Intervention de François Molins

Réunion du mercredi 5 février 2020 à 14h30
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

François Molins, procureur général près la cour de cassation :

La question n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît, car il existe une différence de niveau entre la teneur des éléments pouvant justifier l'ouverture d'une enquête et celle des éléments pouvant justifier le recours à un juge d'instruction. On peut ouvrir une enquête sur des éléments beaucoup plus ténus que ceux conduisant à l'ouverture d'une instruction. Aller vers une instruction, dans le cadre de notre procédure actuelle, c'est déjà un regard porté sur la solidité des charges.

Dans le cadre de la loi du 25 juillet 2013, l'article 39-3 du code de procédure pénale donne au procureur de la République l'obligation impérieuse d'agir en toute impartialité, d'enquêter à charge et à décharge. Il lui donne un devoir de contrôle de légalité sur les moyens employés par la police – c'est aussi pour faire entrer la sécurité dans la case État de droit que nous sommes magistrats procureurs – et sur leur proportionnalité au regard de la gravité de l'infraction. Si nous avons des éléments suffisants pour aller vers l'ouverture d'une instruction, nous le faisons. C'était notre pratique au parquet de Paris ; les enquêtes étant tellement longues que nous estimions qu'il pouvait être intéressant d'ouvrir une instruction pour gagner du temps. Il a aussi des affaires dans lesquelles les sources d'information font courir le risque d'être instrumentalisé et obligent à des investigations préliminaires pour vérifier la crédibilité des informations à charge qui vous ont été communiquées. L'exercice est donc bien plus compliqué que votre question le laisse croire car il pourrait être contre-productif de rendre obligatoire l'ouverture d'une information chaque fois qu'un élu est visé par une plainte. De nombreuses plaintes à l'encontre d'élus donnent lieu à des classements sans suite, tout simplement parce qu'un premier examen démontre que les faits dénoncés ne sont pas constitués.

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