Intervention de Christophe Castaner

Réunion du jeudi 2 juillet 2020 à 11h00
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Christophe Castaner, ministre de l'intérieur :

Le droit de communiquer est encadré par l'article 11, alinéa 3 du code de procédure pénale. Une délégation aux services de police judiciaire est d'ores et déjà possible.

En pratique, les services de police et de gendarmerie sont associés à la communication du procureur. Ce dernier préconise parfois que telle ou telle personne s'exprime. À l'inverse, dès lors que les services d'enquête sont sollicités aux fins d'une expression publique sur une enquête judiciaire, ils doivent en aviser le procureur de la République et caler d'une part l'autorisation de parler et d'autre part les éléments sur lesquels ils peuvent s'exprimer. Des instructions très claires ont d'ailleurs été rappelées en interne par le directeur général de la police nationale et le directeur général de la gendarmerie nationale.

Votre question est plus large et reprend la première partie de mon propos concernant l'immédiateté et la propagation de fausses rumeurs. Nous faisons ce dernier constat en permanence. Nous pourrions illustrer ce point par de multiples exemples, sur les champs politique ou judiciaire. J'ai vu sortir des choses absolument ahurissantes !

Le procureur ne se précipite pas pour parler. Il veut la certitude de l'information. Cependant, une pression médiatique importante s'exerce. Les conditions encadrant le droit de communication du procureur de la République apparaissent parfois trop strictes, alors même que le besoin d'information des citoyens est important et n'est assouvi que par les chaînes d'informations en continu et les réseaux sociaux, qui quelquefois s'alimentent les uns les autres et laissent dire tout et n'importe quoi. Il se pose là une vraie difficulté. Des modifications législatives pourraient à mon sens être envisagées afin de prendre en compte l'évolution de notre société en société de l'information.

En ouvrant ce débat, je sais aussi la limite d'une parole politique sur un sujet qui doit rester judiciaire.

Nous voyons par ailleurs comment les procureurs ont commencé à intégrer cette dimension, en communiquant davantage. Des discussions ont lieu constamment entre les préfets – dès lors qu'il s'agit d'événements d'une certaine gravité – et les procureurs autour des communiqués de presse à diffuser.

Nous sommes de toute façon confrontés au fait que le monde médiatique est un Moloch qui a besoin d'être alimenté. En l'absence de matière, il s'auto-alimente avec n'importe quoi. Il est donc essentiel de déployer une parole millimétrée susceptible de fournir des éléments factuels, sans gêner pour autant le déroulement de l'enquête.

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