Intervention de Jérôme Dirou

Réunion du mercredi 12 février 2020 à 16h00
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Jérôme Dirou, membre du bureau de la Conférence des bâtonniers :

J'ai été auditionné ce matin par l'un de vos collègues député, kinésithérapeute de métier. Il disait que sa profession relevait d'une caisse générale et qu'elle n'avait pas besoin d'une caisse de retraite autonome pour être indépendante.

Lorsqu'un avocat est en difficulté dans le paiement de ses charges – ce qui est le cas dans un barreau comme le mien où un tiers des avocats gagnent moins de 2 000 euros net par mois, c'est-à-dire moins qu'une greffière dans un tribunal – il connaît des difficultés économiques mises en exergue par la loi sur la faillite civile des professions indépendantes. Il peut être déféré pour non-paiement de cotisations par l'Urssaf, qui est le premier déclencheur de procédures collectives contre les avocats.

Si votre parlement fait passer les cotisations de 14 à 28 %, un avocat qui paie aujourd'hui 1 400 euros sur 10 000 euros en paiera 2 800. Sur 120 euros gagnés, l'avocat en donne 20 à l'État pour la TVA et il a entre 50 et 60 euros de charges. Il gagne donc 40 euros. Si on augmentait de 14 points ses cotisations, il ne gagnerait plus que 30 euros.

Si le recouvrement des retraites des avocats était réalisé par l'Urssaf, le nombre des saisines doublerait car les organismes d'État sont aujourd'hui des acteurs extrêmement importants dans le déclenchement de procédures dont ils ont la maîtrise. Aujourd'hui, quand ces procédures sont recouvertes par notre caisse nationale des barreaux français, il y a une appréciation intuitu personae du débiteur avocat avec une saisine du bâtonnier, une intervention des ordres et un mécanisme protecteur. C'est une approche spécifique de la gestion de la difficulté de l'avocat que ne pourrait pas avoir l'Urssaf si elle devenait l'autorité chargée du recouvrement des sommes. Aujourd'hui, la Caisse nationale des barreaux français par son mécanisme, par ces commissions de secours, par ces aides, par sa manière d'appréhender les problèmes est beaucoup plus protectrice.

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