aux cotisations sociales. Nous sommes en train de travailler avec l'Observatoire sur la fraude et le HCFiPS pour voir comment nous pouvons procéder, notamment en complétant ces contrôles aléatoires, qui sont bien diffusés dans les entreprises, par des évaluations dans d'autres secteurs. À titre d'exemple, le secteur du travail indépendant a été considéré par la Cour des comptes comme étant moins évalué. Nous avons également une demande de la part de la Cour de renouveler plus fréquemment les contrôles et l'évaluation aléatoires sur l'ensemble des secteurs plutôt que de procéder par réactualisation régulière par les URSSAF. Nous aboutissons à une estimation, fondée sur une méthodologie robuste, évaluée en termes scientifiques les plus précis possible.

À ce stade, une évaluation de la fraude aux prestations sociales est réalisée pour les prestations familiales par la CNAF, mais il est plus difficile d'estimer l'ampleur de la fraude sur d'autres prestations. Nous avons identifié que la plupart des erreurs ou des fraudes concernent des prestations sous conditions de ressources. Une façon de lutter contre ce type de fraude est d'utiliser de plus en plus les ressources déjà déclarées à la source, avec les données de salaire fournies par la déclaration sociale nominative (DSN), ainsi que les informations liées au prélèvement à la source et les sommes versées par les autres organismes de sécurité sociale, au lieu de se fonder sur les ressources déclarées par la personne qui demande une prestation, ce qui peut être source à la fois d'erreurs et de fraudes. Ce sont des informations que la Sécurité sociale peut réunir au travers d'une « base ressources ». L'objectif est ensuite de verser les prestations en utilisant ces données sur les ressources et d'éviter ainsi un certain nombre de fraudes. Pour les prestations familiales, ce type de dispositif sera d'abord mis en œuvre pour les allocations logement, mais il pourra également l'être dans un deuxième temps pour le RSA ou la prime d'activité, qui pourront ainsi être mieux sécurisées.

Le recouvrement au titre de 2018 est un enjeu sur lequel nous devons progresser ; nous le savons. D'ailleurs, dans les conventions d'objectifs et de gestion, nous avons fixé des objectifs croissants de taux de recouvrement. Les redressements notifiés au titre de la lutte contre le travail illégal dépassent 600 millions d'euros, mais on ne recouvre effectivement que 50 millions d'euros. Cela peut être lié au fait que, la conduite des actions de lutte contre le travail illégal se traduisent parfois par la disparition de l'entreprise, et donc du fraudeur qui a été détecté : nous n'avons donc pas forcément la possibilité de recouvrer les sommes. En revanche, nous avons mis en place des outils pour permettre à l'URSSAF de sécuriser le recouvrement des sommes dès le déclenchement de l'opération. Ce taux de recouvrement va donc aller croissant. Je voulais vous apporter les chiffres pour les branches maladie, famille et vieillesse, mais je ne les ai pas sous les yeux.

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