Cette question nous renvoie à la difficulté d'ordre culturel dont j'ai précédemment parlé : la prison reste très répulsive, un énorme travail reste à faire dans ce domaine. Il a déjà été accompli dans plusieurs pays nordiques dans lesquels nous nous sommes rendus, mais nous n'avons pas la même culture et de tels changements ne se décrètent pas ni ne peuvent s'opérer du jour au lendemain. La personnalité, celle du président de la collectivité comme celle du directeur de l'établissement pénitentiaire, joue donc beaucoup, comme pour le travail en détention – je pense aux centrales qui organisent des ateliers pâtisserie, aux grands cuisiniers qui se sont investis dans des prisons.
Dans ce contexte, comme souvent, l'incitation financière est sans doute la meilleure : de petits avantages consentis à la collectivité devraient motiver celle-ci. Il est en tout cas souhaitable que la prison fasse vraiment partie de la collectivité. Philippe Gosselin a parlé d'un établissement familial ; on pourrait qualifier de la même façon la maison d'arrêt de Chartres, située en centre-ville, près du tribunal, et où les choses se passaient très bien malgré la vétusté des locaux.
Pour surmonter le problème culturel, la multiplication des échanges et des initiatives telles que la réunion de la commission des lois en prison, le développement des liens entre les présidents de collectivité et l'ensemble des intervenants en établissement pénitentiaire sont autant de facteurs d'évolution. Toutefois, il y faut sans doute plus d'une génération – en quarante ans de vie professionnelle, j'ai toujours été déçue à cet égard.