Certes, le président est d'abord l'évaluateur. L'évaluation ne doit en principe pas être une évaluation de la pertinence des décisions du juge d'instruction. La vulnérabilité est effectivement plus grande dans une petite juridiction. Cependant, je n'imagine pas vraiment le président poser des questions directement. En revanche, il peut s'interroger, de façon indirecte, sur le rythme d'entrée et de sortie des dossiers, sur la performance, etc. Est-ce là un moyen d'inquiéter le juge d'instruction ? Qui, cependant, ira ensuite évaluer le juge d'instruction ? Certes le président évalue d'abord, mais la première présidence de la cour d'appel ensuite, et le président doit aussi demander l'avis du président de la chambre de l'instruction. Ce système d'évaluation est complexe, mais peut-être qu'un point de vulnérabilité existe.
La création du juge des libertés et de la détention vient du fait que l'on considérait que le juge d'instruction disposait de trop de pouvoir. Il semblait abusif qu'il puisse dire : « Monsieur, ou ce soir vous me dites tout, ou vous dormez en prison. Que préférez-vous ? » Désormais, la dichotomie est totale. C'est une vraie dichotomie, car la surprise est constante ! Les décisions des juges des libertés et de la détention sont parfois surprenantes ou, du moins, incompréhensibles à nos yeux. Le juge des libertés et de la détention aura sans doute de bonnes raisons de les prendre. Le système est assez bien fait. Chacun fait son travail. La seule difficulté, parfois, pour le juge des libertés et de la détention – comme le dit le Conseil constitutionnel – est qu'il n'a pas la capacité matérielle d'apprécier tout le dossier en permanence. Le juge d'instruction peut utiliser des techniques spéciales d'enquête, parfois assez massives, comme des interceptions, des géolocalisations. Pour certaines affaires économiques et financières, je fais parfois passer mes enquêteurs par les gaines d'aération pour obtenir une sonorisation du centre de contrôle de la fraude. Il s'agit là d'atteintes profondes. Cependant, je sais ce que je fais, je le fais pendant une période courte, car les infractions sont graves, et car je n'ai pas d'autres moyens pour arrêter une infraction qui par ailleurs peut entraîner des dizaines de millions d'euros de préjudice. Cela étant dit, le juge des libertés et de la détention est une avancée démocratique.