La maison d'arrêt de Basse-Terre est un établissement ancien situé en centre-ville de Basse-Terre et jouxtant le tribunal judiciaire et la cour d'appel. La maison d'arrêt de Basse-Terre est d'une capacité théorique de 129 places et d'une capacité opérationnelle de 244 lits. L'effectif est de 155 détenus majeurs hommes. L'établissement ne reçoit ni mineur ni femme. Ces derniers sont écroués au centre pénitentiaire de Baie-Mahault.
L'établissement est organisé en trois bâtiments d'hébergement. L'affectation des détenus est essentiellement en dortoirs sans séparation des prévenus et des condamnés. Les critères d'affectation prennent principalement en compte les profils des détenus dans le cadre de la lutte contre les violences ou la protection des plus vulnérables.
L'âge moyen des personnels est de 50 ans : les agents, expérimentés, ont pour la plupart été mutés à Basse-Terre après de longues années en métropole. Ils connaissent parfaitement les pratiques professionnelles et disposent d'un sens de l'observation aigu.
Les services administratifs sont particulièrement compétents, qu'il s'agisse du greffe pénitentiaire, de la régie des comptes nominatifs, de l'économat, du service des agents, du service technique ou des ressources humaines. Le dialogue social est satisfaisant et des instances paritaires se tiennent régulièrement. Les débats y sont constructifs.
À Basse-Terre, le rassemblement en dortoir, source de conflits, est le plus problématique. Il n'est pas rare de trouver jusqu'à dix détenus dans un même dortoir. Malgré une attention particulière des personnels et de l'encadrement sur l'affectation, des problèmes de cohabitation et des tensions existent. Ils sont toutefois essentiellement liés à des problématiques en amont de l'incarcération.
La Guadeloupe connaît le phénomène des gangs. Les sites de Baie-Mahault et de Basse-Terre y sont donc confrontés. Les deux principaux gangs sont nommés Section krim et Chiens la ri – chien des rues, en créole. Les profils issus de ces gangs sont séparés en détention pour éviter les règlements de compte. Ils font l'objet d'une gestion particulièrement sensible.
De plus, la présence de détenus originaires de Saint-Martin croît. Il s'agit généralement de personnes anglophones – trente-cinq détenus présents en moyenne.
Le nombre de personnes atteintes de troubles du comportement est également en croissance sur l'établissement de Basse-Terre – vingt détenus environ. La gestion de ces détenus est difficile. En effet, souvent violents, ils ne peuvent pas intégrer les activités de groupe car à l'origine d'incidents.
La crise sanitaire a permis de fédérer les personnels, car nous craignions une problématique amplifiée par les dortoirs. Malgré la suspension des activités pour les détenus, dont l'arrêt des parloirs, le niveau de fonctionnement s'est maintenu à un niveau très satisfaisant. Les procédures mises en place, bien que parfois très contraignantes, ont été acceptées par les personnels. Le taux de vaccination a atteint 51 % chez les détenus, mais le sujet reste difficile à aborder avec les personnels, la plupart y étant opposés.
Selon moi, les défis de la politique pénitentiaire à relever sur les territoires ultramarins sont : poursuivre le développement des aménagements de peines telles que la LSC – libération sous contrainte – et les alternatives à l'incarcération comme la détention à domicile sous surveillance électronique ; lutter contre les sorties sèches, problème criant à Basse-Terre, l'absence de préparation en amont avec des structures d'accueil entraînant une forte récidive des populations déjà plus ou moins préalablement sans domicile ; développer le travail pénitentiaire dans les structures, malgré une conjoncture économique déficiente, le taux de chômage étant également extrêmement élevé en Guadeloupe et le travail pénitentiaire constituant une source de rémunération pour les détenus ; intégrer des espaces qualitatifs – accueil de l'évaluation des parcours, ateliers de travail, installations sportives, zones sanitaires, SAS – dans le cahier des charges de l'immobilier pénitentiaire.
Je me réjouis qu'il existe enfin un projet de reconstruction de la maison d'arrêt de Basse-Terre dont les travaux ont débuté. L'établissement, d'une capacité de 200 places, sera livré en deux étapes. La première partie, prévue en 2023, permettra le transfert des détenus et services administratifs. L'établissement actuel sera ensuite démoli pour poursuivre les travaux jusqu'en 2025.
La nouvelle structure changera considérablement les conditions de détention, mais aussi les conditions de travail des personnels. Elle constituera un outil de travail comparable aux structures modernes. L'établissement disposera d'un QSL de dix places, d'un quartier arrivants, d'un quartier d'isolement, d'ateliers de production et d'une unité de vie familiale. L'encellulement individuel sera évidemment la règle. La nouvelle structure permettra également de labéliser le circuit des arrivants, le quartier disciplinaire, le quartier d'isolement, mais aussi le circuit sortant.
In fine, en 2025, l'établissement disposera d'un bâtiment d'hébergement supplémentaire où le programme Respecto pourrait être développé. Il s'agit de repérer les détenus capables d'intégrer un régime de confiance pour préparer leur sortie et éviter la récidive.
L'établissement ne compte pas de DPS. Il peut toutefois en recevoir dans le cadre d'un passage aux Assises sans qu'ils aient vocation à rester sur l'établissement. A contrario, à compter de 2025, grâce à un quartier d'isolement l'établissement, pourra accueillir des DPS.
Il n'existe actuellement ni QER ni QPR au sein de l'établissement de Basse-Terre.
Une UDV de cinq places, implantée au centre pénitentiaire de Baie-Mahault, a vocation à recevoir des détenus de la zone Antilles-Guyane.
S'agissant de la prise en charge de détenus souffrant de troubles psychiatriques, nous mettons en place des parcours de soins par le SMPR avec des consultations régulières. Des séances de travail en groupe sont également organisées régulièrement. En cas de crise aiguë, un détenu peut faire l'objet d'un placement en hospitalisation d'office.
De mon point de vue, la réinsertion doit débuter dès l'entrée en prison. Il revient à chaque détenu de construire son parcours afin de préparer au mieux sa sortie. Dans la maison d'arrêt de Basse-Terre, il est aisé d'intégrer des cours scolaires. Deux enseignants à plein temps et des vacations permettent de prendre en charge l'illettrisme, la remise à niveau et les études supérieures. Il est possible de suivre l'une des trois formations professionnelles proposées sur l'établissement – cuisine, informatique et bâtiment. Par ailleurs, trente-huit postes au service général permettent de proposer une activité rémunérée aux détenus – cuisine, buanderie, cantines, maintenance, nettoyage).
Le SPIP présent sur l'établissement assure un lien prison/extérieur et accompagne chaque détenu dans son projet. Il n'existe pas véritablement de difficulté avec le tissu associatif local.
À l'inverse, au regard d'une activité économique difficile et du manque d'industries dans le département, les entreprises ne se tournent pas vers les structures pénitentiaires. Il n'existe donc pas de travail pénitentiaire sur l'établissement de Basse-Terre. Des contacts ont été pris avec le MEDEF, qui informera les entreprises intéressées. Une piste en cours d'étude pourrait permettre l'ouverture de cinq postes de travail.
Une structure de Pôle emploi, présente dans l'établissement, rencontre des détenus à leur demande, mais aussi sur proposition du SPIP. Une convention pour l'emploi sera signée dans les prochaines semaines. Un forum des métiers, organisé annuellement, constitue une occasion de mettre en relation employeurs et futurs employés.