Intervention de Régis Brillat

Réunion du jeudi 16 septembre 2021 à 14h30
Commission d'enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française

Régis Brillat, secrétaire exécutif du CPT :

Le Comité pour la prévention de la torture souhaite vivement que les parlementaires s'impliquent dans le suivi de ses recommandations. Les recommandations que formule le Comité dans ses rapports de visites constituent des invitations et des incitations faites aux États à appliquer les mesures de prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants. Dès lors, certaines d'entre elles concernent directement le travail des parlements, aussi bien dans la dimension législative que dans la dimension de contrôle, essentielle à l'exercice de l'action parlementaire.

À l'issue de leur adoption et de leur transmission aux gouvernements, ces rapports deviennent publics si le gouvernement concerné accepte la publicité et certains États parties à la convention ont accepté une publicité automatique, soit sans discussion.

S'agissant de la France, depuis l'entrée en vigueur de la convention, le comité a effectué quinze visites, dont sept visites périodiques et huit visites ad hoc. La dernière visite périodique s'est déroulée au mois de novembre 2019 et elle a couvert un grand nombre de thématiques. Nous avons également réalisé une visite au mois de juillet 2020, centrée sur les conséquences de la crise sanitaire sur la situation en matière de prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants. Les rapports de ces visites ont été publiés à la demande du gouvernement, au mois de juin 2021, concomitamment aux réponses du Gouvernement à ses recommandations. Ces documents sont donc publics. Nous vous les transmettrons, car ils contiennent des réponses détaillées à des questions que vous avez formulées.

À l'issue de la publication du rapport, des recommandations et des réactions du gouvernement, le Comité initie un dialogue confidentiel avec les gouvernements relativement à la mise en œuvre de ses recommandations. Ce travail est extrêmement important parce qu'il assure la continuité entre une visite et la visite suivante.

De façon générale, le Comité ne compare pas les États entre eux parce que les visites se déroulent à des périodes différentes, dans des contextes différents, et parce que parfois, les situations évoluent très rapidement.

À titre d'exemple, la surpopulation carcérale constitue une préoccupation de longue date du Comité et elle a fait l'objet d'une attention particulière lors de la visite périodique que nous avons effectuée en novembre 2019. Au mois de juillet 2020, le Comité a constaté que la situation avait positivement évolué, notamment en raison de la pandémie.

Vous nous avez interrogés quant aux relations du Comité avec le défenseur des droits et le contrôleur général sur les lieux de privation de liberté. Le Comité a coutume, lorsqu'il commence une visite dans un pays, de prendre contact non seulement avec les ministères concernés par la visite, mais aussi avec d'autres institutions, et, pour ce qui concerne la France, systématiquement avec le défenseur des droits et le contrôleur général des lieux de privation de liberté. Toutefois, nous entretenons également des liens en dehors des visites, notamment par le biais des différentes institutions du Conseil de l'Europe auxquelles ces institutions nationales participent, ou de réseaux de mécanismes nationaux de prévention. En outre, à l'issue d'une visite, nous organisons des entretiens avec les autorités concernées auxquels le contrôleur général des lieux de privation de liberté est convié de sorte qu'il prenne connaissance oralement des premiers constats de la délégation du CPT. Nous avons d'ailleurs invité ces institutions à participer à la célébration du trentième anniversaire du CPT.

Les règles pénitentiaires européennes constituent une recommandation adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, soit par les représentants des quarante-sept États membres du Conseil de l'Europe. Elles ont été révisées et une nouvelle version a été adoptée récemment. Ces règles représentent une source d'inspiration très importante pour le CPT dans son action quotidienne et dans l'appréciation qu'il porte au cours des visites. En effet, ces règles traduisent un consensus entre les États membres du Conseil de l'Europe, sur lequel le Comité peut s'appuyer pour formuler ses recommandations. D'une manière générale, il existe une cohérence entre les recommandations du CPT et les règles pénitentiaires européennes, mais parfois, nos opinions divergent. À titre d'exemple, le CPT recommande que l'isolement soit limité à quatorze jours de sorte à diminuer ses conséquences négatives. Or le texte édictant les règles pénitentiaires européennes ne prévoit aucune limite temporelle à l'isolement.

Le CPT est attentif depuis de très nombreuses années à la question de la surpopulation carcérale et des normes minimales relatives à l'espace vital des détenus. Il a recommandé des standards minimaux à respecter, à savoir une superficie de six mètres carrés pour une cellule individuelle et de huit mètres carrés pour une cellule occupée par deux détenus. La partie toilettes, séparée du reste de la cellule, n'est pas prise en compte dans le calcul de ces superficies. Le respect de ces normes est évidemment lié à la question de la surpopulation carcérale sur laquelle le Comité a exprimé ses préoccupations, notamment quant à la situation en France. La Cour européenne des droits de l'homme – CEDH – a prononcé plusieurs arrêts qui sont soumis au système de la surveillance de l'exécution des arrêts de la Cour. Il importe que ces normes soient appliquées, dans le respect de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme.

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