Intervention de Frank Robben

Réunion du mardi 21 juillet 2020 à 17h00
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Frank Robben, administrateur général de la Banque Carrefour de la sécurité sociale belge (BCSS) :

Il m'est difficile de répondre à cette question, car je ne suis pas un inspecteur social, ni le représentant d'un organisme luttant contre la fraude. La BCSS se contente de faire en sorte que tout le monde sache utiliser les outils à disposition pour lutter contre la fraude.

Nous disposons, je l'ai dit, d'un système de déclaration multifonctionnel qui nous permet de recevoir tous les trois mois des informations sur le salaire et le temps de travail des gens. Auparavant, chaque fois qu'un organisme de sécurité sociale avait besoin d'une de ces informations – en particulier l'office national de la sécurité sociale (ONSS), pour calculer les cotisations dues –, il devait la demander directement à l'employeur, qui pouvait tout à fait omettre de déclarer certains éléments du salaire versé à ses employés – primes de fin d'année, chèques repas par exemple –, tout en les déclarant s'agissant d'employés tombés malades ou ayant subi un accident de travail. C'était une manière de frauder. Or il n'est désormais plus possible de transmettre des informations différentes selon les situations, car celles qui sont contenues dans la déclaration faite à l'ONSS sont automatiquement utilisées pour calculer le montant d'une allocation. Les éléments non déclarés du salaire n'étant pas pris en compte, les syndicats s'opposent à une telle pratique dont pâtissent les salariés en cas de problème.

Des garanties contre la fraude existent donc. Dans les années 1990, quand un salarié payait des cotisations sociales, il recevait un bon de cotisation qu'il devait envoyer à sa mutuelle pour prouver qu'il en versait suffisamment. Certaines personnes faisaient une copie de ce bon et le transmettaient à plusieurs mutuelles ; elles allaient chez le médecin, payaient la consultation et copiaient la feuille de soins pour être remboursées parfois cinq ou six fois. Ce n'est plus possible grâce à un répertoire de référence qui nous permet de savoir précisément qui dispose d'un dossier dans quelle institution de sécurité sociale ; on ne peut y être affilié à plusieurs mutualités. Lorsqu'il a été créé, nous nous sommes rendu compte qu'une personne était affiliée – par des formulaires papier – à quinze ou seize mutuelles différentes, qui lui remboursaient toutes chaque prestation.

Ces exemples témoignent des garanties qui émanent automatiquement du système lui-même. En outre, lorsque l'on calcule le montant d'une allocation de sécurité sociale, on a désormais accès à l'ensemble des informations concernant les allocations touchées par la personne concernée. Les cumuls d'allocations non autorisés ne sont plus possibles, car ils sont directement repérés. Je peux donc vous parler des fraudes évitées, mais il m'est difficile de me prononcer sur celles qui continuent à être pratiquées.

Le bureau fédéral du plan (BFP), organisme indépendant chargé notamment de réaliser des prévisions macro-économiques, avait calculé il y a une dizaine d'années que l'action de la BCSS permettait d'économiser 1,7 milliard d'euros chaque année ; ces avantages financiers étaient liés à la diminution des charges sociales et administratives pour les entreprises et les citoyens, mais aussi, pour partie, à la lutte contre la fraude.

Je gère le système d'échanges d'informations belge non seulement dans le secteur social, mais aussi dans celui de la santé, à travers la plateforme eHealth qui met en relation notamment les médecins, les hôpitaux et les laboratoires, les cliniques. Il ne s'agit pas de lutte contre la fraude, mais nous obtenons là aussi des gains importants. Environ un quart des citoyens belges ont une maladie chronique ; éviter par exemple une analyse de sang par an et par patient chronique – car souvent les mêmes examens sont réalisés deux fois, ce qui n'a aucun sens – permet d'épargner 250 millions d'euros. La BCSS coûte entre 14 et 15 millions d'euros par an, et la plateforme eHealth environ 12 millions d'euros par an ; elles représentent des retours sur investissement qui sont loin d'être négligeables.

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