Intervention de Agnès Popelin

Réunion du jeudi 8 octobre 2020 à 10h45
Commission d'enquête sur l'évaluation des politiques publiques de santé environnementale

Agnès Popelin, vice-présidente de la CnDAPse :

Notre souci est en effet de protéger l'alerte. Avant cette alerte, nous traitons un signalement pour savoir s'il est évocateur d'alerte et nous devons donc garantir à tout auteur de signalement que son identité ne sera pas divulguée, que les faits qu'il nous expose ne seront pas portés à la connaissance de tous.

Nous avons donc mis en place un groupe de travail pour installer une plateforme numérique sécurisée, mise en ligne en même temps que notre site Internet, en avril 2019. Cela a représenté un énorme travail, puisque nous sommes vingt-deux membres bénévoles qui nous réunissons toutes les six semaines à peu près, tandis qu'1,4 équivalent temps plein est réparti entre trois personnes au secrétariat général.

Cette plateforme nous permet de recueillir toute forme de signalement, aussi bien d'une association que de tous ceux qui peuvent être auteurs de signalement et émettre une alerte. Elle a été mise en place avec l'appui très efficace de l'équipe informatique du ministère de l'environnement.

Depuis avril 2019 et la mise en place de la plateforme, nous avons constaté une augmentation très importante des alertes. Nous avons reçu une cinquantaine de signalements depuis janvier 2017. Depuis avril 2019, nous avons reçu trente signalements par l'intermédiaire de ce site.

Pour que le site soit facilement accessible, nous avons conçu un accompagnement pas à pas. Vous pourrez faire l'expérience, en prenant un moteur de recherche et en faisant une recherche avec les mots-clés « alerte santé-environnement ». Vous trouverez notre site et vous pouvez faire un essai de la plateforme. Vous déclinez votre identité qui est sécurisée, vous exposez tous les faits qui peuvent contribuer à parfaire notre information et, à chaque étape, nous vous rassurons sur le processus, sur l'anonymisation des signalements.

En réunion plénière, nous ne donnons jamais les éléments qui permettent d'identifier le lanceur d'alerte ou même simplement de localiser l'alerte. Par exemple, dans le cas d'une entreprise qui dispose d'un quasi-monopole d'activité, le simple fait de préciser celle-ci permettrait de connaître l'entreprise en cause et de savoir où se situe l'alerte. Nous faisons donc preuve de beaucoup de vigilance en pré-instruction, en bureau ou en réunion plénière. Des pré-instructeurs se désignent, toujours à titre bénévole, pour instruire le signalement et parfaire les connaissances de la commission. La commission dispose certes de beaucoup d'expertises mais nous ne sommes pas tous des médecins ou des juristes avertis.

Ce site permet aux riverains de nous signaler le brûlage de déchets verts, de plastiques… Nous travaillons sur l'environnement du quotidien, à côté des gros dossiers.

Parallèlement à ce site d'alerte, puisque nous sommes chargés d'accompagner les établissements publics dans leurs procédures de recueil de signalement, nous avons mis en place un groupe de travail qui permet de mieux appréhender les difficultés auxquelles ces établissements sont confrontés lors du recueil des signalements.

Il faut d'abord rappeler que la loi Sapin 2 n'est pas forcément très connue. Au CESE, je rencontre de nombreux élus ou chefs d'entreprise qui sont surpris d'apprendre que toute personne morale, de droit public ou de droit privé, ayant au moins cinquante salariés est tenue de disposer d'un registre d'alertes de même que toutes les administrations de l'État, toutes les communes de plus de 10 000 habitants ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les départements et les régions.

Je siège moi-même dans certains des conseils d'administration des trente-cinq établissements. La compréhension de la loi Blandin et de la loi Sapin 2 n'est pas forcément très claire dans ces établissements et certains ne voyaient dans la loi Sapin 2 que les alertes concernant la délinquance financière ou la corruption. Pourtant, les alertes dont nous avons la charge concernent aussi la santé publique et l'environnement, tandis que toutes les entités morales publiques ou privées que je vous ai citées sont soumises à l'obligation de disposer d'un registre d'alertes.

Nous avons donc engagé plusieurs démarches d'accompagnement. Tout d'abord, tout le monde ne sait pas forcément comment faire ce registre d'alertes. Nous avons conçu un format type de registre d'alertes qui figure sur le site et est accessible à tous.

Ensuite, nous ne sommes pas là pour vilipender et être une autorité qui se transforme en juge. Notre rôle est d'accompagner pour que toutes les dispositions législatives existantes soient connues et mises en œuvre le mieux possible.

Nous avons donc mis en place une mission de dialogue et d'accompagnement constituée de trois personnes de la commission. Elles accompagnent ces trente-cinq établissements publics de recherche et d'expertise dans les procédures d'enregistrement d'alertes auxquelles la loi les oblige. Nous faisons une recension annuelle des pratiques mises en place par l'intermédiaire d'un questionnaire qui évolue au fil du temps en fonction des « retours » des organismes. La première année, cela a été compliqué parce que les établissements n'avaient pas encore désigné un référent pour les alertes. Actuellement, sur les trente-cinq établissements, dix-huit ont désigné un référent tandis que, dans les autres, il faut encore passer par les arcanes de la direction générale. Nous avons un taux de retour de 80 % sur ces questionnaires. Cette année, nous avons créé un groupe d'élaboration et d'amélioration du questionnaire et nous espérons un taux de retour encore plus élevé. Plus nous impliquerons les établissements, plus ils auront envie de répondre et, surtout, de nous faire leur retour d'expérience.

Nous nous inscrivons également dans une démarche d'échanges. Sur le site Internet, nous avons ouvert un groupe d'échanges numérique grâce auquel chacun des référents peut exposer ses difficultés, ses interrogations, ses questionnements. Je rappelle que beaucoup n'avaient pas compris que la loi Sapin 2 leur imposait de traiter aussi la santé publique et l'environnement. Les gens raisonnent « en silos » et le titre de la loi Sapin 2 faisait oublier que l'intérêt général recouvre aussi un principe constitutionnel qui concerne la protection de l'environnement et le bien-être des personnes.

Enfin, nous rencontrons nombre d'institutionnels, notamment les associations qui sont directement concernées par les risques, telles que l'association nationale des comités et commissions locales d'information (ANCCLI), l'association nationale des collectivités pour la maîtrise des risques technologiques majeurs (AMARIS). Nous travaillons aussi avec la gendarmerie et avec l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) qui est chargée de toute cette délinquance, notamment en ce qui concerne les espèces animales.

Nous souhaitons particulièrement lutter contre ce mal insidieux qu'est le doute et renforcer l'expertise d'évaluation en santé environnementale. Nous avons à ce sujet des propositions d'amélioration.

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