Intervention de Cédric Bourillet

Réunion du mercredi 23 septembre 2020 à 14h00
Commission d'enquête sur l'évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Cédric Bourillet :

La DGPR est loin de porter toutes les actions de prévention. Il nous faut avoir une approche systémique avec l'air, l'eau, les produits chimiques, la radioactivité et l'alimentation.

Pour pouvoir agir de façon préventive, il nous faut savoir ce que nous cherchons. Un certain nombre d'actions sont mises en place en matière de recherche et de données. Des études de biosurveillance, qui représentent des engagements financiers extrêmement importants du ministère de la santé et de notre ministère, permettent de suivre périodiquement l'état d'imprégnation, ce qui nous aide à mesurer l'effet de nos politiques par rapport aux polluants visés, à nous comparer à d'autres pays européens et à identifier les actions à accélérer pour les années suivantes. Toutefois, nous ne mesurons que ce que nous cherchons. C'est pourquoi, en matière de prévention, il importe que la recherche nous guide le mieux possible quant à ce qu'il convient de rechercher.

Par ailleurs, il nous faut disposer de données, les suivre dans la durée et mettre en place les actions concrètes parmi lesquelles il nous faut choisir le bon acteur et le bon levier, qu'il s'agisse de crédits publics ou privés. Cette démarche peut passer par une réglementation, des aides publiques ou l'outil fiscal. Le niveau peut être européen, national ou territorial, ce qui est, par exemple, le cas des revêtements routiers permettant une réduction du bruit pour la population riveraine. Il convient également de se fixer le bon objectif, ce qui n'est pas simple. En effet, si celui-ci est inatteignable, nous créerons une machine à frustration. S'il est insuffisamment ambitieux, nous ne parviendrons pas à améliorer la situation aussi rapidement que possible et subirons des critiques légitimes.

Notre rôle est de fixer le niveau adéquat en ayant toute la connaissance des enjeux techniques, au sens large, économiques, culturels et sociaux. Il convient ensuite de procéder à une évaluation ex-post, ce que nous essayons de généraliser, y compris pour des actions transversales comme le plan national santé-environnement (PNSE), évaluation qui relève d'un exercice très honnête et transparent, très important pour s'assurer de l'atteinte des objectifs.

S'agissant du contrôle des pollutions, la DGPR et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) s'attachent prioritairement à la question des pollutions industrielles. Nous comptons 1 600 inspecteurs et nous basons sur une nomenclature des installations classées, qui est une sorte de répertoire des types d'activités industrielles devant être soumises à la police de l'État, notamment pour réduire les émissions. Lorsqu'une installation présente un type et un volume d'activité qui la soumet à notre police administrative, des arrêtés ministériels fixant un minimum de résultats au niveau national peuvent être pris. Le préfet peut ajouter localement des prescriptions complémentaires, en fonction du contexte, du type de process, de la proximité des riverains et des milieux naturels sensibles, afin d'ajuster ces résultats aux meilleures techniques disponibles et à l'impact des obligations de l'exploitant concerné.

Notre politique de contrôle nous conduit à effectuer plusieurs dizaines de visites annuelles dans certains sites. Nous nous appuyons parfois sur des entreprises privées, afin de décharger nos équipes, en termes de contrôle et d'audit. Nous essayons de hiérarchiser notre politique de contrôle. En centralisant les résultats au niveau national, nous repérons les cas où un secteur ou un exploitant « sort » des statistiques ou présente des résultats particuliers. Nous mettons alors en place un plan d'action sectoriel, comme ce fut le cas pour l'interdiction du perchloréthylène dans les pressings. Nous avons également obtenu une réduction de 50 % à 80 % des émissions de métaux lourds dans l'ensemble du parc industriel français, en une dizaine d'années.

Toutes les informations sur les émissions industrielles sont rendues publiques au moyen d'une base de données qui reprend l'évolution annuelle des émissions liées aux principaux polluants. Les rapports d'inspection et les informations environnementales sur les émissions sont accessibles sur demande, conformément à « l'ADN » de notre ministère.

En ce qui concerne la gouvernance budgétaire, plusieurs milliards d'euros sont dépensés chaque année par l'ensemble des acteurs mentionnés auparavant, en matière de santé-environnement et de prévention. Lorsque nous demandons aux industriels de procéder à des investissements, lorsque nous interdisons en France le perchloréthylène dans les pressings, ce qui nécessite le remplacement de l'ensemble des machines, lorsque nous investissons des milliards d'euros dans les transports ferroviaires et les transports en commun du quotidien, lorsque nous consacrons de l'argent aux pratiques agricoles et à l'accompagnement des agriculteurs via le Plan Écophyto ou d'autres dispositifs d'aide, comme ceux des agences de l'eau et lorsque nous mettons en place la prime à la conversion pour les véhicules, le montant total, public et privé, atteint plusieurs milliards d'euros par an.

S'agissant de la stricte action du ministère de la transition écologique, je citerai notre participation au fonctionnement de l'ANSES et aux agences de recherche Santé publique France, ainsi que la convention avec le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). Nous portons une large partie du budget de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS). Un ensemble de crédits budgétaires est dédié à des instances de recherche, d'expertise ou de production de données. Nous conduisons des actions de réduction des émissions ou de portage de politiques publiques que nous déléguons aux territoires. Nous versons quelques millions d'euros par an aux DREAL afin de leur permettre d'accompagner des actions dans les territoires. Nous procédons de même avec les ARS. Nous conduisons quelques actions de communication et d'accompagnement d'associations et de collectivités qui sont éligibles aux règles de subventionnement du ministère.

Le ministère engage des moyens budgétaires pour les salaires et les moyens de fonctionnement de nos équipes qui interviennent en matière de produits chimiques, d'organismes génétiquement modifiés (OGM), de pratiques agricoles, de bruit, de pollution lumineuse, de radioactivité, d'émissions industrielles, ainsi que pour les agents des DREAL qui opèrent des contrôles sur le terrain. J'ignore si le total correspond au montant de 95 millions d'euros que vous évoquiez.

La DGPR n'est pas la direction qui vient le plus en soutien économique par rapport aux directions traitant des transports, de la qualité de l'air, de l'accompagnement agricole, d'urbanisme et de rénovation thermique. Dans ces domaines, par habitude, l'intervention de l'État s'opère surtout au moyens de crédits publics. Pour notre part, nous nous inscrivons davantage dans une démarche de réglementation et de contrôle ou d'animation de la recherche, ainsi que d'usage d'outils transversaux.

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