Intervention de Gabriel Serville

Réunion du mercredi 26 mai 2021 à 17h00
Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabriel Serville, rapporteur :

Un problème informatique m'ayant empêché d'entendre une grande partie de ce qui a déjà été dit, je tâcherai d'être prudent dans la question que je m'apprête à poser aux personnels du BRGM présents aujourd'hui

Durant tous les entretiens et les auditions relatifs à l'orpaillage en Guyane, les réponses entendues ont porté sur les problèmes qualitatifs et quantitatifs, mais il est une question à laquelle je reste particulièrement attaché, et qui reste entière, à savoir celle de la doctrine. L'objectif assigné à la lutte contre l'orpaillage illégal est-il d'éradiquer le phénomène, ou bien de le contenir à un niveau que, pour ma part, je considère trop élevé ? En effet, certains estiment que cette lutte sans fin sera difficile à remporter compte tenu du cours actuel de l'or. À cet égard, l'expertise du BRGM pourrait-elle être mise à contribution pour accompagner le changement de doctrine que j'appelle de mes vœux ?

J'attire votre attention sur le fait que, dans le classement mondial de l'Unesco, la Guyane est le deuxième territoire pour la quantité d'eau douce renouvelable et disponible par habitant. Qu'est-ce qui m'amène à faire ainsi le lien entre cette ressource et la lutte contre l'orpaillage illégal, qui pollue en raison du déversement d'un fort tonnage de mercure dans les eaux de ruissellement ? Le fait est que nous ne pouvons plus continuer à raisonner uniquement à l'échelle du département, et qu'il faut maintenant réfléchir à l'échelle planétaire. Or, lorsque l'on constate que, chaque année, 80 à 100 millions de personnes sont obligées de migrer, de quitter leurs terres de vie pour aller s'installer ailleurs, notamment parce qu'elles n'ont plus d'accès à l'eau, est-il possible d'imaginer que, dans les décennies à venir, la Guyane joue un rôle beaucoup plus important au niveau mondial, compte tenu de son excellente position dans le bassin amazonien, qui fait d'elle une zone très arrosée ?

Je peux vous assurer que, en ce moment, il pleut énormément chez nous, ce qui occasionne des dégâts sur les voies de circulation, sur les champs, sur les habitations ; nous pouvons du reste imaginer que ces pluies torrentielles sont une des conséquences sur le territoire guyanais du réchauffement climatique. Le département pourrait donc peut-être se positionner en tant que terre d'eau, capable d'apporter son soutien à des pays où le stress hydrique est de plus en plus important. Or, cela ne sera évidemment possible qu'à partir du moment où le département ne serait pas estampillé « terre polluée », que ce soit par le mercure ou par le cyanure, déjà utilisé sur certains sites d'orpaillage légal.

Je me demande dans quelle mesure l'expertise du BRGM pourrait nous aider à construire ce nouveau concept, qui pousserait les gouvernements et le Parlement à prendre davantage conscience de la nécessité de préserver cette ressource en eau douce dont bénéficie la Guyane et qui est susceptible de faire d'elle une future terre d'excellence. Une telle orientation nécessiterait en revanche une lutte accrue, exacerbée, contre le déversement de mercure dans nos eaux, par les orpailleurs illégaux.

Si je fais ainsi le grand écart entre deux domaines d'activité qui ne semblent pas interconnectés, c'est que je recherche les voies et moyens pour, à partir de la question de l'eau, remonter jusqu'à celle de l'orpaillage illégal et de la pollution au mercure, afin que, sur la base de cette analyse et de cette démonstration, nous disposions des éléments, des armes nous permettant d'être beaucoup plus convaincants vis-à-vis du gouvernement et de nos collègues députés et sénateurs.

L'objectif est d'obtenir un changement de paradigme et de doctrine en matière de lutte contre l'orpaillage illégal, de ne plus nous contenter de le contenir à son niveau actuel, mais au contraire de mettre sur pied une lutte organisée selon des stratégies repensées, et visant l'éradication définitive de ce fléau qui pèse lourdement sur le territoire de la Guyane.

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