Intervention de Charles Prats

Réunion du mardi 3 mars 2020 à 18h30
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Charles Prats, magistrat au Tribunal de grande instance de Paris :

En fait, c'est assez simple. Si vous avez un droit ouvert, potentiellement, vous pouvez tirer dessus. Un droit ouvert aux prestations familiales signifie que tous les mois, vous touchez une allocation. Pour les prestations vieillesse, ce sont des gens qui touchent tous les mois soit une retraite, soit le minimum vieillesse, l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), etc. C'est sur l'assurance-maladie que la question se pose. Avec un droit ouvert à l'assurance-maladie, vous, comme moi, comme tout un chacun, tirez si vous êtes malades. Peut-être, dans les jours qui viennent, allons-nous avoir une augmentation de dépenses de l'assurance-maladie, mais globalement, c'est quand vous avez des prestations en espèces ou des prestations en nature qu'il y a une dépense d'assurance-maladie à votre bénéfice.

Cela, dans le RNCPS, est compliqué à obtenir. Ce répertoire recense 10,6 millions de personnes qui ont des droits ouverts. Cela ne veut pas dire que tous les mois, elles dépensent avec leur carte vitale. Vous-même, vous avez des droits ouverts, mais heureusement, vous n'êtes pas tout le temps chez le pharmacien ou chez le médecin. La CNAM, qui a un système d'information beaucoup plus perfectionné que ce que l'on pourrait croire, sait au jour le jour très exactement quelle est la dépense chez tel et tel professionnels de santé et donc a contrario, par assuré social. Là-dessus, il n'y a pas de sujet. Si vous allez à la CNAM avec des informaticiens un peu experts, ils vont vous sortir très exactement combien de NIR bénéficient de prestations maladie. Ils vont vous sortir les droits ouverts, mais aussi ceux qui consomment. Allez voir une caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) pour voir comment cela se passe. Là-dessus, c'est finalement assez simple. Vous ne pouvez pas fiabiliser les données en tant que telles, puisque nous ne pouvons pas savoir si M. Dupont sera malade au mois de mars et ira quatre fois chez le médecin et cinq fois chez le pharmacien. Il a des droits ouverts. Après, va-t-il dépenser plus ou moins ? C'est aussi pour cela que vous votez tous les ans un objectif national de dépenses d'assurance-maladie.

Nous avons vu des graphiques intéressants. Même si les chiffres sont repartis un peu à la hausse, il faut quand même remarquer que vous avez eu, notamment sur l'assurance-maladie, une baisse du déficit. La courbe du déficit de l'assurance-maladie était assez intéressante. Là, c'est 2013. On pourrait quasiment se dire : « Tiens, cela ne correspond-il pas au nombre de cartes vitales en surnombre qui baisse ? » En 2013, dans le rapport de l'IGF et de l'IGAS, il y en avait 8 millions et, dans le rapport Goulet-Grandjean, il n'y en avait plus que 5,2 millions, peut-être même 2,6 millions, voire plus que 600 000.

Comme je le dis toujours, il ne faut pas confondre causalité et corrélation. Je ne dis pas qu'il y a un lien de causalité entre la baisse du nombre de cartes Vitale en surnombre et la baisse du déficit de l'assurance-maladie, mais en tout cas il y a une corrélation, modulo les dernières dépenses suite aux « gilets jaunes » qui ont fait repartir à la hausse le déficit. C'est une courbe intéressante. N'y a-t-il pas un travail souterrain fait avec sérieux par l'Assurance-maladie pour essayer de fiabiliser les chiffres et réduire cette distorsion ? On passe d'une distorsion de 8 millions en 2013 à 5 millions en 2019. Un travail a quand même été fait. Ce chiffre atteignait 10 millions avant, puisque cette histoire des cartes vitales remonte à une intervention de Philippe Douste-Blazy en 2004 quand il était ministre de la Santé. C'est de là qu'est partie la légende des fausses cartes Vitale. En fait, ce sont de vraies cartes Vitale qui sont actives, en surnombre, avec des droits ouverts alors qu'elles ne devraient pas en avoir. Fiabiliser cela est un gros travail. Nous ne savons pas déterminer si cela donne lieu à des dépenses ou pas puisque les dépenses d'assurance-maladie sont très conjoncturelles.

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