Intervention de Nathalie Goulet

Réunion du mardi 18 février 2020 à 18h35
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Nathalie Goulet :

Tout le monde connaît la vieille histoire des centenaires algériens… Dans l'esprit des gens, à cause de la façon dont elle est présentée, la fraude sociale est liée à l'étranger. Mais beaucoup de Français sont capables de frauder tout seuls ! Pour éviter un débat qui risquerait d'être nauséabond, on finit par cacher des éléments. Le problème, c'est que personne n'a de responsabilités en matière de comptes et que les caisses se targuent d'être les seules à pouvoir comprendre le système. La cellule de Tracfin qui s'occupe de la fraude fiscale et de la lutte contre le blanchiment du terrorisme consacre une partie de son activité à la fraude sociale, laquelle sert aussi à la fraude fiscale, au blanchiment et au financement du terrorisme. Cela montre qu'il y a un problème !

Il faut également savoir que les responsables des divers organismes ont tous travaillé ensemble, qu'ils viennent tous du même secteur, de sorte que personne ne leur a jamais demandé de comptes. Il ne faut pas oublier non plus les aspects techniques : disposer de nombreux fichiers ne sert à rien si on ne sait pas les utiliser. On constate une grande différence entre les inspecteurs de terrain, qui ont conscience de la fraude, et les directions qui la nient. Il est essentiel de remettre à plat ce système ! La société Excellcium vous expliquera d'ailleurs que 25 % des bénéficiaires de retraites sont retrouvés au cimetière. Les organismes d'assurances complémentaires ont dû avoir recours à des entreprises privées pour vérifier si leurs assurés étaient toujours vivants...

Nous avons pensé imposer aux caisses de demander une preuve de vie, à l'image de ce que dispose la loi Eckert, mais cela a été jugé beaucoup trop compliqué. Pourtant, les banques le font tous les ans ! Nous avons alors proposé de faire transiter toutes les prestations par un compte en France, ce qui permettrait à la banque de savoir si les gens sont toujours vivants. Beaucoup trop compliqué, nous a‑t‑on répliqué une nouvelle fois. Or je suis certaine qu'il serait possible de négocier la création d'un compte de transit avec les banques. Il est invraisemblable que l'on ne puisse pas avoir de preuves de vie et que l'INSEE fasse état de 1,6 million de personnes « réputées vivantes » et de 1,5 million de personnes « réputées mortes ». Nous devrions quand même savoir qui est mort et qui est vivant ! Pour vous répondre, monsieur le président, je ne vois pas, dans ce cas, d'autre mot que celui d'omerta. Les gens à l'origine de l'omerta n'en tirent aucun profit personnel, mais, au moins, on ne les dérange pas pendant leur sieste…

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