Concernant la polémique sur les violences policières, il faut conserver à l'esprit que les policiers se sont trouvés confrontés à des manifestations d'une violence inouïe. De plus, les responsabilités sont partagées avec la hiérarchie, qui a demandé aux policiers d'aller au contact – cela n'enlève évidemment rien à la responsabilité de ceux qui auraient commis des infractions. Or certains ont été équipés de LBD sans avoir reçu ni formation à leur utilisation ni entraînement. De même, les renforts déployés n'avaient pas l'habitude de les utiliser. Enfin, les cartouches commandées par le ministère de l'Intérieur ont rendu ces armes peu précises, voire dangereuses.
Si l'organisation générale du maintien de l'ordre par le ministère de l'Intérieur n'a pas été optimale, nous critiquons également le glissement opéré dans les instructions de politique pénale adressées aux magistrats du parquet. Très peu de gardes à vue ont débouché sur un renvoi devant le tribunal correctionnel : cela nous conduit à nous interroger.
La déontologie des policiers est très encadrée. Il faut replacer les faits dans un contexte plus général : la politique pénale a été débordée en raison d'un défaut d'anticipation. Il y a une incapacité à identifier et à interpeller les meneurs dans les manifestations, et pas seulement celles des Gilets jaunes ; on a l'impression de toujours interpeller les seconds couteaux. Cela pose de vraies difficultés car, d'une part, c'est injuste et, d'autre part, les infractions objets des poursuites ne tiennent pas devant un tribunal.
Comment améliorer le maintien de l'ordre et apporter une réponse pénale adaptée ? Celle-ci ne peut venir en soutien d'un maintien de l'ordre dépassé par les événements et susceptible de porter atteinte aux libertés. Ce n'est pas un problème de texte mais de doctrine et d'organisation. Cela peut passer par les caméras-piétons ou par une meilleure capacité à identifier les auteurs avec des technologies comme celle du marquage. Toutefois, il faut faire attention avec la technologie. Au ministère de la Justice, nous sommes dans l'incapacité d'exploiter des vidéos à l'audience, soit parce que c'est chronophage, soit parce que nous n'en avons pas les moyens techniques. Il faut donc mener une réflexion sur la doctrine et sur les moyens qui doivent l'accompagner.