Intervention de Christophe Basse

Réunion du jeudi 25 juin 2020 à 15h45
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Christophe Basse, président du CNAJMJ :

Je n'ai malheureusement pas de chiffres. Pour ce qui est de la typologie, on en revient aux sociétés éphémères, récurrentes dans des secteurs d'activité comme le bâtiment ou la sécurité et impliquant des communautés de personnes assez identifiées. Nous assistons à des demandes d'ouverture de procédure collective, avec un nombre de salariés relativement important souhaitant bénéficier de la prise en charge de l'AGS, du chômage, etc. Dans ces cas-là, personne n'est capable de nous montrer les chantiers sur lesquels ils ont travaillé, de nous montrer des factures, de nous présenter ne serait-ce qu'une simple activité. Les dirigeants de ces entreprises du bâtiment déclarant une trentaine de personnes sont parfois des dirigeantes de nationalité étrangère âgées de dix-huit ou dix-neuf ans. Le faisceau d'indices est réellement énorme pour cette typologie, assez récurrente dans ce type d'activité, de tentative de fraude à l'AGS, avec des moyens assez faibles.

Vous avez aussi évoqué la fraude au paiement des cotisations, qui est un peu plus pernicieuse.

À l'ouverture des procédures collectives, nous recevons les salariés, ne serait-ce que pour mener les entretiens préalables. Ces entretiens sont physiques et nous découvrons régulièrement, quand nous discutons des listes de salariés, qu'une partie des salariés est totalement inconnue des autres. Ce sont des personnes qui ont des liens familiaux ou d'amitié avec tel ou tel dirigeant et qui reçoivent des salaires relativement réguliers.

Dans ces structures, les reversements des cotisations sociales, notamment à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), ne sont jamais faits. Il n'y a pas de difficulté : ils déposent et recréent une société, tout en étant éventuellement concurrents sur des marchés dans le cas où les sociétés ont une activité – s'agissant des sociétés éphémères, nous ne sommes pas capables de détecter la moindre activité.

Sans que nous ayons de chiffres, c'est toujours un peu le même type d'activité, toujours un peu le même nombre de salariés.

L'AGS a mis en place un système de détection de la fraude que nous interrogeons presque systématiquement quand nous pressentons cette difficulté, avec des salariés qui sont sur cinq sociétés différentes ou qui sont partis de l'une pour arriver à l'autre et pour repartir vers une troisième.

Cela s'observe notamment dans le secteur du bâtiment, notamment dans des communautés qui sont étrangères, quelle que soit la région. Que vous soyez en Île-de-France, dans le Sud, en Normandie ou ailleurs, ce type de structure se crée généralement dans des régions différentes pour échapper à la connaissance du tribunal. Je suis malheureusement convaincu que certains cas passent à travers les mailles du filet.

Soit, à l'occasion d'une demande auprès de l'AGS, nous pressentons une fraude et nous l'indiquons à cet organisme qui va faire des vérifications, soit, parfois, les vérifications malheureusement ne sont pas faites et les salariés sont payés. L'AGS a sans doute les moyens pour les cas avérés de fraude, de donner des chiffres précis. Pour notre part, nous ne sommes pas capables de vous dire quel pourcentage cela représente. Dans certains types d'activités, c'est assez massif.

Pour ne rien vous cacher, dans cette période de sortie de crise sanitaire, une alerte particulière nous est faite par Tracfin, compte tenu des aides gouvernementales massives qui ont été allouées aux entreprises, sur l'utilisation qui a pu en être faite et également sur le chômage partiel. Quand les entreprises viendront nous voir dans les prochains mois, il nous faudra montrer une vigilance toute particulière sur l'utilisation qui a été faite des deniers publics dans cette période.

Nous en revenons à la demande d'accès aux fichiers, que nous avions même assortie d'une proposition de texte il y a un an.

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