Intervention de Catherine Champrenault

Réunion du jeudi 2 juillet 2020 à 9h30
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Catherine Champrenault, procureure générale près la cour d'appel de Paris :

Est-ce que, en exerçant mon contrôle hiérarchique, je fais pression sur le procureur national financier ? Compte tenu de la contestation procédurale massive, qui risquait de conduire à la nullité des actes, il était de mon devoir d'appeler l'attention de la procureure sur sa compétence et sur l'intérêt qu'elle avait à passer la main à un juge d'instruction. Il s'agissait d'assurer la sécurité juridique de la procédure. Si, dans cette affaire, l'enquête du PNF avait été frappée de nullité, c'étaient l'avenir et la survie de ce parquet qui auraient été en cause.

Mon rôle est non seulement de garantir la bonne marche du parquet, mais aussi de faire respecter et de protéger les institutions. J'estimais que le PNF, en poursuivant l'enquête préliminaire, en dépit des contestations massives sur sa compétence, se trouvait en terrain très glissant. Ne pouvant lever moi-même l'incertitude juridique, j'ai considéré que le moyen le plus sûr consistait à ouvrir une information et permettre à une juridiction, la chambre de l'instruction, d'apprécier la régularité des actes et la compétence du PNF. Je le maintiens : j'étais dans mon devoir. Si je ne l'avais pas fait, j'aurais été en deçà de ma mission.

S'agissant de l'utilité de la remontée d'informations, un magistrat applique la loi. L'article 35 du code de procédure pénale prévoit que le procureur général fait remonter des informations au garde des Sceaux dans des « rapports particuliers ».

À l'heure actuelle, le parquet général près la cour d'appel de Paris suit 2 700 affaires, en matière de terrorisme, de criminalité organisée, de santé publique, sur les violences reprochées aux fonctionnaires de police, en matière économique et financière. La remontée d'informations revient à tout un service de magistrats, le service central, au sein du parquet général. Nous adressons des informations a posteriori à la DACG, qui regroupe elle aussi des magistrats. Il leur appartient de savoir comment informer le garde des Sceaux. Celui-ci doit avoir une éthique de secret professionnel et ne pas renseigner quiconque dans un intérêt qui ne serait pas celui de la justice.

J'applique la loi. Si votre assemblée modifie l'article 35, je l'appliquerai, ce qui libérera des forces vives pour se rendre aux audiences.

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