Il existe un intérêt des maires pour la nature en ville, mais également une certaine frilosité, en raison d'un contexte historique particulier. Il y a dix ou quinze ans, certains maires, notamment en milieu rural, ont souhaité mener des politiques de biodiversité. Il ne s'agissait pas nécessairement de la nature en ville, mais de sites plus ou moins remarquables. Ils ont fait l'objet d'une grande suspicion de la part d'environnementalistes : ceux-ci les suspectaient de se laisser davantage conduire par l'intérêt de leurs électeurs, voire par des intérêts particuliers, que par la préservation de l'environnement et de la biodiversité.
Cela a conduit un certain nombre d'élus à reculer sur ces questions. Heureusement, nous assistons à un renouvellement régulier des élus à chaque mandat, et un certain nombre d'entre eux n'ont plus ce passif en mémoire. Ils sont prêts à une reconquête du thème de la nature, y compris en milieu urbain. Il est à la fois nécessaire de les renforcer dans leur légitimité à se saisir de ces problèmes – ce n'est pas extrêmement long, mais cela exige de la motivation – et de mettre à leur disposition des outils, notamment techniques et scientifiques, qui ne sont pas toujours à leur portée.
Les agences de l'État font ce qu'elles peuvent et le font plutôt correctement. Néanmoins, il leur manque une culture de la communication, comme manque aux élus une culture de l'interrogation. Celle-ci permettrait probablement des relations plus aisées, ou à tout le moins, auxquelles on pense plus spontanément.
Si ces questions sont parfois d'une grande technicité, je serai plus nuancée en ce qui concerne les petites villes, et notamment les communes rurales. Ces dernières ont beaucoup moins perdu le lien à la nature que les communes plus urbaines. Ce lien n'est pas nécessairement appuyé sur des études scientifiques extrêmement détaillées, mais il existe une connaissance empirique, que nous savons efficace. J'ai le souvenir d'avoir entendu évoquer l'importance des cerisiers ne donnant plus de fruits pour repérer les lieux où il y avait un problème.
Le maire qui m'en a parlé était dans l'incapacité d'expliquer pourquoi, comme moi-même. Néanmoins, il existe des connaissances dans les zones rurales, qui leur permettent d'être moins démunies qu'on ne l'imagine face à ces questions. En l'occurrence, le problème concernerait plutôt les villes moyennes, c'est-à-dire celles dont les habitants ont perdu en partie le lien avec la nature, mais qui n'ont pas la stature administrative ou financière pour disposer d'experts extrêmement « pointus ». Dans ce cas, une forme de mutualisation pourrait être tout à fait intéressante.
Du reste, je vous signale l'initiative, aujourd'hui un peu ancienne, du conseil général du Haut-Rhin, qui avait mis en place des brigades vertes. Celles-ci étaient la déclinaison départementale des gardes champêtres, et elles leur ont permis de mutualiser au niveau du département un certain nombre de compétences. J'attire votre attention sur l'extraordinaire utilité des gardes champêtres, qui sont un corps en voie de disparition, ce que je regrette au titre de l'AMF, de même que les maires. En effet, ils ont un pouvoir de police méconnu, et beaucoup plus environnemental et adapté que celui des policiers municipaux. Leurs compétences et leurs connaissances sont loin d'être négligeables. Si j'avais une demande à formuler à titre personnel, ce serait de se pencher sur la manière de revaloriser ce corps de métier. Il est vrai que le terme de garde champêtre semble un peu désuet, mais leur disparition totale posera un véritable problème.