Intervention de Michel Huet

Réunion du mercredi 3 mars 2021 à 15h00
Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

Michel Huet, réalisateur :

Les placers artisanaux sont en déclin, tandis qu'on assiste au développement des structures de 2 000 orpailleurs. Quand une quinzaine d'individus travaille sur un placer, ils ont besoin de matériel, d'essence et de nourriture, ce qui n'est pas évident, car ils n'en ont pas toujours les moyens. En réalité, sur un grand nombre de chantiers d'orpaillage de petite taille, lorsque quelqu'un tombe malade ou qu'il y a une panne de matériel, ce sont souvent les orpailleurs légaux qui viennent donner un coup de main. On trouve dans ce genre de structure – et c'est extraordinaire – de l'humanité. Les orpailleurs illégaux n'hésitent pas non plus à aider un petit groupe perdu en forêt, en difficulté alimentaire, médicale ou technique. Un lien se tisse ainsi entre les différentes structures, qui apporte la garantie de pouvoir compter sur l'un ou sur l'autre. Dans les organisations structurées, il y a un patron qui donne des ordres et des gens qui les exécutent. Cela n'a rien de comparable.

Les petites structures qui essaient de se cacher sous la canopée sont de plus en plus repérées et, de ce fait, en diminution. Mais elles cherchent sans cesse à se restructurer, en détruisant la forêt, dans des conditions de gestion extrêmement difficiles. Elles ne peuvent pas payer le matériel dont elles ont besoin et sont donc contraintes de travailler dans des conditions épouvantables pour espérer payer d'abord leurs dettes. Ce sont des personnes qui ne s'enrichiront jamais ! Je connais des gens en Guyane qui vivent cela depuis quinze ans, puisqu'on ne les laissera pas partir avant qu'ils aient réglé leurs dettes.

La Chine intervient dans ce processus, puisqu'elle propose du matériel moins cher. Les structures qui ont les moyens peuvent le stocker en forêt, mais il faut savoir qu'il n'est pas forcément payé non plus. La vie sur un placer est extrêmement difficile et douloureuse. Dans le film dont vous n'avez vu qu'un extrait, je montre à quel point ces petites sociétés d'orpailleurs souffrent sur le terrain et pourquoi elles s'accrochent : c'est qu'elles ne peuvent pas faire autrement. C'est sans fin.

Quant aux grandes structures, lorsqu'elles sont démantelées, pour peu que la gendarmerie ou l'armée reste sur place pendant un moment, elles partent déforester un autre terrain. On ne s'en sort plus. Les dettes et l'obligation de réussir conduisent les structures à rester sur le terrain. Il y a donc de plus en plus d'orpailleurs illégaux en Guyane.

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