Je suis chercheur et je peux vous assurer que la recherche nantaise est prête à mettre en place un observatoire de la pollution. Nous créons actuellement un consortium, à ma connaissance unique, de chercheurs spécialisés sur les sols, sur l'air, sur l'eau, en santé, en sociologie. Nous avons même déposé en juillet un projet européen à 2,3 millions d'euros qui constituerait les prémices d'un observatoire. Ce projet est porté par le docteur Véronique Ruban qui dirige le laboratoire Eau et environnement à l'université Gustave Eiffel. Il s'agit donc de chercheurs appartenant à des structures d'excellence comme l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
Le docteur Véronique Ruban et son laboratoire sont porteurs depuis 2006 de l'observatoire nantais des environnements urbains. Ils coordonnent le service national d'observation Observil labellisé par le CNRS. Des scientifiques de l'université Gustave Eiffel, de l'université de Nantes, de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), d'AgroParisTech, d'Air Pays de la Loire ainsi qu'un médecin généraliste sont regroupés dans ce projet Life – l'investissement pour l'environnement – que nous avons déposé. Des collectivités locales sont prêtes à apporter des fonds. Ce projet a cinq objectifs regroupés en deux grands axes :
– Premier axe : démarrer un observatoire de la pollution. Il s'agirait de caractériser l'état sanitaire de la population dans la région. Nous le demandons depuis le début à l'ARS, puisque, en cas de cancers pédiatriques, nous pouvons nous attendre à ce qu'il existe des maladies du développement, des maladies chez les adultes et, d'ailleurs, beaucoup de cancers d'adultes et de pathologies de neuro-dégénérescence, telles que le Parkinson, nous sont rapportés dans notre territoire. Il s'agit également de caractériser l'état qualitatif de l'environnement pour commencer à tisser les liens. Nous avons toutes les compétences sur place. On nous dit qu'il faut que ce soit de la recherche internationale. Je n'imagine pas un chercheur américain venir faire un prélèvement à Sainte-Pazanne pour voir s'il trouve des pesticides dans la terre ou dans l'air ! Par contre, il faut effectivement mettre les données à la disposition de la communauté internationale pour accélérer les recherches.
– Deuxième axe : informer le public, aider les décideurs locaux qui, comme nous l'avons vu lors des comités de suivi, ont du mal à tout comprendre, car cela est très technique. Les chercheurs du projet Life ont également un rôle sociétal : rendre la connaissance à la société, lutter contre l'obscurantisme et même le populisme. Ils doivent être au cœur des territoires pour apporter cette connaissance. Les chercheurs et les collectivités locales se sont donc associés pour mettre en place des formations à destination du grand public et, en parallèle, mettre en place des formations universitaires de type formation en ligne ouverte à tous ( Massive open online course MOOC) pour apporter des compétences en santé environnementale à des étudiants de masters, de faculté de médecine ou à des professionnels.
Le but est le changement de comportement dans les pratiques et, surtout, la prévention. Le problème des cancers est souvent minimisé en disant que ce n'est pas grave parce que nous fabriquons de bons médicaments. Il faut savoir que les enfants traités ont des séquelles à vie, même s'ils sont guéris. Même si nous parlons souvent de cas, de numéros, de statistiques, ce sont des enfants qui se battent, des souffrances, des familles et il ne faut pas l'oublier.