Intervention de Catherine Champrenault

Réunion du jeudi 6 février 2020 à 16h00
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Catherine Champrenault :

Les modes de recrutement sont divers, mais la voie royale du concours de la magistrature étudiant reste le pourvoyeur le plus important de magistrats, à raison probablement de 75 % du total des nominations. En tout état de cause, qu'il s'agisse du concours étudiant ou du concours interne, l'intérêt est de faire bénéficier les lauréats des enseignements de l'ENM. C'est un credo pour moi, même si aujourd'hui ce n'est peut-être pas politiquement correct : je suis très attachée à l'École nationale de la magistrature et à la qualité de son enseignement. Nous pouvons en juger chaque jour en voyant ses étudiants sortir de l'école – la Cour d'appel de Paris voit nombre de magistrats nommés à Bobigny, à Évry, à Créteil, à Meaux, voire à Paris. Je suis convaincue que l'accès à l'ENM par concours doit rester la voie royale.

Pour autant, je ne veux pas dire que l'ouverture du corps à l'extérieur soit négative. Je vous ferai d'ailleurs une confidence : mon mari est aujourd'hui à la retraite, mais il a par le passé intégré la magistrature par la voie latérale et la greffe a bien pris. Je n'ai aucune prévention au sujet des recrutements extérieurs.

Les recrutements extérieurs sont aujourd'hui d'origines diverses. Au parquet général et à la cour d'appel – mais c'est vrai aussi pour les juridictions de premier degré où les présidents et procureurs jouent ce rôle – nous conduisons des entretiens avec tous les candidats à ce qu'on appelle l'intégration directe dans la magistrature. Nous établissons dans ce cadre des rapports qui, s'ils sont favorables, permettent de présenter le dossier devant la commission d'avancement.

Il nous est à ce titre demandé de savoir si la personne à l'origine de la demande d'intégration représentera un apport exceptionnel pour le corps judiciaire. En principe, les recrutements latéraux doivent bénéficier à des personnes dont la valeur professionnelle est déjà établie – par exemple dans d'autres professions judiciaires – et à la condition qu'elle représente une plus-value pour le corps judiciaire. Il est vrai que certaines intégrations sont remarquables et enrichissent le corps.

Je n'ai pas mené d'études – je pense que l'École et la chancellerie le font – pour savoir si les recrutements classiques entraînent moins « d'erreurs de casting » que les recrutements latéraux. Mais je pense que la grande majorité des magistrats issus d'une intégration directe intègre les valeurs et les principes du corps judiciaire et la notion d'indépendance.

En tous les cas, lorsque nous les entendons, nous notons une véritable aspiration à cette indépendance. Ainsi, certains candidats avocats peuvent affirmer qu'ils veulent précisément échapper à la dépendance vis-à-vis de leurs clients qu'ils vivent comme une contrainte, et qu'ils souhaitent simplement appliquer le droit sans forcément passer par le prisme de la relation de clientèle.

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