Intervention de Christophe Merlin

Réunion du mercredi 26 février 2020 à 15h15
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Christophe Merlin, directeur de la sûreté de la SNCF :

Mon propos s'articulera autour de trois temps.

Tout d'abord, la SNCF a mis en place tout un arsenal à destination des managers. Il nous fallait en effet une structuration solide de nos processus pour pouvoir aller au bout de notre démarche visant à écarter ceux qui étaient repérés comme des personnes susceptibles d'être dangereuses. Cet arsenal comprend une charte éthique, un règlement intérieur, des kits managériaux, un kit « ressources humaines (RH) » sur la diversité, un baromètre de détection reposant sur des critères fournis par les services de l'État pour mesurer l'état de la pratique religieuse jusqu'à la dérive radicale, des formations, ainsi que la mise en place d'une cellule conseil permettant de recueillir les alertes des managers.

Ce système en place depuis un peu plus de cinq ans fonctionne bien. Il est intégré dans le fonctionnement de l'entreprise. Tous les nouveaux managers passent systématiquement sous ces fourches caudines. Et au vu des remontées d'informations nous constatons que cela est vivant et produit ses effets. Ce système permet à la fois un signalement en cas de doute, et un apaisement de la relation sociale, car il n'est pas question de mener une chasse aux sorcières. Il s'agit d'un enjeu de sécurité pour l'entreprise.

J'en viens à mon deuxième point. Nous avons deux axes : le flux des personnes qui veulent entrer, et le stock des personnels en exercice – soit sur des fonctions non sensibles soit sur des fonctions sensibles. À la SNCF, il y a chaque année une rotation importante de personnels. Et il se produit une évolution dans le stock, certains personnels faisant l'objet d'une mutation interne ou étant signalés ment par la hiérarchie pour une évolution de leur comportement.

Cela nous oblige à déployer des stratégies distinctes. Vous verrez dans les chiffres que chacun de ces trois axes peut effectivement mener à des volumes très différents d'actions à mener par les services RH.

Nous travaillons sur trois volets. Le premier est la radicalisation – si tant est que nous puissions avoir une définition très précise de cette notion, nous, opérateurs, lorsque nous évoquons ce sujet avec les forces de police, notamment les services de renseignement. Le deuxième est la pratique religieuse, sur laquelle nous sommes vigilants et qu'il faut bien séparer de la radicalisation. Et en conclusion de ce triptyque figure le communautarisme – autre sujet sur lequel nous sommes aussi très vigilants, pour ne pas déstabiliser l'entreprise en matière sociale.

J'en viens enfin aux données, puisque vous souhaitez avoir quelques chiffres.

Depuis la création du SNEAS nous avons envoyé 4 503 demandes pour des nouveaux entrants. Nous avons reçu 29 avis d'incompatibilité, soit un taux de 0,65 %.

Comme vous l'avez dit, monsieur le président, il s'agit de la partie la plus facile du sujet. Ces personnes n'étant pas encore entrées, nous pouvons nous priver de leurs services.

Toutefois, pour certains métiers en tension, nous pouvons nous trouver confrontés à des problèmes de délais parfois pénalisants – les délais de recrutement étant parfois trop courts pour que nous puissions obtenir des réponses claires et précises de la part du SNEAS.

S'agissant des enquêtes conduites pour des mobilités internes, elles ont été au nombre de 2 000 et ont donné lieu à 5 avis d'incompatibilité. Ces incompatibilités ont été traitées par des licenciements, notamment les personnes concernées exerçant des métiers sensibles – même si pour nous l'assiette des métiers sensibles doit être repensée. En effet, dans le cadre de notre métier, toute la partie « traction », notamment la partie « maintenance », me semble devoir mériter une attention particulière car elle est source de risques réels.

Quant aux inquiétudes hiérarchiques portant sur des personnes qui auraient montré une évolution dans leur comportement, elles ont été au nombre de cinq. Ces cinq cas ont étés ciblés et le SNEAS en a été saisi. Il a donné, dans tous ces cas, un avis de compatibilité.

Au-delà du champ classique de la loi et de la relation avec le SNEAS, une veille est par ailleurs assurée en interne sur des signaux faibles ou sur des signaux qui évoluent. Nous avons eu en interne 3 500 capteurs de détection de comportements tangents ou susceptibles de constituer une amorce d'évolution dans la pratique religieuse jusqu'à la radicalisation.

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