Monsieur le préfet de police, plusieurs d'entre nous ont déjà été, hélas, président, vice-président ou rapporteur d'une commission d'enquête. Or, pour qu'un tel exercice ait une utilité, il faut que les parlementaires, comme les personnes auditionnées, fassent autre chose qu'enfiler des perles.
La question de l'articulation entre ce qui s'est ou non passé dans le Val-d'Oise et ce qui s'est ou non passé à la préfecture de police n'est pas accessoire pour nous : elle est au cœur des interrogations qui justifient la constitution même de cette commission d'enquête. La question de fond à laquelle nous voulons répondre est la suivante : comment mieux détecter des individus islamistes infiltrés au cœur de l'État et comment les mettre hors d'état de nuire ?
Au sujet de l'articulation entre le Val-d'Oise et la préfecture de police, j'aimerais vous poser une question plus générale. Il y a dix ans, le ministre de l'Intérieur de l'époque, sous l'autorité du Président de la République, avait créé ce que l'on appelle la police d'agglomération, qui est définie par une double limitation : un périmètre géographique – qui réunit Paris, les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne – et une limitation organique, puisque seules trois directions de la préfecture de police sont concernées : la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), la direction de la police judiciaire (PJPP) et la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC).
Le périmètre de la police d'agglomération, tel qu'il a été défini en 2009, n'incluait donc pas les questions de renseignement, si bien qu'il existe aujourd'hui trois blocs chargés du renseignement : la DRPP, exclusivement compétente pour la ville de Paris, sous votre autorité ; le service central du renseignement territorial qui, je crois, dépend de la direction centrale de la sécurité publique, elle-même sous l'autorité du DGPN ; et, enfin, la direction générale de la sécurité intérieure. Pouvez-vous nous confirmer que le renseignement s'organise autour de ces trois blocs, et pouvez-vous nous dire comment vous envisagez l'évolution de cette organisation ?
Il me semble que deux évolutions sont envisageables.
La première option consisterait à dire qu'en termes de compétence territoriale (ratione loci), comme d'un point de vue fonctionnel (ratione materiae), le champ de la préfecture de police, en matière de renseignement, doit s'étendre à l'ensemble des questions franciliennes.
La deuxième option, très différente, consisterait au contraire à dire que la DRPP ne se justifie plus et qu'il faut envisager une fusion de vos services, soit avec le renseignement territorial, soit avec la DGSI – soit avec les deux. On avait évoqué, dans une autre commission d'enquête, l'hypothèse d'une direction générale du renseignement national, dans laquelle fusionneraient tous ces services.
On pourrait imaginer aussi des options intermédiaires. Comprenez en tout cas que nous avons besoin, sur ces questions, d'avoir votre point de vue, éclairé par une analyse factuelle et administrative – et non judiciaire –, des éventuels dysfonctionnements survenus autour du cas Harpon. En clair, y a-t-il eu un dysfonctionnement dans les échanges entre le renseignement territorial du Val-d'Oise et la préfecture de police ? Même si cela vous pousse à prendre un petit risque, et sans vouloir vous faire sortir de votre champ, j'aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez, au fond, de l'organisation actuelle du renseignement. Nous ne pouvons pas mener nos travaux si nous n'avons pas une parole de vérité de la part des hauts fonctionnaires de l'État, du préfet de police en particulier.