Intervention de Loïc Travers

Réunion du mercredi 16 septembre 2020 à 15h30
Commission d'enquête relative à l'état des lieux, la déontologie, les pratiques et les doctrines de maintien de l'ordre

Loïc Travers, secrétaire administratif général d'Alliance police nationale :

Comme l'a rappelé mon collègue Denis Jacob tout à l'heure, l'année 2016 et les manifestations contre la « loi El Khomri » marquent un tournant : on constate à partir de ce moment-là une aggravation des blessures et le nombre de blessés explose. À l'époque, 600 policiers ont été blessés sur une période très courte de trois mois. En outre, le contact systématique a commencé de devenir la règle.

Les objets utilisés dans les manifestations – acide, mortier, bombes artisanales – ont justifié a posteriori non pas un changement de doctrine, comme vous le dites, mais un durcissement dans la façon d'interagir. Quand vous retrouvez de tels matériels, vous ne vous posez plus de questions : il faut intervenir. Alors qu'en 2016 il y avait un manque de courage politique pour utiliser certains moyens intermédiaires de défense – à la préfecture de police de Paris, sur les quatre ou cinq canons à eau disponibles, un seul était opérationnel, et personne ne l'utilisait –, la situation a changé par la suite. Un certain nombre de personnes ont été évincées, on a procédé différemment, avec de nouvelles techniques. Il y a eu une prise de conscience de la problématique que vous évoquez, et un courage politique a enfin été affiché.

Nous avons donc pu réagir quand, près de deux ans après la « loi El Khomri », les gilets jaunes ont pris la main et qu'ont surgi les difficultés mentionnées par mon collègue : une absence de déclaration de manifestation, des lieux variables, une multitude de manifestations concomitantes, parfois une cinquantaine dans un périmètre de deux à trois kilomètres carrés. Tous ces paramètres compliquent évidemment la tâche des forces de l'ordre, qui peinent à s'adapter. Dans beaucoup de situations, nous avons les moyens d'intervenir, mais encore faut-il que les bons ordres soient donnés.

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